CAA de BORDEAUX, 3ème chambre - formation à 3, 06/06/2017, 16BX03426, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. DE MALAFOSSE
Date06 juin 2017
Judgement Number16BX03426
Record NumberCETATEXT000034892959
CounselCABINET TEILLOT - MAISONNEUVE - GATIGNOL - JEAN - FAGEOLE ; CABINET TEILLOT - MAISONNEUVE - GATIGNOL - JEAN - FAGEOLE ; CABINET TEILLOT - MAISONNEUVE - GATIGNOL - JEAN - FAGEOLE ; CABINET TEILLOT - MAISONNEUVE - GATIGNOL - JEAN - FAGEOLE
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Château l'Eglise Clinet a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'autorisation d'exploitation de parcelles viticoles sur le territoire de la commune de Pomerol, accordée à la société civile (SC) Château L'Evangile par un arrêté du préfet de la Gironde du 13 juillet 2011.

Par un jugement du 15 octobre 2013 n° 1103684, le tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à cette demande.

Par un arrêt du 26 février 2015, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement sur saisine de la SC Château l'Evangile (sous le n° 13BX03370) et du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt (sous le n° 14BX00668), et a rejeté la demande présentée devant le tribunal par la SCEA Château l'Eglise Clinet.

Par une décision n° 389757 du 19 octobre 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur saisine de la SCEA Château l'Eglise Clinet, a annulé l'arrêt n° 13BX03370, 14BX00668 du 26 février 2015 et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2013, un mémoire enregistré le 7 janvier 2015 et un mémoire après cassation enregistré le 10 janvier 2017, la société Château l'Evangile, représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 15 octobre 2013 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal par la SC Château l'Eglise Clinet ;

3°) subsidiairement, de réformer le jugement en tant qu'il annule l'autorisation contestée en tant qu'elle porte sur les parcelles cadastrées section B n° 152, 166, 286, 624, 693, 855, 936 et sur les parcelles cadastrées section C n° 270, 350, 355, 358, 406 et 408 ;

3°) de mettre à la charge de la société Château l'Eglise Clinet la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le tribunal administratif a écarté à tort la fin de non-recevoir fondée sur le défaut d'intérêt à agir en retenant un argument non présent dans ses écritures ; l'irrecevabilité relevait uniquement de ce que la SCEA Château l'Eglise Clinet n'était pas propriétaire des parcelles convoitées ;
- le tribunal a retenu à tort une erreur de droit commise par le préfet ; le préfet a bien retenu un motif justifiant l'autorisation accordée qui correspond aux orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles et qui a trait directement à l'exploitation du vendeur ; la lettre comme l'esprit de la loi est de prendre en considération tant l'exploitation conservée que celle objet de la cession ; le préfet a donc bien pris en compte les impératifs posés par l'article L. 331-3 du code rural en tenant compte de l'exploitation du vendeur et de ce que l'opération de cession s'inscrivait dans une opération plus globale ; le préfet n'a donc commis aucune erreur de droit en prenant en compte l'intérêt du maintien sur l'appellation Pomerol de l'exploitation du vendeur ;
- l'autorisation accordée le 13 juillet 2011 à la société Château l'Eglise Clinet est périmée à ce jour en vertu de l'article L. 331-4 du code rural et de la pêche maritime faute d'exploitation des parcelles et une annulation de l'autorisation contestée ne lui permettrait pas d'exploiter les terres ; cette société ne justifie donc plus d'un intérêt à agir ;
- il ressort des termes mêmes de l'article 2 de l'arrêté préfectoral que s'agissant du cas n° 2, l'ordre de priorité compte 4 rangs de priorité sans prévoir pour la priorité de rang 4 " autres agrandissements " une hiérarchisation des critères énumérés sous cette priorité ; la société Château l'Eglise Clinet ne démontre pas, et n'allègue pas relever d'une autre priorité de rang supérieur ; le Conseil d'Etat précise dans son arrêt du 19 octobre 2016 que, dans 1'hypothèse où les demandeurs relevaient du même rang de priorité, ce qui n'est pas contesté, le préfet devait examiner les mérites des deux demandes respectives au regard des critères de départage prévus en pareille hypothèse et il ajoute que le préfet doit, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tenir compte pour procéder à ce départage, de l'ensemble des critères prévus à cet effet ; il en résulte que si le Conseil d'Etat invite au départage, il ne l'impose pas à tout prix, ce qui laisse au préfet la possibilité d'accorder deux autorisations concurrentes ; parmi les sous-critères du cas n° 2.4, aucun n'est prioritaire sur un autre, à défaut de toute indication précise du schéma directeur dans ce sens ; le préfet était donc parfaitement libre de les considérer de manière indépendante ; au surplus, le préfet n'est pas tenu de se prononcer sur chacun des critères prévus à l'article L. 331-3 du code rural ; en l'occurrence, le préfet a apprécié souverainement l'importance relative des sous-critères et en a logiquement conclu qu'aucune demande n'était prioritaire par rapport à l'autre et qu'il y avait lieu, dans ces conditions, d'attribuer cette autorisation aux deux demandeurs ; .
- le préfet ne s'est pas borné, comme le prétend à tort la société Château l'Eglise Clinet, à fonder sa décision sur l'intérêt du maintien dans sa globalité de l'exploitation du vendeur ; l'utilisation de l'expression " par ailleurs", et la place de ce motif à la fin de son considérant, démontre le caractère complémentaire de ce critère ;
- les superficies exploitées par la société Château l'Eglise Clinet doivent être majorées si l'on tient compte des superficies dont dispose la SCEA Les Deux Rives dans laquelle Monsieur A...E..., sociétaire de la société Château l'Eglise Clinet est membre exploitant, soit 4 ha 21 a 36a de vignes en AOC Lalande de Pomerol, 5 ha 56 a 35 ca de vignes dans la même appellation, et 8 ha 22 a 79 ca de vignes en AOC Castillon Côtes de Bordeaux, qu'il faut compléter par 9 ha 63 a 22 ca de terres dans la même appellation ; en conséquence, la société Château l'Eglise Clinet exploite directement ou indirectement une surface supérieure à celle de château l'Evangile ;
- l'effet restructurant sur le parcellaire est neutre dans la mesure où chaque candidat dispose déjà d'un parcellaire autonome et cohérent qui permet, notamment, à la société Château l'Eglise Clinet de mettre en marché ses vins du dernier millésime parmi les prix les plus élevés de l'AOP Pomerol ;
- l'éloignement par rapport au siège d'exploitation est à l'avantage de la société Château l'Eglise Clinet mais cet avantage qui se résume à une plus grande proximité de quelques centaines de mètres apparaît totalement négligeable au regard des usages viticoles en Gironde où il est très fréquent que les vignes soient plus ou moins distantes de quelques centaines de mètres, voire de quelques kilomètres, du siège de l'exploitation ;
- la viabilité des deux exploitations est assurée dans les deux cas, et le préfet n'a pas estimé que ce critère pouvait valablement départager les deux demandeurs ;
- le critère relatif à l'intérêt économique et social du maintien de l'exploitation faisant l'objet de la demande est, quant à lui, totalement en faveur de la société Château l'Evangile si, contrairement à ce qu'indique, sans le justifier, le Tribunal Administratif, "l'exploitation" visée par le texte s'entend aussi bien de l'exploitation du vendeur affectée par l'opération que de l'exploitation du candidat acquéreur ;
- en toute hypothèse, les critères dûment examinés par la cour ne conduisaient nullement à un départage obligatoire des deux candidatures, l'appréciation de leur importance relative étant, en l'espèce, laissée à son appréciation souveraine ;
- s'agissant de la prise en considération de l'exploitation du vendeur, la notion "d'exploitation faisant l'objet de la demande" ne peut concerner exclusivement l'exploitation du demandeur ; au cas présent, " l'exploitation faisant l'objet de la demande " d'autorisation concerne l'ensemble du domaine de la Croix de Gay, d'une superficie d'environ 12 ha, démembré par l'effet de la vente en deux exploitations autonomes, celle de la Croix de Gay, dont 1' autonomie est maintenue et celle des 6 ha proposés à la vente à la société Château l'Evangile ; la notion "d'exploitation objet de la demande " concerne l'exploitation du vendeur, au moment de la demande d'autorisation préalablement à la cession, puisque cette opération permet le maintien de l'autonomie du domaine du Château La Croix de Gay tant pour les 6 ha conservés par les vendeurs que pour les 6 ha acquis par le demandeur ; par voie de conséquence, l'examen de la situation de l'exploitation du vendeur ne peut être absent de la prise en considération des orientations du schéma directeur des structures et le préfet n'a donc commis aucune erreur de droit en justifiant l'octroi d'une autorisation d'exploiter au Château l'Evangile par "l'intérêt du maintien sur l'appellation Pomerol de l'exploitation du vendeur, restructurée pour une autonomie financière et préservant son caractère familial ", conformément aux orientations du schéma directeur départemental ; il y a un intérêt économique et social incontestable au maintien de l'autonomie de l'exploitation du Château la Croix de Gay qui est dans le patrimoine de la famille de Mme G...depuis le XVème siècle ; seule la vente globale des 6 hectares de vignes du Château La Croix de Gay et de l'intégralité du Château Faizeau et du stock pléthorique permettait à Mme G...de restructurer et de conserver le Château dont la cession partielle était envisagée ; en l'espèce, le rachat effectué par le Château l'Evangile a permis le maintien d'une exploitation viticole devenue viable, celle du Château La Croix de Gay, et l'agrandissement d'une seconde exploitation, celle du Château 1'Evangile ; dès lors, c'est à bon droit que le préfet a pu considérer que les deux demandes concurrentes répondaient de manière équivalente aux critères définis par la...

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