CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 29/07/2019, 19BX01078- 19BX01079, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme POUGET M.
Judgement Number19BX01078- 19BX01079
Record NumberCETATEXT000038867282
Date29 juillet 2019
CounselPOUGAULT
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler, d'une part, l'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a ordonné son transfert aux autorités italiennes dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du 21 février 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne l'a assignée à résidence.

Par un jugement n°1901078 du 6 mars 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé ces deux arrêtés du préfet de la Haute-Garonne du 21 février 2019 et lui a enjoint de délivrer une attestation de demandeur d'asile à Mme B...dans un délai de sept jours.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée, le 21 mars 2019 sous le n°19BX01078, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 6 mars 2019.

Il soutient que :
- c'est à tort que le magistrat désigné a annulé l'arrêté de transfert de Mme B...aux autorités italiennes au motif tiré de ce qu'il avait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas le bénéfice de la clause discrétionnaire de l'article 17 du règlement UE n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dès lors que, d'une part, il n'est pas démontré que l'Italie ne respecte pas les droits fondamentaux des étrangers sollicitant l'asile, et que, d'autre part, Mme B...ne démontre pas que sa famille et elle-même serait en danger en cas de transfert en Italie où ils ont vécu durant quatre années.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2019, Mme B...représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) de l'admettre, à titre provisoire, à l'aide juridictionnelle ;
2°) de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou à elle-même sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative si sa demande tendant à son admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle était rejetée.
Elle fait valoir que :
- c'est à bon droit que le premier juge a estimé que l'arrêté attaqué était entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 et qu'il méconnaissait les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
-la décision de transfert aux autorités italiennes est insuffisamment motivée en fait et est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
-elle méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ;
-le préfet ne rapporte pas la preuve de la saisine des autorités italiennes dans le délai de deux mois conformément à l'article 23 du même règlement ;
- la décision de transfert est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé lié par la circonstance que sa demande d'asile relève de la compétence des autorités italiennes ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'appliquer la clause discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la décision de transfert méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant assignation à résidence est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant transfert aux autorités italiennes ;
- elle méconnaît l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

II. Par une requête, enregistrée le 21 mars 2019 sous le n°19BX01078, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse du 6 mars 2019.

Il soutient que :
- sa requête au fond contient des moyens sérieux de nature à entraîner l'annulation du jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B...devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse ;
- l'exécution de la décision du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse entraîne des conséquences irréparables pour l'autorité administrative justifiant le sursis à exécution eu égard à la caducité dont sera frappé l'arrêté de transfert à l'expiration du délai de six mois à compter de la date du jugement attaqué.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2019, MmeB..., représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête du préfet de la Haute-Garonne, demande à la cour de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou à elle-même sur le seul fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative si sa demande tendant à son admission à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle était rejetée.

Elle fait valoir que le préfet ne justifie pas de moyen sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par le jugement et s'en remet pour le surplus aux moyens soulevés dans son mémoire en défense produit dans la procédure au fond.


Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement d'exécution (UE) n°118/2014 de la commission du 30 janvier 2014 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme G...pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Marianne Pouget a été entendu au cours de l'audience publique :


Considérant ce qui suit :

1. Mme C...B..., ressortissante nigériane née le 25 février 1998, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 18 août 2018. Le 24 août 2018, l'intéressée s'est présentée à la préfecture de la Haute-Garonne pour y formuler une demande d'asile. Constatant au vu du résultat du relevé de ses empreintes décadactylaires qu'elle avait introduit une demande d'asile en Italie le 17 novembre 2015, puis le 23 mars 2016, l'autorité préfectorale a saisi le 2 octobre 2018 les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge sur le fondement du b) du 1 de l'article 18 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. A la suite de l'accord implicite des autorités italiennes né le 17 octobre 2018, le préfet de la Haute-Garonne a prononcé par deux arrêtés du 21 février 2019 le transfert de Mme B...aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile, d'une part, et son assignation à résidence au sein de la commune de Toulouse pour une durée de 45 jours renouvelable trois fois, d'autre part. Par une requête n°19BX01078, le préfet de la Haute-Garonne relève appel du jugement du 6 mars 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a annulé ces deux arrêtés et lui a enjoint de délivrer à MmeB... une attestation de demandeur d'asile à dans un délai de sept jours. Par une requête n°19BX01079, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n°s19BX01078 et 19BX01979 du préfet de la Haute-Garonne sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une...

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