CAA de BORDEAUX, 1ère chambre - formation à 3, 06/06/2019, 17BX02466, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme GIRAULT
Record NumberCETATEXT000038561125
Date06 juin 2019
Judgement Number17BX02466
CounselSCP CGCB & ASSOCIES BORDEAUX
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commission départementale d'aménagement commercial de Lot-et-Garonne a émis dans sa séance du 5 janvier 2017 un avis favorable au projet présenté par la société Prochamps portant sur la création à Estillac d'une part, d'un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 6 321,80 m² composé d'un hypermarché " Super U " de 2 761 m², d'un mail de 179 m², d'une boutique de 55 m² et de deux moyennes surfaces de 2 350,80 m² et 976 m² et d'autre part, d'un point de retrait permanent de 385 m² d'emprise au sol comportant 4 pistes de ravitaillement. La Commission nationale d'aménagement commercial, dans sa séance du 11 mai 2017, a rejeté les recours n° 3246 T01 et 3246 T02 présentés contre cet avis par les sociétés Passag, Pydaust et SAS Distribution Casino France et a émis un avis favorable au projet. En conséquence, le maire d'Estillac a notamment délivré le 2 juin 2017 un permis de construire un bâtiment à usage commercial à l'enseigne " Super U " de 5 226,50 m² de surface de plancher.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 25 juillet 2017, le 21 septembre et le 24 octobre 2018, la SAS Distribution Casino France, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le permis de construire n° 47091 16 A0029 délivré par le maire d'Estillac le 2 juin 2017 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la commune d'Estillac une somme de 1 500 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le dossier de demande comportait des lacunes notamment en matière d'évaluation des flux journaliers de circulation générés par le projet ; l'étude de trafic sur laquelle se fonde le pétitionnaire est désuète et incomplète en ne prenant en compte que les lots concernés par le permis d'aménager déposé par le demandeur (6 lots), et non le projet d'aménagement d'ensemble qui prévoit la réalisation de 12 lots au total ; la RD 656 ne pourra absorber le flux de véhicules généré par le vaste projet en litige ; le dossier de demande était également insuffisant en ce qui concerne les garanties relatives au financement et à la réalisation effective à la date d'ouverture de l'équipement commercial des aménagements envisagés à savoir une voie de circulation (rue du Puits de Carrère), un rond point interne et la création d'arrêts de bus, de pistes cyclables et de trottoirs ; le dossier est également insuffisant en ce qui concerne la présentation de la desserte du site par des modes de transport doux ;
- le projet est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale dès lors qu'il prévoit la création d'un ensemble commercial de 6 706 m² de surface de vente dans une Zacom intermédiaire alors que l'implantation de commerces de cette superficie n'est possible que dans les zones d'aménagement commerciales (Zacom) centre ville et les Zacom majeures d'entrée de ville ; il est également incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (Scot) dès lors que le projet d'une surface de vente de plus de 1 500 m² n'est pas desservi par une ligne de transports en commun située à moins de 300 mètres du site et que le demandeur ne garantit absolument pas la réalisation des aménagements censés améliorer la desserte du site en transports collectifs et en modes doux ;
- le projet ne se justifie pas en matière d'aménagement du territoire dès lors qu'il est situé en dehors des zones urbanisées, des secteurs d'habitat et du centre-bourg d'Estillac, entre une voie ferrée et une route, au sein d'une Zacom intermédiaire dans laquelle ne sont autorisés par le schéma de cohérence territoriale du Pays de l'Agenais que les commerces compris entre 1 500 et 5 000 m2 de surface de vente ;
- le projet aura un impact négatif sur l'animation de la vie urbaine ; la zone de chalandise dispose déjà d'une offre commerciale dense ; l'opération d'aménagement d'ensemble prévoit la réalisation prochaine de 6 autres lots commerciaux voisins des 6 lots faisant l'objet de la présente demande d'exploitation commerciale ;
- le projet aura un impact négatif sur les flux de circulation dès lors qu'il est uniquement accessible en voiture ; l'étude de trafic transmise par le pétitionnaire est obsolète et omet de prendre en compte les aménagements futurs de la zone dans laquelle il s'implante ainsi que les projets avoisinants ; cet accroissement est de nature à créer des risques en matière de sécurité ;
- le pétitionnaire n'a transmis aucun élément concernant la réalisation des aménagements routiers devant desservir le projet, et ce, alors que les voies d'accès sont très empruntées ;
- le projet est consommateur d'espaces comme en attestent la volonté de réaliser trois bâtiments non mitoyens et un parking de plain pied ;
- le projet ne se justifie pas en termes de développement durable puisqu'il engendrera des déplacements supplémentaires importants du fait de sa situation géographique ; l'insertion dans l'environnement est insuffisante ;
- la qualité environnementale du projet est insuffisante, il entraîne une importante imperméabilisation des sols ; aucune précision n'est donnée sur le traitement des eaux pluviales ; les panneaux photovoltaïques envisagés n'ont pas reçu l'agrément de la direction de l'aviation civile.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 septembre 2018 et le 22 janvier 2019, la commune d'Estillac, prise en la personne de son maire, représentée par la SCP CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la SAS Distribution Casino France une somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le dossier présente bien une évaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site et des compléments ont été apportés devant la Commission nationale d'aménagement commercial ; la requérante n'établit pas que les données seraient erronées ; le dossier de demande doit porter sur le projet du pétitionnaire, au cas d'espèce, le projet porte sur les lots 4, 5, 6, 7, 8 et 9 du permis d'aménager délivré le 19 octobre 2016 et il n'appartient pas à la SARL Prochamps d'évaluer les flux journaliers de circulation des véhicules générés par les projets des autres lots, dont elle ignore la consistance précise ; la jurisprudence n'impose une présentation cumulée des données d'un projet avec ceux d'un autre projet que dans l'hypothèse où ceux-ci ont été déposés de façon simultanée, ou instruits de façon simultanée par la Commission nationale d'aménagement commercial ;
- si le code de commerce exige, en cas d'aménagements envisagés de la desserte du projet, de fournir tous documents garantissant leur financement et leur réalisation effective à la date d'ouverture de l'équipement commercial, le chemin du Puits de Carrère et le rond-point interne au projet de la SARL Prochamps ne constituent pas la desserte du projet, mais son accès puisqu'il s'agit d'aménagements internes à l'opération prévus dans le cadre du permis d'aménager délivré le 19 octobre 2016 ; leur future et/ ou éventuelle rétrocession dans le domaine public de l'Agglomération ne permet pas de les qualifier de desserte du projet ; le dossier de demande comportait un courrier de l'agglomération d'Agen du 26 juillet 2016 avec l'étude d'extension de la ligne 3 vers la ZAC Grands Champs, incluant les horaires de desserte par le bus et précisant qu'il n'existe aucune contrainte pour mettre en place cette extension de ligne au regard de la largeur de voirie existante ; la situation a bien évolué par rapport à la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 26 mars 2015 puisque l'agglomération a réalisé une étude d'extension de la ligne 3 ; dès lors que la circonstance selon laquelle le site n'est pas accessible par les modes doux de transport ne justifie pas à elle seule le refus du projet, le pétitionnaire n'avait pas à fournir davantage d'éléments que ceux produits au dossier qui font également état d'un projet de desserte par piste cyclable, validé par une délibération du conseil municipal du 10 juin 2015 ; les dispositions de l'article R. 752-6 du code de commerce ne prévoient pas que le dossier de demande doive comporter un schéma de la desserte actuelle du site par les modes de transport doux ;
- le projet répond aux orientations du projet d'aménagement et de développement durables qui constate " qu'il existe à ce jour des inégalités en terme de répartition spatiale des équipements et des services au sein du Pays de l'Agenais et cela risque d'engendrer des problèmes récurrents en terme de gestion des déplacements à l'échelle du territoire ", à ce titre, le projet contribue au...

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