CAA de LYON, 2ème chambre - formation à 3, 21/05/2019, 18LY04149, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. BOURRACHOT
Judgement Number18LY04149
Date21 mai 2019
Record NumberCETATEXT000038493350
CounselSELARL GENESIS AVOCATS
CourtCour administrative d'appel de Lyon (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, d'une part, la fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique et l'union régionale des fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique de Rhône-Alpes, d'autre part, ainsi que l'association " Pour les Chambaran sans Center Parcs " ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2014 par lequel le préfet de l'Isère a accordé à la SNC Roybon Cottages une autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement.

Par un jugement nos 1406678, 1406933, 1501820 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.

Par un arrêt nos 15LY03104, 15LY03144 du 16 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé contre ce jugement par la SNC Roybon Cottages.

Par une décision n° 408175 du 21 novembre 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi de la SNC Roybon Cottages, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon et lui a renvoyé l'affaire pour qu'elle y statue de nouveau.

Procédure devant la cour
I. Par une requête enregistrée le 16 septembre 2015, initialement sous le n° 15LY03104, et des mémoires enregistrés le 19 février 2016, le 11 mars 2016, le 8 novembre 2016, le 6 décembre 2016, le 7 décembre 2016 et le 15 décembre 2016, la SNC Roybon Cottages, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 juillet 2015 et de rétablir l'autorisation " loi sur l'eau " délivrée par le préfet de l'Isère ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par l'union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, d'une part, la fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique et l'union régionale des fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique de Rhône-Alpes, d'autre part, ainsi que l'association " Pour les Chambaran sans Center Parcs " ;

3°) à titre subsidiaire, de modifier l'arrêté du 3 octobre 2014 du préfet de l'Isère si la cour devait estimer que sa compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée est conditionnée par la prescription de mesures compensatoires ;

4°) de mettre à la charge de l'union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, de la fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique, de l'association régionale de pêche et de protection du milieu aquatique de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et l'association " Pour les Chambaran sans Center Parcs ", une somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SNC Roybon Cottages soutient que :

- la surface impactée par le projet, répondant à la définition d'une zone humide, est de 6,3 hectares et non 76 hectares comme retenu à tort par le tribunal administratif ; en effet, les critères pédologique et floristiques sont cumulatifs pour qualifier une zone d'humide ;
- la compatibilité du projet avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Rhône-Méditerranée doit être appréciée dans le cadre d'une analyse globale, le rapport de compatibilité se distinguant du rapport de conformité ; la contrariété de l'autorisation " loi sur l'eau " avec une seule orientation du SDAGE ne peut conduire à son annulation ;
- l'autorisation " loi sur l'eau " litigieuse est globalement compatible avec le SDAGE RM 2016-2021 à l'échelle du territoire couvert ; elle l'est même avec la disposition 6B-04, compte tenu des mesures compensatoires prévues, qui vont au-delà des exigences fixées par cette disposition ; à titre très subsidiaire, la cour pourrait prescrire des mesures compensatoires supplémentaires dans le massif des Chambaran ; les mesures de compensation visent des fonctions équivalentes à celles impactées ;
- les autres moyens qui étaient soulevés en première instance ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 1er décembre 2015, le 18 février 2016, le 11 mars 2016, le 1er avril 2016, le 21 septembre 2016, le 8 décembre 2016 et le 4 mars 2019, l'Union régionale des Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (UR FRAPNA), représentée par Me F..., conclut dans le dernier état de ses écritures au rejet de la requête, à ce que la commission européenne soit placée en observatrice au litige, à toutes fins utile à ce qu'une question préjudicielle soit posée à la Cour de justice de l'Union européenne et à ce que la
somme de 4 500 euros soit mise à la charge de la SNC Roybon Cottages au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :

- la requête n'est pas recevable, dès lors que la SNC Roybon Cottages n'a pas produit le jugement dont elle relève appel dans son mémoire du 26 décembre 2018 ; son moyen tiré de l'erreur de qualification des zones humides est irrecevable car nouveau ; en tout état de cause, une telle remise en cause de la définition des zones humides telle qu'elle résulte du dossier d'autorisation et de l'arrêté préfectoral, que la SNC Roybon Cottages a elle-même approuvée, n'est pas possible, a fortiori sans nouvelle enquête publique ; en tout état de cause, les zones humides ont été correctement définies et il convient de revenir sur la jurisprudence du Conseil d'Etat qui retient une définition plus stricte ;
- l'approche globale du contrôle de compatibilité avec le SDAGE est incompatible avec les exigences de la directive cadre " Loi sur l'eau " ; une telle approche, qui peut être admise pour la confrontation entre un document réglementaire et un schéma d'urbanisme, ne doit pas être appliquée s'agissant de la confrontation d'une autorisation individuelle avec un tel schéma et il convient de revenir sur la position adoptée par le Conseil d'Etat dans la décision annulant l'arrêt de la cour administrative d'appel ;
- la SNC Roybon Cottages ne peut apporter de pièces tendant à établir la compatibilité globale de son projet avec le SDAGE postérieurement à la constitution du dossier d'autorisation à peine de méconnaitre les principes constitutionnels d'information et de participation du public, aucune analyse globale de compatibilité avec les orientations du SDAGE n'ayant été soumise à l'enquête publique ; ce point n'a pas non plus été débattu en première instance, privant les parties du premier degré de juridiction et, par suite, d'un droit au procès équitable ;
- les mesures compensatoires à la destruction et à l'altération de zones humides sont insuffisantes pour que l'arrêté litigieux soit regardé comme compatible avec les dispositions du SDAGE Rhône-Méditerranée et les premiers juges ont examiné et pris en compte l'ensemble des orientations et objectifs liés au SDAGE ; s'il est tenu compte par exemple des dispositions du SDAGE 2016-2021 reliées aux changements climatiques, l'autorisation du 3 octobre 2014 n'est pas compatible avec les dispositions afférentes ;
- le vice retenu par les juges de première instance étant substantiel et la SNC Roybon Cottages, n'ayant proposé aucun site de compensation situé à proximité de l'emprise du projet, le tribunal n'était pas à même de déterminer des mesures compensatoires supplémentaires ;
- eu égard à son coût supérieur à 300 millions d'euros, le projet devait être soumis à la commission nationale du débat public, en vertu du I de l'article L. 121-8 et de l'article R. 121-2 du code de l'environnement ;
- l'enquête publique a été organisée sur un territoire trop restreint eu égard aux impacts hydrauliques du projet, en méconnaissance de l'article R. 214-8 du code de l'environnement ;
- les études et inventaires complémentaires réalisés après l'enquête publique auraient dû conduire à organiser une nouvelle enquête, le dossier ne pouvant être considéré comme complet et régulier au regard de l'article R. 214-8 du code de l'environnement ;
- en méconnaissance du II de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, ni l'étude d'impact liée à la demande de permis de construire et jointe en annexe 18 au dossier de demande d'autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, ni le document d'incidences de ce dossier n'abordent les effets cumulés des autorisations de défrichement, de construire, de destruction par dérogation d'espèces protégées et au titre de la loi sur l'eau ;
- le document d'incidences prévu au 4° du II de l'article R. 214-6 du code de l'environnement est insuffisant en ce qui concerne l'examen de l'état initial, l'examen de la compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, les mesures de compensation de destruction des zones humides et l'examen de solutions alternatives ;
- les prescriptions de l'arrêté sont insuffisantes au regard des articles R. 214-15 et R. 214-16 du code de l'environnement en ce qui concerne les conditions de destruction des 76 hectares de zones humides et les zones de compensation à envisager ;
- le préfet de l'Isère aurait dû exiger la production d'une demande d'autorisation liée aux plans d'eau dont la surface cumulée de 3 hectares 9 ares et 52 centiares est supérieure au seuil de 3 hectares du régime d'autorisation ;
- le projet ne pouvait être autorisé sans mise en oeuvre de la procédure dérogatoire prévue au VI de l'article L. 212-1 du code de l'environnement, qui transpose les dispositions du paragraphe 7 de l'article 4 de la directive n° 2000/60/CE du 23 octobre 2000, et à l'article R. 212-16 du même code, dès lors que la réalisation du projet est susceptible de générer d'importants impacts défavorables sur plusieurs des paramètres composant l'élément de qualité " paramètres généraux " des " paramètres chimiques et physico-chimiques soutenant les paramètres biologiques " de la masse d'eau de...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT