CAA de LYON, 2ème chambre - formation à 3, 11/04/2017, 15LY02869, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. BOURRACHOT
Judgement Number15LY02869
Record NumberCETATEXT000034428410
Date11 avril 2017
CounselBESCOU
CourtCour administrative d'appel de Lyon (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. H...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 8 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière, a fixé le pays de destination et a décidé son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1506120, en date du 13 juillet 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a partiellement fait droit à sa demande en annulant les décisions attaquées et en rejetant le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 août 2015, le préfet du Rhône demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 juillet 2015.

Le préfet du Rhône soutient que :

- la décision attaquée était suffisamment motivée ;
- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 novembre 2015, M. H...A...conclut :
1°) au rejet de la requête ;

2°) à la mise à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

3°) à la condamnation de l'Etat aux entiers frais et dépens de l'instance.

Il soutient que :

- la requête d'appel du préfet du Rhône est irrecevable en raison de sa tardiveté ;
- le préfet ne critique pas utilement le jugement attaqué en se bornant à soutenir qu'il a entendu faire application des premier et second alinéas de l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de manière cumulative, en l'absence de mention explicite ;
- dans l'hypothèse où la cour estimerait nécessaire d'évoquer l'affaire : la décision contestée est entachée d'un défaut de base légale en ce qu'elle apparaît fondée sur un refus d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile ; le refus d'admission provisoire au séjour, au motif qu'il constituait une menace grave pour l'ordre public est nécessairement le fondement de la mesure d'éloignement litigieuse dès lors que les dispositions de l'article L. 741-4 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont visées ; sans un refus d'admission provisoire au séjour le préfet ne pouvait ordonner sa reconduite à la frontière sans méconnaître la convention de Genève de 1951 relative au droit d'asile primant sur les dispositions de l'article L. 531-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- Sur la légalité de la décision de reconduite à la frontière :
- l'auteur de la décision est incompétent ;
- cette décision est entachée d'un défaut de base légale, en ce qu'elle apparaît fondée sur un refus d'autorisation provisoire de séjour qui est illégal en ce que :
- le refus d'admission provisoire au séjour est entaché d'un vice de procédure en ce qu'il n'a pas été précédé de la consultation des autorités allemandes, en application de l'article 25 de la convention d'application des accords de Schengen ;
- pour refuser son admission provisoire au séjour en sa qualité de demandeur d'asile le préfet s'est fondé sur un signalement formulé par les autorités allemandes à partir de leur seule liste nationale, le N-SIS allemand, ce qui n'est pas possible selon l'article 92.2 ;
- cette décision est entachée d'un vice de procédure en ce que le préfet a consulté de manière irrégulière le fichier SIS, l'identité de la personne ayant procédé à la consultation du fichier SIS n'étant pas précisée ce qui ne permet pas de vérifier sa compétence en application de l'article 5 du décret n° 95-577 relatif au système informatique national du système d'information Schengen dénommé N-SIS ;
- le préfet a commis une erreur de fait en invoquant des faits qu'il lui appartient de justifier en produisant la fiche Schengen et qui ne sont nullement démontrés et n'ont pas été diffusés par les autorités allemandes ;
- le préfet a commis une erreur de droit en se fondant sur des éléments d'information tirés d'évènements survenus dans un autre Etat, sans caractériser la menace à l'ordre public pouvant exister sur le territoire français ; un signalement au fin de non-admission ne peut fonder un refus d'admission provisoire au séjour opposé au demandeur d'asile ; l'article 25 de la convention d'application des accords de Schengen réserve le cas du nécessaire respect des obligations internationales et constitutionnelles à l'instar du droit d'asile et de la convention de Genève de 1951 ;
- le préfet a commis une erreur de droit en motivant l'existence d'une menace grave pour l'ordre public en raison de l'entrée de M. A...sur le territoire français malgré une mesure d'éloignement prise par les autorités allemandes ;
- le refus d'admission provisoire au séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a commis une erreur de fait en décidant sa reconduite à la frontière en se fondant sur des éléments tirés du fichier SIS, la copie de la fiche de signalement ne lui ayant pas été remise ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 531-3 et R. 531-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne se trouve pas dans l'hypothèse visée au 1° de l'article R. 531-5, ni dans celle du 2° :
- pour les mêmes motifs que ceux évoqués précédemment à l'encontre du refus d'admission provisoire au séjour, la mesure d'éloignement est entachée de deux erreurs de droit tenant à ce que la menace à l'ordre public n'est pas caractérisée et ne peut découler du fait qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement prise par les autorités allemandes, alors que cette mesure ne comportait pas d'interdiction d'entrée ou de séjour ;
- la reconduite à la frontière est entachée des mêmes vices de procédure que le refus d'admission provisoire au séjour ;
- la reconduite est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de son intention de déposer une demande d'asile, dès lors qu'il ne constitue pas une menace grave pour l'ordre public au sens de la directive 2004/38/CE qui suppose une menace actuelle et réelle et suffisamment grave affectant un intérêt fondamental de la société et ne découle pas de la seule existence d'une condamnation pénale, s'agissant d'évènements qui n'ont pas été diffusés par les autorités allemandes ;

Sur la décision fixant le pays de destination :
- l'auteur de la décision est incompétent ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- le préfet a commis une erreur de droit, alors qu'il n'a pas été statué sur sa demande d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard au fait qu'il a fui l'Albanie en raison des risques qu'il encoure pour sa vie ;

Sur la décision ordonnant son placement en rétention administrative :
- l'auteur de l'acte est incompétent ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen préalable réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- le préfet n'a pas apprécié l'opportunité d'une assignation à résidence sur le fondement de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- en se fondant sur les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur de droit ;
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'un défaut de base légale en raison de l'absence d'octroi d'un délai de départ volontaire ;
- le préfet a commis une erreur de droit en faisant état d'une insuffisance de garanties de représentation, ce qui atteste d'une insuffisance de motivation et une absence d'examen préalable, sérieux et réel de sa situation personnelle ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'il justifie être dans l'impossibilité de quitter la France, qu'il n'a jamais fui, que, l'existence de garanties de représentation n'est pas une condition pour une assignation à résidence, qu'il revenait au préfet d'assurer son hébergement et sa prise en charge matérielle en sa qualité de demandeur d'asile.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951 et le protocole de New York du 31 janvier 1967 ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (CE) nº 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n°...

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