CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 18/05/2021, 20BX00656, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme JAYAT
Judgement Number20BX00656
Record NumberCETATEXT000043522505
Date18 mai 2021
CounselLACOMBE
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sud Forage, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de la retenue à la source, des pénalités correspondantes et de l'amende prévue à l'article 1788 A § 4 du code général des impôts auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 mai 2013 pour la taxe sur la valeur ajoutée, au titre des années 2010 à 2012 pour l'impôt sur les sociétés, au titre de l'année 2012 pour la retenue à la source et au titre des années 2010 et 2011 pour l'amende, par deux avis de mise en recouvrement du 15 mars 2016.
Par un jugement n° 1802169 du 24 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2020, la société Sud Forage, représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 décembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :
- le débat oral et contradictoire a été méconnu dès lors que la rectification en matière de retenue à la source sur les revenus prétendument distribués n'a jamais été évoquée par le vérificateur au cours ou à l'issue du contrôle ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
- le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent aux exportations n'est pas fondé ; l'absence de production de la déclaration d'exportation visée par l'autorité douanière ne suffit pas à remettre en cause l'exonération de la taxe dès lors que le vérificateur ne conteste ni la réalité ni la consistance de l'opération d'exportation concernée ; l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts porte atteinte au principe de proportionnalité ; des éléments de preuve alternatifs, tels que le document de transport du bien vers un pays hors de l'Union européenne, peuvent apporter la preuve de la réalité de l'exportation hors de l'Union européenne ;
- le rappel de taxe déduite par anticipation sur des prestations de services facturées mais non encore encaissées n'est pas justifié puisqu'avant l'engagement du contrôle, les droits en cause ont été régularisés ;

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
- les billets de train ou d'avion et les frais d'hôtel à l'étranger constituent des dépenses exposées dans l'intérêt de la société puisqu'il s'agit de dépenses de prospection commerciale effectuée par des ressortissants des pays prospectés et ayant pour certains dans le passé procuré à la société d'importants marchés à l'exportation ;
- au titre des années 2010, 2011 et 2012, les frais de repas et autres dépenses diverses ont été exposés dans l'intérêt de la société Sud Forage et le rejet de leur admission en charge n'est pas justifié dès lors que les frais de repas concernent des restaurants proches du lieu d'habitation du gérant qui constitue également le siège social de la société et que le coût des repas était relativement modique ;
- au titre des années 2010, 2011 et 2012, les calculs concernant les frais kilométriques admis en charge sont erronés car, d'une part, l'utilisation personnelle des véhicules de la société n'a pas atteint 20 % mais n'a jamais excédé 1/7 de l'ensemble des déplacements et, d'autre part, une erreur de calcul a été commise ;
- au titre de l'année 2010, concernant la facture de vente de lots hétérogènes de ferrailles émise par son gérant, d'un montant de 133 400 euros, son refus d'admission dans les charges de la société Sud Forage n'est pas justifié dès lors que M. C..., son gérant, exerçait précédemment l'activité de ferrailleur et avait accumulé des stocks consistants de lots de ferrailles dont il a entendu se débarrasser en prévision de la vente du terrain sur lequel ces stocks étaient déposés, et que la commission départementale des impôts avait proposé d'abandonner cette rectification ;
- les achats pour un montant de 17 165 euros pour 2011 ont été engagés dans l'intérêt de la société puisqu'ils concernent des dépenses de travaux d'entretien et d'engazonnage concernant le siège social de la société ;
- l'imposition des avantages qu'elle aurait prétendument consentis à son gérant, M. C..., à la suite de la vérification de comptabilité engagée à son encontre, dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers n'est pas fondée ; les avantages en nature accordés à M. C..., à supposer qu'ils soient établis, ne sont imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers que s'ils ont pour effet de porter sa rémunération à un niveau fiscal excessif, sinon, ils doivent être regardés comme des suppléments de salaires imposés dans la catégorie des traitements et salaires ;
- les factures d'un montant de 4 300 euros et de 16 741,67 euros ne sont pas étrangères à son exploitation ; pour la première, il s'agit de frais inhérents à l'intervention d'un préfet en tant que facilitateur pour l'achat envisagé de l'usine Dorcell et pour la seconde, elle a été victime d'une escroquerie et d'un abus de confiance de la part de la société Sikal Group, son gérant ayant fait l'objet d'une plainte pénale du 10 novembre 2010 auprès du procureur général de la République à Kinshasa ;
- la facture de 601 500 euros établie par la société espagnole Pio y Asociados del Levante n'est pas étrangère à l'exploitation et a été acquittée par virement swift international ; elle a été victime d'une escroquerie et d'un abus de confiance de la part de cette société mais le fait que son gérant ait exposé l'entreprise à des risques élevés même si elle ne relevait pas de son activité habituelle, n'est pas de nature à caractériser un acte anormal de gestion ;
- les rectifications pour un montant de 8 412 euros pour 2010, de 11 334 euros pour 2011 et de 9 187 euros pour 2012 ne sont pas fondées dès lors que l'opération en cause ne constitue pas un acte anormal de gestion ;
- le profit sur le Trésor doit être abandonné dès lors que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas fondés ;

En ce qui concerne la retenue à la source :
- les sommes imposées, en tant que revenus distribués, passibles d'une retenue à la source, ne peuvent être imposées une seconde fois dès lors que ces sommes ont déjà été imposées à l'impôt sur les sociétés dans les comptes de la société espagnole Pio y asociados del Levante, sauf à créer une double imposition ;
- pour regarder les dépenses non déductibles comme des revenus réputés distribués au sens de l'article 109-1 1° du code général des impôts, passibles d'une retenue à la source, les résultats de la société Sud Forage devaient être bénéficiaires, de sorte que la retenue à la source aurait dû être limitée aux sommes effectivement versées et désinvesties au sens de l'article 109-1 1°, soit 173 000 euros au lieu de 601 500 euros ;
- les distributions occultes alléguées par l'administration n'entrent pas dans la catégorie des rémunérations et avantages occultes visés par l'article 111 c du code général des impôts ;

En ce qui concerne les majorations :
- la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée, la preuve de son intention d'éluder l'impôt n'étant pas apportée ;
- les intérêts du Trésor n'ayant pas été lésés, l'amende de 5 % prévue par l'article 1788 A du code général des impôts méconnaît les principes de proportionnalité et de neutralité garantis par le droit de l'Union européenne ;
- la majoration de 10 % pour défaut de versement de la retenue à la source doit être déchargée pour les motifs énoncés à l'encontre du principal.


Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrés le 21 septembre 2020 et le 18 mars 2021, le ministre de l'économie des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
- les moyens tirés de ce que la société n'a pas commis d'acte anormal de gestion s'agissant de la somme de 601 500 euros et de ce que la distribution de cette somme de 601 500 euros en vertu des dispositions de 1'article 109-1-1° du code général des impôts devait être minorée du montant du déficit fiscal constaté à la clôture de l'exercice clos en 2012, à savoir de 126 540 euros, sont inopérant ;
- aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la directive 2006/115/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;
- la convention entre la République française et le Royaume d'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune signée à Madrid le 10 octobre 1995 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... E...,
- et les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Sud Forage, société à responsabilité limitée, exerce une activité dans le domaine des travaux publics, réseaux ferroviaires, négoce de gros matériels de chantier, ferrailles et traverses. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle par proposition de rectification du 13 décembre 2013, l'administration lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010, une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010, et l'amende prévue par l'article 1788 A § 4 du code général des impôts au titre de l'année 2010. Par une...

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