CAA de BORDEAUX, 1ère chambre - formation à 3, 01/03/2018, 15BX03146, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme GIRAULT
Date01 mars 2018
Record NumberCETATEXT000036685756
Judgement Number15BX03146
CounselD'ALBERT DES ESSARTS
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commission départementale d'aménagement cinématographique (CDACI) de la Charente a, par une décision du 3 février 2015, autorisé la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Raychamond à procéder à la création d'un établissement de spectacles cinématographiques de 10 salles et 1 922 places à l'enseigne " Méga CGR " sur la commune de Champniers.

Par des recours enregistrés sous le n° 245, la commune d'Angoulême (recours n° 245 A), les associations ACOR (association des cinémas de l'ouest pour la recherche, n° 245 B) et " Ciné Passion 16 " (n° 245 C) ainsi que la commune de La Rochefoucauld et la communauté de communes 4B sud Charente (n° 245 D) ont demandé à la Commission nationale d'aménagement cinématographique (CNACI) d'annuler cette autorisation.


Par une décision en date du 30 juin 2015, la Commission nationale d'aménagement cinématographique a admis ces recours et refusé d'autoriser ce projet.


Procédure devant la cour :

Par une requête conjointe enregistrée au greffe de la cour le 24 septembre 2015, un mémoire enregistré le 1er mars 2017 et régularisé le 2 mars 2017 et une production de pièce enregistrée le 10 novembre 2017, la commune de Champniers et la communauté de communes de Braconne et Charente, prises en les personnes de leur maire et président en exercice, représentées par MeB..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la décision du 30 juin 2015 de la Commission nationale d'aménagement cinématographique ;

2°) d'enjoindre à cette commission de réexaminer le projet dans un délai de quatre mois à compter de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à leur verser à chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les collectivités soutiennent que :
- leur requête est recevable dès lors qu'elle a été enregistrée dans les délais légaux et qu'elles justifient d'un intérêt pour agir en tant que commune d'implantation et de concédant de la ZAC des Montagnes Ouest dans laquelle doit être édifié le projet. L'administration n'a au demeurant pas produit l'avis de réception du courrier adressé à la communauté de communes. Leur recours ne peut être considéré comme tardif comme le soutient la commission. Si celle-ci prétend que leurs délibérations énonçant la date de notification de la décision au 24 juillet 2017 ne sauraient suffire à établir que la notification est bien intervenue à cette date, elle n'apporte aucun élément en sens contraire ;
- la décision est irrégulière en l'absence de mentions, notamment dans les visas, permettant de vérifier la composition de la commission ;
- le pétitionnaire n'a pas été à même de répondre aux observations sur le projet présentées par le président du conseil départemental dans une lettre adressée au président de la commission le 12 juin 2015, visée dans la décision en litige, et dont il n'a pas eu connaissance du contenu, en violation du principe du contradictoire garanti par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, applicable aux décisions de la commission. La commission ne saurait se prévaloir de ce que les observations du conseil départemental seraient identiques aux moyens développés par les auteurs du recours ;
- la décision de la commission n'est pas suffisamment motivée. Sur les onze considérants de la décision, seuls trois concernent véritablement l'appréciation des caractéristiques du projet, les autres étant relatifs au contexte local, à l'impact des deux projets généralistes et grand public déjà autorisés, notamment en matière de complémentarité des programmations, et à l'impact du projet sur le déséquilibre des zones commerciales entre elles et sur l'animation de la vie urbaine d'Angoulême, ces deux derniers motifs ne constituant au demeurant pas des critères d'appréciation des projets en matière cinématographique. Les trois autres motifs sont fondés sur des suppositions par ailleurs dénuées de précision sur l'atteinte portée aux cinémas existants en matière d'accès aux films ou sur l'absence de protection du pluralisme dans le secteur de l'exploitation cinématographique ;
- le projet en litige répond au critère de diversité cinématographique et la commission a entaché sur ce point sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. La programmation prévue étant essentiellement généraliste, l'impact du projet sur les cinémas " Art et essai " apparaît limité. Par ailleurs, des engagements, homologués par le centre national du cinéma et de l'image animée, ont été pris sur le fondement des articles L. 212-19 et L. 212-20 du code du cinéma et de l'image animée permettant de garantir la pérennité des établissements Art et Essai existants, y compris ceux implantés dans le centre-ville d'Angoulême, ce que le rapporteur devant la commission avait d'ailleurs relevé. La commission s'est en outre abstenue de préciser en quoi ces engagements ne permettraient pas d'assurer le maintien du pluralisme dans ce secteur ;
- les difficultés d'accès aux films sur lesquelles la commission nationale a fondé son refus ne présentent qu'un caractère hypothétique et la position du rapporteur sur ce point n'est absolument pas étayée. Les autres exploitants auditionnés par le rapporteur n'ont à aucun moment fait mention de telles difficultés. Ainsi, la commission ne pouvait sans erreur manifeste déduire de la seule implantation de dix nouvelles salles dans ce secteur qu'elle aurait des " effets prévisibles négatifs " notamment en matière d'accès aux films ;
- le projet présente d'incontestables effets positifs au regard de la diversité de l'offre cinématographique, contrairement à ce qu'a estimé la commission. Il répond aux attentes des spectateurs du secteur, contribuera à son animation culturelle et réduira le déficit de fréquentation et d'équipement constaté par le rapporteur. Il n'existe en effet que cinq établissements, auxquels s'ajoute un sixième récemment autorisé sur la commune de Garat mais non encore ouvert au public, pour un total de 22 écrans en comptant les six prévus sur le dernier complexe autorisé. Sur la zone primaire de la zone d'influence cinématographique, seulement treize écrans sont dénombrés, tous situés à Angoulême, laquelle commune ne représente qu'un tiers de la population de la zone. L'indice de fréquentation des salles de cinéma, même particulièrement élevé, ne saurait par lui-même révéler à lui seul un quelconque risque de déséquilibre, le projet permettant au contraire d'approcher le taux d'équipement de la zone et l'indice de fréquentation des moyennes nationales ;
- la commission a estimé à tort que la réalisation d'un établissement de type Art et essai de six salles sur la commune de Garat, au sud-est d'Angoulême, serait incompatible avec un projet de multiplexe au nord de l'agglomération, dont l'enseigne, " CGR " est par ailleurs déjà présente en centre-ville. La commission s'est bornée à relever l'existence d'une autorisation pour l'établissement de Garat sans en tirer de conséquences légales quant à l'offre de programmation de celui-ci, alors qu'il s'avère que les différences présentées par les deux projets en matière de programmation conduisent nécessairement à ce que le spectateur puisse choisir entre des genres cinématographiques différents. En outre, une autorisation d'aménagement cinématographique ne peut être refusée...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT