CAA de LYON, 2ème chambre - formation à 3, 14/06/2016, 14LY02141, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. BOURRACHOT
Judgement Number14LY02141
Date14 juin 2016
Record NumberCETATEXT000032771598
CounselCIAUDO
CourtCour administrative d'appel de Lyon (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI Carre Bertholet a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 19 avril 2006 au 31 janvier 2009 par avis de mise en recouvrement du 14 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n°1103943 du 13 juin 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 juillet 2014, la SCI Carre Bertholet, représentée par Me A... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 13 juin 2014 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées restant à sa charge et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition litigieuse :
- s'agissant d'une vente en l'état futur d'achèvement, le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée n'est intervenu qu'en 2008 lors de la livraison, dès lors que l'acte passé au moment de l'acquisition du terrain ne comportait qu'une promesse de dation en paiement et stipulait que cette dation serait constatée par un acte ultérieur constatant la livraison des locaux ;
- la taxe sur la valeur ajoutée ayant été effectivement réglée au 31 décembre 2008, le redressement devait être compensé avec le paiement déjà intervenu ; l'administration était tenue, sur le fondement de la loi et sur celui de la doctrine, de procéder à une compensation entre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux et la taxe qu'elle a acquittée ;
- en l'absence de démonstration de fraude ou d'évasion fiscale, l'administration n'était pas fondée à substituer la valeur vénale au prix convenu entre les parties ;

En ce qui concerne les pénalités :
- l'absence de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée sur la dation en paiement n'est pas constitutive d'un manquement délibéré dès lors que la déclaration de cette taxe, en décembre 2008, résultait d'un problème d'organisation comptable ;
- en l'absence de relation d'intérêts, la seule insuffisance de prix ne permettait pas de caractériser un manquement délibéré ; l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe quelle aurait commis un manquement délibéré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

Sur le fait générateur et l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée de la vente en l'état futur d'achèvement :
- à titre principal, le fait générateur rendant la taxe sur la valeur ajoutée exigible est constitué par l'acte qui constate l'opération, c'est-à-dire par l'acte initial de vente du terrain à bâtir et non par la livraison des locaux ; en l'espèce c'est la date du 29 mai 2006 qu'il convient de retenir, date de l'acte initial de vente du terrain à bâtir et de l'acte de vente en VEFA des appartements garages et parkings à bâtir sur ce terrain et à livrer au vendeur du terrain, lequel constitue un acte de cession des locaux et non de promesse de dation ; si la livraison des locaux a eu lieu le 10 août 2008 la SCI n'a pas déclaré à ce moment, ni à aucune autre date au cours de la période vérifiée la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur cette vente ; or la taxe sur la valeur ajoutée aurait dû être déclarée sur la déclaration CA3 de mai 2006 ; dans ces conditions la SCI ne peut soutenir que la taxe sur la valeur ajoutée était due lors de la livraison par remise des clefs et prise de possession des biens par l'acquéreur, livraison qui au demeurant serait intervenue au mois de mars 2008 alors que les documents intitulés " prise de possession " sur lesquels elle s'appuie ne sont pas datés et qu'elle indique dans ses écritures que le mois de décembre 2008 se situe dans le trimestre de livraison ;
- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour considérerait que la taxe était due au titre du mois de mars 2008, l'administration invoque le droit de compensation qu'elle tient de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales dès lors que la SCI a fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement couvrant la période du 1er avril 2006 au 1er janvier 2009 ;

Sur la minoration du prix de vente :
- dans la mesure où le prix de vente des biens en l'état futur d'achèvement à M. B... s'écartait sensiblement des prix de vente des biens similaires vendus dans l'ensemble immobilier à construire dénommé Carré Bertholet, le service a déterminé la valeur vénale des biens vendus à M. B... ; cette estimation a été revue à la baisse par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui a évalué la valeur vénale des biens cédés à 1 150 000 euros, soit une insuffisance de taxe sur la valeur ajoutée de 77 908 euros pour une insuffisance de base taxable de 250 000 euros ; les parties étaient en relations d'intérêt dès lors que chacune était liée par la cession que l'autre était prête à lui consentir ; dans ces conditions, la volonté d'évasion fiscale est présumée du seul fait de l'insuffisance significative du prix ; en tant que professionnel de l'immobilier la SCI n'ignorait pas que le prix de vente à M . B... des immeubles en VEFA ne correspondait pas aux prix du marché, ainsi que cela ressort de l'analyse des éléments chiffrés communiqués par celle-ci à sa banque lors de l'ouverture de crédit du 23 mai 2006, quelques jours avant la signature de l'acte de vente à MB..., la SCI ayant d'ores et déjà prévu de revendre à cette date les bâtiment B et C à des prix respectivement de 54 % et 60 % plus élevé que le prix consenti à M.B... ; la SCI n'ignorait pas non plus que le prix de vente par tantième à M. B... se situait largement en dessous du prix de revient prévisionnel de l'opération ; la taxe sur la valeur ajoutée insuffisamment collectée par le vendeur ne pouvait être déduite par l'acquéreur, personne physique non assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; le préjudice pour l'administration fiscale résultant de la minoration du prix de cession en l'état futur d'achèvement qui correspondait à l'acquisition du terrain à bâtir, assimilable à de l'évasion fiscale, ne s'est pas limité à la taxe sur la valeur ajoutée, mais s'est également traduit par une minoration de l'impôt sur les plus-values dû par l'acquéreur, dès lors que l'acquisition du terrain était ancienne (1996) ; alors que l'importance de l'insuffisance de prix a été reconnue par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, et a été établie par l'administration fiscale, et que l'évasion fiscale est caractérisée par la volonté délibérée des parties qui étaient en relations d'intérêt, l'administration pouvait, en application des articles 27 de la 6ème directive et 266-2 b du code général des impôts substituer la valeur vénale des immeubles aux prix déclarés pour l'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée ;



Sur la demande de compensation :
- Si la SCI Carre Berthollet soutient que la taxe sur la valeur ajoutée due à hauteur de 147 492 euros aurait dû être compensée par le trop réglé de 67 919 euros dû à une erreur de taux, toutefois une compensation ne peut être opérée avec les surtaxes éventuellement reconnues au cours de la même vérification que dans les cas où elles concernent des opérations imposables réalisées au cours d'une même année ou d'un même exercice commercial ; en conséquence, aucune compensation n'était possible entre une insuffisance se rapportant à une période du 19 avril au 31 décembre 2006 et des surtaxes constatées sur des périodes postérieures ; il appartenait à la société de présenter, le cas échéant, une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée ; la possibilité en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée de compenser globalement les droits formant surtaxe et ceux résultant d'omissions ou d'insuffisances d'imposition pour l'ensemble de la période litigieuse et non année par année, évoquée par la SCI, concerne la compensation prévue en matière contentieuse par les articles L. 203 à L. 205 du livre des procédures fiscales et non celle possible au stade de la procédure de redressement ; en l'espèce, la société ne peut demander le bénéfice de la compensation prévue par les dispositions de l'article L. 205 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle ne remplit pas les conditions ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :
En ce qui concerne leur motivation :
- la proposition de rectification est suffisamment motivée et précise les éléments qui démontrent le caractère délibéré du manquement sans même faire référence à l'importance du rappel ;

En ce qui concerne la pénalité pour défaut de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée relative à la vente en l'état futur d'achèvement du 29 mai 2006 :
- la SCI n'est pas fondée à invoquer l'incompétence de son comptable pour se dédouaner de sa mauvaise foi ; la majoration pour manquement délibéré sanctionne l'omission de déclaration qui s'est prolongée pendant plus de deux ans après l'exigibilité de la taxe qui pour une VEFA ne déroge pas aux règles de droit commun d'exigibilité de la taxe ; même si elle considérait que la taxe sur la valeur ajoutée n'était devenue exigible qu'au moment de la livraison, dont la date varie entre le 10 août 2008 selon le procès verbal d'état des lieux et le 31 octobre 2008, date de la comptabilisation de l'opération, elle n'a toutefois pas déclarée la taxe sur VEFA sur la période vérifiée ; la SCI n'ignorait pas l'insuffisance de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée collectée et ne peut invoquer l'absence de compétence du cabinet comptable de sa maison mère alors qu'elle a bien déclaré la taxe des autres ventes en l'état futur d'achèvement...

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