CAA de NANTES, 4ème chambre, 30/03/2020, 19NT03051, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. LAINE
Judgement Number19NT03051
Record NumberCETATEXT000041775074
Date30 mars 2020
CounselBOURGEOIS
CourtCour Administrative d'Appel de Nantes (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 7 mai 2019 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et la décision du 7 mai 2019 par laquelle ce préfet l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 1905077 du 23 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juillet 2019, M. G... A..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1905077 du tribunal administratif de Nantes du 23 mai 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes et l'a assigné à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de prendre en charge sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demandeur d'asile en procédure normale, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de 48 heures ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités italiennes :
- les dispositions du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 " Eurodac " ont été méconnues ; il a été procédé à un relevé incomplet de ses empreintes en méconnaissance des articles 9 et 14 de ce règlement ;
- la réponse du jugement du tribunal administratif au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du règlement " Eurodac " est insuffisamment motivée ;
- la détermination de l'Etat responsable du traitement de la demande de protection internationale ne peut être effectuée sur la base de relevés d'empreintes du demandeur qui ne présenteraient pas une qualité suffisante ; le seul élément de preuve permettant de fonder une décision de transfert n'est pas conforme ; l'Italie n'a pas répondu expressément à sa saisine ; la responsabilité de l'Italie sur le fondement de l'article 18.1 b) du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'est donc pas établie ;
- la décision est insuffisamment motivée ; il n'y a pas d'information sur le fondement de la saisine des autorités italiennes ; ce n'est que dans les pièces produites en défense qu'apparait le fondement invoqué par la préfecture, l'article 18-1 b) du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- il n'y a pas eu d'examen de sa situation personnelle ; le règlement a été appliqué automatiquement et de façon stéréotypée sans prendre en considération sa situation ;
- il maintient l'ensemble des moyens de légalité externe soulevés en première instance ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il présente une particulière vulnérabilité du fait de son statut de demandeur d'asile, de sa situation de jeune homme isolé au passé traumatique, de son parcours ; la situation des demandeurs d'asile est très dégradée en Italie ; ses conditions de vies en Italie étaient contraires au respect de sa dignité ; il ne recevra pas les soins nécessités par son état de santé ; le préfet n'a pas justifié les raisons pour lesquelles il n'entrait pas dans les critères des clauses dérogatoires ;
- il n'y pas eu d'examen du risque des violations des articles 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il n'y a pas eu examen des raisons de croire à des défaillances systémiques en Italie ; il n'y a pas eu examen du risque de mauvais traitements en cas de retour en Italie ;
. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- la décision est entachée des mêmes vices de légalité externe que ceux soulevés à l'encontre de la décision portant transfert auprès des autorités italiennes ;
- la décision est insuffisamment motivée et ne précise pas les éléments prévus par l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui peuvent fonder une assignation à résidence ;
- le préfet a pris une décision automatique d'assignation à résidence ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant transfert auprès des autorités italiennes ;
- les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ; aucun risque de fuite n'est démontré ; l'exigence de présentation quotidienne à 8 heures du matin n'est ni justifiée ni proportionnée ;
- la notification d'une assignation à résidence a eu des conséquences procédurales en ne lui laissant qu'un délai de recours contentieux de 48 heures et non le délai de droit commun de 15 jours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2019, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 25 juin 2019.

Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- l'arrêté du 2 octobre 2018 portant régionalisation de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile dans la région Pays de la Loire ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H..., première conseillère,
- et les observations de Me D..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. G... A..., ressortissant sénégalais né en janvier 1992, est entré en France en janvier 2019. Il a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 4 mars 2019. Par une décision du 7 mai 2019, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, et par une décision du même jour a également prononcé son assignation à résidence. M. A... relève appel du jugement du 23 mai 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 mai 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes et de la décision du même jour portant assignation à résidence.
Sur l'étendue du litige :
2. Le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 fixe, à ses articles 7 et suivants, les critères à mettre en oeuvre pour déterminer, de manière claire, opérationnelle et rapide l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile. La mise en oeuvre de ces critères peut conduire, le cas échéant, à une demande de prise ou reprise en charge du demandeur, formée par l'Etat membre dans lequel se trouve l'étranger, dénommé " Etat membre requérant ", auprès de l'Etat membre que ce dernier estime être responsable de l'examen de la demande d'asile, ou " Etat membre requis ". En cas d'acceptation de ce dernier, l'Etat membre requérant prend, en vertu de l'article 26 du règlement, une décision de transfert, notifiée au demandeur, à l'encontre de laquelle ce dernier dispose d'un droit de recours effectif, en vertu de l'article 27, paragraphe 1, du règlement. Aux termes du paragraphe 3 du même article : " Aux fins des recours contre des décisions de transfert ou des demandes de révision de ces décisions, les États membres prévoient les dispositions suivantes dans leur droit national : / a) le recours ou la révision confère à la personne concernée le droit de rester dans l'État membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision (...) ". Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3...

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