CAA de BORDEAUX, 6ème chambre - formation à 3, 05/02/2018, 16BX02018, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. LARROUMEC
Date05 février 2018
Judgement Number16BX02018
Record NumberCETATEXT000036576025
CounselSELARL DINETY AVOCATS
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de constater que l'installation de pêche implantée par la société Château Lilian Ladouys en sortie du canal de Reyson dit l'Estey d'Un, au droit du lieu-dit Mapon sur la commune de Saint-Estèphe, établie par procès-verbal du 23 juin 2011, constituait une contravention de grande voirie, de condamner cette société au paiement de l'amende prévue à l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques ainsi qu'à la démolition de cette installation et à la remise en l'état des lieux et d'autoriser le grand port maritime de Bordeaux à procéder, aux frais et risques de cette société, à cette démolition et cette remise en l'état à défaut d'exécution sous huit jours à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 1201027 du 31 décembre 2013, le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux a condamné cette société à une amende de 150 euros, lui a ordonné de démonter cette installation et de remettre les lieux en l'état dans un délai de trois mois suivant la notification de son jugement et a autorisé le grand port maritime de Bordeaux à y procéder d'office aux frais, risques et périls du contrevenant passé ce délai.

Par un arrêt n°s 14BX00648, 14BX00706 du 9 juillet 2014, la cour administrative d'appel de Bordeaux, a, d'une part, après avoir annulé ce jugement, fait droit à la demande du préfet par un dispositif identique et, d'autre part, prononcé un non-lieu à statuer sur la requête de la société Lilian Ladouys tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement.

Par une décision n° 384380 du 15 juin 2016, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt du 9 juillet 2014 de la cour administrative d'appel de Bordeaux et lui a renvoyé l'affaire.

Procédures devant la cour :

I) Par une requête et des mémoires, enregistrés le 28 février 2014, le 5 juin 2014 et le 2 septembre 2016 le n° 16BX02018, la société Château Lilian Ladouys, dont le siège est Château Lilian Ladouys à Saint Estèphe (33180), représentée par la SelarlA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201027 du 31 décembre 2013 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Bordeaux l'a condamnée à payer une amende de 150 euros, à démonter son installation de pêche et à remettre les lieux en l'état dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement, le Grand port maritime de Bordeaux étant autorisé, à défaut d'exécution dans ledit délai, à faire procéder à la réalisation de ces travaux aux frais et risques du contrevenant ;

2°) de rejeter la demande du préfet de la Gironde présentée devant el tribunal administratif de Bordeaux ;

3°) de prononcer la relaxe des fins de la poursuite engagée à son encontre à la suite du procès-verbal de contravention de grande voirie du 23 juin 2011 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761 1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le mémoire présenté par le Grand Port Maritime de Bordeaux (GPMB) et ses conclusions sont irrecevables ; il s'agit d'une intervention volontaire ; le GPMB ne fait état d'aucun intérêt distinct de celui du préfet ni aucun droit auquel il est susceptible d'être porté préjudice ; en tout état de cause, ses demandes de condamnation ne peuvent émaner d'un intervenant qui n'a pas la qualité de partie à l'instance et de ce fait, il ne peut formuler des demandes distinctes de celles du préfet ;
- le jugement attaqué est entaché d'omissions à statuer dans la mesure où il ne répond pas au moyen tiré de ce que le GPMB lui aurait délivré une autorisation d'occupation du domaine public revêtue d'un caractère exprès et à celui tiré du manque d'impartialité de l'agent signataire du procès-verbal du 23 juin 2011 ;
- ce jugement est également insuffisamment motivé et comporte des contradictions dans ses motifs ; il a repris l'argumentation du préfet selon laquelle cette cabane de pêche constituerait un obstacle à la navigation, alors même qu'elle n'est fondée sur aucune pièce du dossier et que le tribunal, qui s'est abstenu de mettre en oeuvre ses pouvoirs d'instruction alors qu'il lui était demandé d'ordonner la production des observations du syndicat intercommunal hydraulique des bassins versants du Médoc au GPMB, est d'ailleurs allé au-delà de cette allégation en précisant que cette cabane constituait " notamment " un obstacle à l'entretien du chenal, alors qu'aucun autre obstacle à la navigation n'était allégué ; en relevant que la société avait pu être induite en erreur par les assurances données par les services du GPMB quant au caractère approprié de l'emplacement du carrelet, le tribunal a également entaché son jugement d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, elle disposait bien d'une autorisation expresse d'occupation du domaine public fluvial ; une telle autorisation peut être orale ; le principe de l'occupation était acquis depuis la réunion du 11 décembre 2009 au cours de laquelle avait seulement été discuté l'emplacement de l'installation projetée ; l'autorisation de travaux accordée par les courriels des 10 juin et 22 juillet 2010 révélait l'existence d'une autorisation d'occupation du domaine public ; dans son mémoire enregistré le 8 février 2013, le préfet a d'ailleurs admis l'existence de cette autorisation ;
- cette autorisation doit être regardée, compte tenu des termes employés par les courriers des 11 juillet 2011 et 1er février 2012, comme ayant été retirée au motif que l'emplacement était différent de celui initialement autorisé ; ce retrait est intervenu en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; il n'est pas justifié dans la mesure où l'emplacement de son carrelet n'est pas différent de celui prévu dans la demande ; le plan qu'elle avait adressé au GPMB n'indiquait pas l'emplacement exact de cette construction mais simplement la parcelle A 376 sur laquelle elle devait être installée ; le plan annexé à sa demande a été falsifié par l'administration ; le choix de l'emplacement à l'origine du retrait de l'autorisation est directement et exclusivement le fait de GPMB ; en outre, il n'est pas établi que cet emplacement constituerait un obstacle aux opérations d'entretien du chenal ; d'ailleurs, les photographies annexées au procès-verbal du 23 juin 2011 montrent l'existence de carrelets sur l'autre rive, lesquels ne semblent pas poser de difficulté pour son entretien ;
- subsidiairement, le GPMB a commis des fautes, notamment en déterminant l'emplacement du carrelet, ainsi que l'a reconnu le tribunal administratif ; c'est l'information erronée quant à l'emplacement qui a conduit le GPMB à considérer qu'elle n'avait pas respecté l'emplacement sollicité et à lui retirer l'autorisation d'occupation délivrée ; elle n'a en revanche commis aucune faute en exécutant une autorisation de construire accordée par le GPMB dans deux courriels des 10 juin et 22 juillet 2010 ; la faute du GPMB est à l'origine du dommage ; une erreur ou une négligence de l'administration peut constituer une faute lourde assimilable par sa gravité à un cas de force majeure ; en l'espèce, l'erreur commise par le GPMB dans la détermination de l'emplacement du carrelet est constitutive d'une faute lourde ; cette faute lourde est à l'origine exclusive du dommage ;
- contrairement aux exigences de l'article L. 774-2 du code de justice administrative, le procès-verbal du 23 juin 2011 ne lui a pas été adressé dans le délai de huit jours, mais seulement le 7 mars 2012, alors qu'il a été transmis rapidement au GPMB ainsi qu'en atteste le fait qu'il a été mentionné dans son courrier du 11 juillet 2011 ;
- la notification de ce procès-verbal a été réalisée par le chef du pôle juridique et contentieux qui ne disposait pas d'une délégation pour y procéder ;
- l'agent ayant dressé le procès-verbal n'était pas impartial, ainsi qu'en témoigne le fait qu'il n'ait pas rappelé les échanges oraux et écrits des mois de juillet et septembre 2010 ; il n'a pas dressé un procès-verbal complet dans la mesure où celui-ci ne comporte aucun élément expliquant en quoi ce carrelet constituerait un obstacle à la navigation ; l'agent ayant dressé ce procès-verbal a en outre commis une erreur portant sur le lieu d'implantation de l'installation de pêche ; c'est bien ce défaut de compétence qui est à l'origine de l'erreur d'emplacement sur le domaine public.


Par deux mémoires, enregistrés le 22 mai 2014 et le 30 août 2016, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie puis le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, concluent au rejet de la requête.

Il fait valoir que :
- le jugement n'est pas entaché d'irrégularité :
- le jugement n'est entaché d'aucune omission à statuer ; le tribunal a pris en compte le moyen tiré de ce que la société aurait été titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire orale ; la société...

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