CAA de NANTES, 6ème chambre, 16/02/2021, 20NT03617, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. GASPON
Judgement Number20NT03617
Date16 février 2021
Record NumberCETATEXT000043155194
CounselKEROUAZ
CourtCour Administrative d'Appel de Nantes (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme O... L..., Mme BM... BG..., Mme T... K..., Mme U... BJ..., Mme AK... Z..., Mme BE... AL..., Mme AY... BB..., M. I... AM..., Mme X... P..., Mme G... AB..., M. BA... AN..., M. AF... BL..., M. H... C..., Mme AT... AC..., M. AH... Q..., Mme BH... D..., Mme BC... AQ..., Mme AV... BD..., Mme AI... AS..., Mme O... AE..., Mme AP... AU..., Mme Y... AR..., Mme S... B..., Mme AA... BI..., Mme AJ... AW..., M. BC... V..., Mme BF... W... et M. A... AZ... ont demandé au tribunal administratif de Caen, d'une part, d'annuler la décision du 22 janvier 2020 par laquelle le directeur de l'unité départementale de la Manche de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie a homologué le document unilatéral relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Remade et d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 120 euros à verser à chaque requérant au titre des frais liés au litige.

Par un jugement n° 2000660 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 22 janvier 2020 du DIRECCTE de Normandie.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2020 et un mémoire enregistré le 15 janvier 2021 et non communiqué, la SASU REMADE, Me Merly pour la SELARL A.J.I.R.E et Me Bourbouloux pour la SELARL FHB, en leur qualité de co-administrateurs judiciaires de la SAS Remade, Me Pascual, et Me Cambon pour la SELARL SBCMJ en leur qualité de co-mandataires liquidateurs de la SAS Remade, représentés par Me AD..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 30 septembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande tendant à l'annulation de la décision du 22 janvier 2020 par laquelle le directeur de l'unité départementale de la Manche de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Normandie a homologué le document unilatéral relatif au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Remade ;

3°) de mettre à la charge des requérants, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 500 euros.

Ils soutiennent que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le document unilatéral valant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Remade n'avait pas mis en oeuvre le critère relatif à la qualité professionnelle des salariés qui est énoncé au 4° de l'article L. 1233-5 du code du travail ;
- dans le cadre de son contrôle, le tribunal aurait dû vérifier l'absence de détournement de procédure par l'employeur et déterminer si les éléments d'évaluation existants étaient vérifiables et objectifs permettant de les retenir pour l'appréciation des qualités professionnelles ; en tout état de cause, cette vérification n'a pas été effectuée par les premiers juges puisqu'aucun de ces points n'apparait dans la motivation du jugement, le tribunal qui a dégagé de nouveaux principes d'appréciation du critère de la qualité professionnelle à la fois très contestables juridiquement et inapplicables en pratique, a " dénaturé " l'article L. 1233-5 du code du travail en lui imposant une interprétation qui souffre de plusieurs manquements ;
- le système d'évaluation mis en place ne pouvait être considéré comme présentant les caractères objectif et vérifiable ; il faut préciser que les administrateurs judiciaires sont intervenus dans un contexte d'urgence au cours duquel les organes de la procédure ont seulement quelques semaines pour maîtriser tous les aspects d'une société (social, économique, environnemental...) ; ils ont pris connaissance des éléments soumis pour l'évaluation des qualités professionnelles et ont fait le constat que, d'une part, les évaluations concernaient l'année 2018 ; or l'application des critères s'est faite début 2020 et une évolution des salariés étaient donc fortement probable en 2 ans ; d'autre part, les évaluations faisaient parfois l'objet de contestation puisque des notes différentes étaient attribuées entre le salarié et la direction ; enfin, seulement 60% des effectifs de la société avait bénéficié d'entretien professionnel, rendant impossible matériellement l'établissement d'une grille de qualification ; les discussions au sujet des qualités professionnelles ont ainsi été réellement approfondies et lors de la réunion du 10 décembre 2019 les élus ont déclaré " qu'ils ne pouvaient que déplorer l'absence de tout système sur le plan RH objectif et vérifiable. " ; il était impossible d'évaluer l'ensemble des salariés par catégorie professionnelle ; ainsi, parmi les catégories professionnelles où une mise en oeuvre des critères était nécessaire, seulement trois catégories professionnelles avaient un taux d'évaluation à 100% (agent de sécurité : 2 salariés ; préparateurs de commande : 4 salariés et responsable de production : 5 salariés, soit 11 salariés sur les 199 salariés concernés par l'application des critères) ; sur ces 199 salariés, seulement 58% avaient été évalués (116 salariés) ; sur 18 catégories professionnelles concernées par l'application des critères d'ordre, 15 catégories ne pouvaient prendre en compte ces évaluations en raison de l'absence de réalisation de celles-ci pour l'ensemble du personnel de la catégorie ; il n'était pas possible en conséquence de retenir les entretiens d'évaluation pour définir les qualités professionnelles ; le système d'évaluation était donc inexistant ;
- il convient de revenir à la lettre du texte édicté par l'article L. 1233-5 du code du travail qui non seulement vise la procédure de consultation des représentants du personnel dans l'établissement des critères d'ordre et n'impose aucunement que le premier projet de PSE emporte sacralisation sur les critères discutés ; il n'y a eu, à ces deux titres, aucune méconnaissance de l'article L. 1233-5 du code du travail ;
- les autres moyens présentés devant le tribunal ne sont pas fondés.

Par une intervention, enregistrée le 18 décembre 2020, la ministre du travail, de l'emploi, et de l'insertion, demande que la cour fasse droit aux conclusions de la requête.

Elle soutient que :
- le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif ne saurait être confirmé et que les autres moyens présentés en première instance par les requérants ne sont pas fondés ;
- les plans de sauvegarde d'entreprises en liquidation ou en redressement judiciaire sont encadrés par une disposition spécifique, l'article L. 1233-58 du code du travail du fait du cadre d'urgence dans lequel se déroule la procédure ; la prise en charge de l'entreprise par un liquidateur judiciaire, les délais extrêmement courts dans lesquels la procédure se déroule sont des éléments à prendre en considération dans l'appréciation du plan et du contrôle opéré par l'administration...

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