CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 31/10/2017, 17BX00008, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme JAYAT
Date31 octobre 2017
Record NumberCETATEXT000036028448
Judgement Number17BX00008
CounselLANOY
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Marennes a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté 30 avril 2010 par lequel le préfet de la Charente-Maritime a prescrit la réalisation d'office de travaux par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) sur le site du Petit Port des Seynes à Marennes ; elle a également demandé au tribunal d'annuler la décision du 11 juin 2010 par laquelle le préfet de la Charente-Maritime a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la compagnie de Saint-Gobain, en sa qualité d'ancien exploitant, de remettre en état le site du Petit Port des Seynes, d'enjoindre à cette compagnie de procéder à la remise en état du site, à défaut, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 780 000 euros au titre des frais de remise en état du site, 4 000 000 euros au titre de la perte de chance de réaliser l'aménagement du site, 2 121 320 euros au titre de la perte vénale du site, 4 000 000 euros au titre des troubles de jouissance, 373 351 euros au titre des frais d'études et d'expertises réalisées sur le site et des frais d'honoraires et de conseils engagés, 3 000 000 euros au titre de l'atteinte à l'image de la commune et la somme de 650 000 euros au titre des surcoûts de dragage, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal et capitalisés.


Par un jugement n° 1001612, 1001779 du 29 novembre 2012, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 13BX00305 du 4 juin 2015, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur requête de la commune de Marennes, a confirmé le jugement du tribunal administratif.

Par une décision n° 392288 du 30 décembre 2016, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par la commune de Marennes, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 4 juin 2015 et a renvoyé l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 29 janvier 2013, le 30 juin 2014 et le 21 février 2017, la commune de Marennes, représentée par MeA..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement n° 1001612, 11001779 du tribunal administratif de Poitiers du 29 novembre 2012 ;

2°) d'annuler les décisions préfectorales du 30 avril 2010 et du 11 juin 2010 ;

3°) d'enjoindre à la compagnie de Saint-Gobain de procéder à la remise en état du site du Petit Port des Seynes sur le fondement des mesures prescrites dans le rapport d'expertise du 30 juin 2009 ;

4°) à défaut, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 780 000 euros au titre des frais de remise en état du site, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ses intérêts ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 4 000 000 euros au titre de la perte de chance de réaliser l'aménagement du site du Petit Port des Seynes, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

6°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 2 121 320 euros au titre de la perte vénale du site du Petit Port des Seynes, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

7°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 000 000 euros au titre des troubles de jouissance, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

8°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 373 351 euros au titre des frais d'études et d'expertises réalisées sur le site et des frais d'honoraires et de conseils engagés depuis 2001, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

9°) de condamner l'Etat lui verser la somme de 3 000 000 euros au titre de l'atteinte à l'image de la commune, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

10°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 650 000 euros au titre des surcoûts de dragage, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts ;

11°) de mettre à la charge du l'Etat la somme de 5 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

12°) d'enjoindre au titre de l'article L. 911-3 du code de justice administrative l'exécution de l'arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir.

Elle soutient, en ce qui concerne la régularité du jugement attaqué, que :
- les premiers juges ne pouvaient rejeter sa requête comme irrecevable en raison de l'absence d'habilitation du maire pour la représenter en justice dès lors que la fin de non-recevoir n'était pas opposée en défense et qu'il incombait en conséquence au tribunal de l'inviter à régulariser sa demande sur ce point ; en effet, le préfet dans ses écritures devant le tribunal avait seulement soutenu que le mandat confié par la commune à son avocat ne couvrait pas l'exercice d'une action contre l'Etat ; pour le reste, le maire est habilité à représenter la commune en justice en vertu de deux délibérations adoptées par le conseil municipal le 2 avril 2008 et le 10 septembre 2008 ;
- les juges de première instance ont entaché leur décision d'un défaut de motivation dès lors qu'ils n'ont pas répondu aux moyens de fond soulevés devant eux ;
Elle soutient, en ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 30 avril 2010, que :
- le préfet de la Charente-Maritime était incompétent pour prendre l'arrêté attaqué, lequel relève de la compétence du maire au titre de la police des déchets en application de l'article L. 541-3 du code de l'environnement ;
- le préfet a entaché son arrêté d'un vice de procédure en ne respectant pas les étapes d'édiction de l'acte prévues aux articles L. 514-1 et L. 514-3 du code de l'environnement ; il ne pouvait en effet recourir à la procédure d'exécution des travaux d'office par l'ADEME sans avoir préalablement adressé à l'ancien exploitant du site, la compagnie Saint-Gobain, un arrêté de travaux, une mise en demeure et une mesure de consignation ;
- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut de motivation ;
- le préfet a méconnu l'article L. 511-1 du code de l'environnement qui lui impose d'exercer ses pouvoirs de police des installations classées pour la protection de l'environnement en édictant les mesures nécessaires à la protection de l'environnement ; en effet, par la décision contestée, le préfet ne prend aucune mesure précise mais se contente de prescrire de nouvelles études sur la pollution du site alors que l'étendue de celle-ci est connue depuis l'expertise judiciaire déposée le 30 juin 2009 ;
- le préfet a méconnu les articles L. 514-1 et L. 512-6-1 du code de l'environnement dès lors qu'en sollicitant l'intervention de l'ADEME, il méconnaît son obligation d'agir à l'encontre du dernier exploitant responsable de la pollution du site et tenu à ce titre de le remettre en état ; cette obligation s'applique alors même que l'activité a cessé antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 21 septembre 1977 qui a imposé aux exploitants de remettre le site en état à la cessation de leur activité ;
- le préfet a commis une erreur de droit en fondant sa décision sur l'article L. 541-3 du code de l'environnement qui est relative à l'exercice de la police des déchets ; en effet, les sites pollués non excavés ne sont pas assimilables à des déchets conformément à l'article L. 514-4-1 du code de l'environnement ; il revenait au préfet de faire usage de ses pouvoirs de police des installations classées pour la protection de l'environnement alors même que, dans ce cas, la réhabilitation du site incombe à l'ancien exploitant et non au propriétaire dudit site ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant de prescrire de nouvelles études au lieu d'agir afin de faire cesser la pollution du site ; il a commis également une telle erreur en ayant eu recours à la procédure d'exécution d'office.

Il soutient, ce qui concerne la légalité de la décision du 11 juin 2010, que :
- cette décision est entachée d'un vice de forme car elle ne comprend ni le nom ni le prénom de son auteur en violation de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- le refus de prescrire la remise en l'état du site méconnaît les dispositions des articles L. 512-6-1 et R. 512-39-1 du code de l'environnement dès lors que plusieurs études menées dès 2001 ont montré l'existence d'une pollution du sol et du sous-sol et qu'il est urgent de faire réaliser les travaux destinés à la supprimer ;
- ce refus méconnaît également les dispositions des articles L. 514-1 et 511-1 du code de l'environnement car il appartient au préfet de mettre en oeuvre des pouvoirs de police des installations classées pour la protection de l'environnement ; or, après la cessation des activités de Saint-Gobain, le préfet n'a jamais organisé de contrôle du site, prescrit des travaux de mise en sécurité et de remise en état ; il a préféré recourir à la procédure d'exécution d'office des travaux par l'ADEME sans prendre préalablement un arrêté de travaux, une mise en demeure et une mesure de consignation ; or cette procédure présente un caractère subsidiaire à la procédure de remise en état d'office d'un site pollué qui est réservée aux sites orphelins dont l'exploitant responsable a disparu ou est insolvable ;
- le préfet ne saurait justifier son inaction à l'encontre de l'ancien exploitant en invoquant la prescription trentenaire qui ne peut être soulevée que par l'ancien exploitant ; et, pour que le délai de la prescription ait été déclenché, il aurait fallu que la compagnie Saint-Gobain notifie à l'administration la cessation de son activité, ce qu'elle a omis de faire ; de plus, cette société a dissimulé l'existence de cette pollution au moment de l'arrêt de son activité ainsi qu'en témoigne le fait que c'est en 2011 seulement que ladite pollution a été identifiée...

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