CAA de LYON, 6ème chambre - formation à 3, 14/12/2018, 15LY03732, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. POMMIER
Record NumberCETATEXT000037995647
Date14 décembre 2018
Judgement Number15LY03732
CounselBDL AVOCATS - ME BARIOZ ET ME PHILIP DE LABORIE
CourtCour administrative d'appel de Lyon (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure
M. D... B..., représenté par Me H..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble le 15 juin 2015, dans le dernier état de ses écritures :

- à titre principal, de condamner le centre hospitalier de Chambéry à lui verser une somme de 2 751 921 euros en réparation du préjudice que lui a causé l'intervention du 16 juin 2010 et les suites de celle-ci ;
- à titre subsidiaire, de mettre cette même somme à la charge de l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ;
- de mettre à la charge du centre hospitalier de Chambéry ou de l'ONIAM une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie a demandé au tribunal administratif de Grenoble dans le dernier état de ses écritures le 7 juillet 2015 :
- le remboursement de ses prestations pour un montant de 768 064 euros ;
- le versement d'une somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Par un jugement n° 1302713 du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement fait droit aux demandes de M. B... et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie en condamnant le centre hospitalier de Chambéry à leur verser respectivement la somme de 771 218 euros dont devra être déduite la provision de 63 000 euros accordée par le juge judiciaire et la somme de 229 893 euros dont l'indemnité forfaitaire de gestion d'un montant de 1 037 euros. Il a aussi mis à la charge dudit centre hospitalier une somme de 2 000 euros à verser à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le tribunal administratif de Grenoble a également condamné l'ONIAM à verser une somme de 450 985 euros à M.B.... Il a rejeté le surplus des conclusions.

Ce jugement a été rectifié par une ordonnance du 28 octobre 2015 portant la somme due par le centre hospitalier de Chambéry à M. B... à 781 218 euros.
Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2015, l'ONIAM, représenté par la société UGGC avocats, conclut à la réformation du jugement du 29 septembre 2015, rectifié par une ordonnance du 28 octobre 2015, en tant qu'il a mis une indemnité à sa charge et conclut à l'entière responsabilité du centre hospitalier de Chambéry dans le cadre de la prise en charge médicale de M.B.... Il conclut à titre subsidiaire à la production par M. B...de toutes pièces sur les indemnités perçues suite à son accident de motocyclette aux fins de déduction des sommes mises à la charge de l'ONIAM.

Il soutient que :
- le jugement est irrégulier car insuffisamment motivé, les premiers juges n'ayant pas répondu à la question de la faute technique imputée au chirurgien du centre hospitalier ; il existe une faute initiale de l'hôpital exclusive de toute indemnisation par la solidarité nationale ; le chirurgien a commis une faute technique dans la réalisation du geste chirurgical, la localisation du clip (ligature) puis la section du pédicule costal ne respectant pas les bonnes pratiques médicales selon l'expert ainsi que selon le médecin consulté par M.B... ;
- l'indemnisation par la solidarité nationale est limitée à certains cas de figure mentionnés à l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; il appartient à la juridiction de vérifier si la responsabilité du centre hospitalier est engagée pour faute ; l'ONIAM n'est pas dans une situation de co-responsable ; il faut distinguer l'hypothèse de la faute de l'établissement hospitalier précédant l'aléa médical de la seconde hypothèse relative à l'aléa médical suivi d'une faute de l'établissement hospitalier dans le cadre de la prise en charge de la complication médicale ; dans le cadre d'un défaut d'information de la part de l'hôpital, la victime peut demander à être indemnisée de manière complémentaire par la solidarité nationale de manière à compenser l'intégralité de son dommage corporel ; pour être indemnisé dans le cadre de la solidarité nationale, les conséquences doivent être anormales et présenter un certain degré de gravité ;
- la prise en charge post-opératoire a été défaillante car ce n'est que 6 heures après l'intervention qu'un avis neuro-chirurgical a été sollicité et ce n'est que le 19 juin qu'une intervention a été proposée ; l'expert a mentionné le non-respect des règles de l'art dans le cadre d'une telle reprise non immédiate ; les premiers juges ont retenu pour une telle défaillance une perte de chance de 50 % ;
- à titre subsidiaire, les conséquences ne sont pas anormales ;
- à titre subsidiaire, en qui concerne l'indemnisation, M. B...devra fournir toutes pièces relatives aux indemnités perçues pour éviter une double indemnisation ;

Par un mémoire enregistré le 22 janvier 2016, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ardèche venant aux droits de la CPAM de la Savoie, représentée par MeG..., demande à la cour de réformer le jugement en condamnant le centre hospitalier de Chambéry à lui verser une somme de 768 064,69 euros au titre des prestations servies à M. B...ainsi qu'une somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :
- le rapport d'expertise retient que la localisation du clip démontre un non-respect des bonnes pratiques pour la ligature et la section du pédicule costal ; ceci établit un manquement fautif imputable au chirurgien et induit la pleine et entière responsabilité du centre hospitalier de Chambéry ;
- l'expert a également retenu une faute du centre hospitalier de Chambéry dans la prise en charge post-opératoire, la reprise chirurgicale sous forme d'une chirurgie décompressive de sauvetage n'ayant pas été réalisée immédiatement ;
- ces deux fautes ont concouru à l'entier dommage de M. B...et induisent une réparation intégrale de son préjudice ;
- elle dispose d'un recours de nature subrogatoire pour obtenir le remboursement des prestations servies à M. B...en lien avec ces fautes ; les prestations s'élèvent à 768 064,69 euros dont la pension d'invalidité (arrérages échus et capital invalidité) ;
- elle a droit à l'indemnité forfaitaire de gestion soit 1 037 euros ;

Par un mémoire enregistré le 16 juin 2017, le centre hospitalier de Chambéry, représenté par MeF..., conclut au rejet de la requête de l'ONIAM et du recours incident de la caisse primaire d'assurance maladie et formule des conclusions en appel incident aux fins de réduction des sommes allouées en première instance à M. B... et à la caisse primaire d'assurance maladie.

Il soutient que :
- s'il a commis des fautes dans la prise en charge de M.B..., celles-ci ne sont pas toutes en lien direct et certain de causalité avec le préjudice de ce dernier ; la localisation du clip et la section du pédicule costal, si elles n'ont pas respecté les règles de l'art, n'ont pas eu de conséquence pour le patient, la preuve du lien de causalité entre cette prétendue faute technique et la paraplégie n'étant pas rapportée ; il y a lieu de confirmer le jugement du tribunal administratif de Grenoble qui n'a pas retenu de responsabilité en lien avec cette faute ; dans l'hypothèse où la responsabilité causale serait retenue, ceci ne pourrait induire qu'un préjudice de perte de chance ;
- les manquements relatifs à la prise en charge postopératoire de M. B... retenus par l'expert (manque de réactivité, non-reprise immédiate) ne sont à l'origine que d'une perte de chance ; la CRCI a évalué cette perte de chance à 50 % ; les premiers juges ont également évalué cette perte de chance à 50 % ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a alloué 1 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire dans le cadre de la perte de chance dès lors que la CRCI n'a pas retenu ce chef de préjudice et que celui-ci est indemnisé dans le déficit fonctionnel temporaire ;
- le chef de préjudice " souffrances endurées " doit être évalué à 13 000 euros et non à 22 000 euros comme retenu par le tribunal administratif ; compte tenu du taux de perte de chance de 50 %, ceci limite l'indemnisation à 6 500 euros ;
- le déficit fonctionnel permanent évalué à 75 % par l'expert doit être indemnisé sur la base du barème ONIAM à hauteur de 231 860 euros et donc, compte tenu du taux de perte de chance de 50 %, à 115 930 euros ;
- le préjudice esthétique permanent évalué à 5/7 par l'expert doit être indemnisé sur la base du barème ONIAM à hauteur de 13 000 euros et donc, compte tenu du taux de perte de chance de 50 %, à 6 500 euros ;
- l'expert a retenu une période d'interruption temporaire d'activité imputable au centre hospitalier à compter du 16 août 2010 ; pour la période comprise entre le 16 juin 2010 et le 16 août 2010, ne peut pas être mis à la charge du centre hospitalier un paiement d'indemnités journalières versées par la CPAM ; ce n'est qu'à compter du 16 août 2010 que peut être mis à sa charge le remboursement de 50 % des indemnités journalières maladies versées ;
- il y a lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a statué sur les dépenses et frais futurs sans préciser le coefficient de capitalisation et la table retenue ; doit être retenu le barème issu de l'arrêté du 11 février 2015 modifiant l'arrêté du 27 décembre 2011 relatif à l'application des articles R. 376-1 et R. 454-1 du code de la sécurité sociale : doit être écartée l'utilisation du barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2013 ;
- pour la perte de gains professionnels, il appartient à M. B...de justifier de son activité professionnelle, ce dernier ayant notamment repris une activité en mi-temps thérapeutique ; M. B...doit produire les documents de la caisse d'allocations familiales et du conseil départemental sur les aides perçues ou susceptibles d'être perçues ; les sommes...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT