CAA de PARIS, 5ème chambre, 21/11/2019, 19PA00737, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. FORMERY
Judgement Number19PA00737
Record NumberCETATEXT000039710043
Date21 novembre 2019
CounselCMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE
CourtCour administrative d'appel de Paris (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BNP Paribas a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la restitution partielle des cotisations d'impôt sur les sociétés qu'elle a acquittées au titre des exercices clos de 1999 à 2003.

Par une ordonnance n° 0803463 en date du 4 octobre 2013, le président de la 2ème chambre de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 13PA04417 en date du 8 juillet 2016, la Cour administrative d'appel de Paris, d'une part, a donné acte du désistement de la société BNP Paribas concernant ses conclusions relatives à l'exercice clos en 1999 et ses conclusions relatives aux exercices clos de 2000 à 2003 à concurrence d'un montant de 17 858 611 euros, d'autre part, a annulé l'ordonnance attaquée en tant qu'elle avait rejeté pour irrecevabilité le surplus des conclusions de la demande de première instance et, enfin, a rejeté ce surplus, ainsi que le surplus des conclusions d'appel de la société BNP Paribas.

Par une décision n° 403356 en date du 28 janvier 2019, le Conseil d'État statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté pour la société BNP Paribas, a annulé l'article 3 de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 8 juillet 2016, rejetant le surplus des conclusions à fin de restitution et, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure initiale devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2013 et des mémoires enregistrés les
1er avril 2015, 12 juin 2015 et 15 juin 2016, la société BNP Paribas, représentée par Me C... et Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0803463 du 4 octobre 2013 par laquelle le président de la 2ème chambre de la 1ère section du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la somme de 204 937 915 euros, correspondant à une partie de l'impôt sur les sociétés qu'elle a acquitté au titre des années 1999 à 2003 ;

2°) de prononcer la restitution de cette somme ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité de l'ordonnance attaquée :
- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande comme tardive ; en effet, le motif d'irrecevabilité qui lui a été opposé n'était pas manifeste, au sens des dispositions du 4° de
l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; il appartenait au premier juge, pour considérer avec certitude sa requête comme tardive, de recueillir au préalable ses observations ; il résulte d'ailleurs de la jurisprudence du Conseil d'État que seule l'omission de présenter une réclamation préalable constitue un motif d'irrecevabilité manifeste ;
- ses réclamations présentées les 22 décembre 2004, 22 décembre 2005 et
18 décembre 2006, en vue respectivement de la restitution d'une partie de l'impôt sur les sociétés acquitté au cours des années 2002, 2003 et 2004, à raison des dividendes perçus de 2001 à 2003, sont recevables au regard des dispositions du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ; en outre, sa réclamation présentée le 22 décembre 2004 en vue de la restitution d'une partie de l'impôt sur les sociétés acquitté à raison des dividendes qui lui ont été distribués en 2000 est recevable, au regard de la proposition de rectification du 27 novembre 2003, sur le fondement de l'article R. 196-3 dudit livre ; enfin, sa réclamation présentée le 17 décembre 2004 au titre de l'exercice clos en 1999 est recevable au regard des dispositions, dans leur version alors applicable, de l'article L. 190 et du c) de l'article
R. 196-1 de ce livre, dès lors que l'arrêt rendu le 7 septembre 2004 par la Cour de justice des Communautés européennes dans l'affaire Petri Manninen (aff. C-319/02) a révélé l'incompatibilité du système français, alors en vigueur, de l'avoir fiscal et du précompte, avec la libre circulation des capitaux garantie par le Traité ;



S'agissant du bien-fondé de la demande en restitution :
- elle déclare se désister de ses conclusions relatives à l'année 1999, ainsi que de ses conclusions relatives aux années 2000 à 2003 à hauteur de 17 858 611 euros correspondant aux avoirs fiscaux attachés à certains dividendes distribués par des sociétés italiennes ;
- il ne s'agit pas en l'espèce d'une demande en restitution d'un précompte mobilier, puisque les dividendes qui lui ont été reversés au titre des exercices en cause l'ont été par des filiales dans lesquelles elle ne détient que des participations très minoritaires ; ainsi, sa demande était présentée en vue d'une restitution d'une partie de l'impôt sur les sociétés acquitté au titre de ces exercices, à raison de l'avoir fiscal auquel ouvrent droit ces mêmes dividendes ; dès lors, les solutions des arrêts Ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique c/ Sociétés Accor et Rhodia rendus par le Conseil d'État le 10 décembre 2012 ne sont pas pleinement applicables ;
- les exigences probatoires du Conseil d'État sont disproportionnées au regard de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ; il résulte de la jurisprudence de la Cour que tout document permettant de justifier, de façon claire et précise, de l'éligibilité des distributions en cause à l'avoir fiscal, présente une valeur probante suffisante ; à cet égard, les éléments d'information qu'elle a pu recueillir sur la base de données Bloomberg suffisent à attester du caractère régulier des distributions dont elle a bénéficié ; en outre, du fait de son statut d'actionnaire minoritaire, il ne peut être exigé d'elle la justification du montant de l'impôt acquitté par la filiale lui ayant distribué des dividendes ; il s'agit en effet d'une information confidentielle que seul un actionnaire majoritaire peut obtenir ; enfin, rien ne s'oppose à ce que l'avoir fiscal bénéficie aux dividendes distribués au cours des cinq années précédant l'exercice considéré ; il ne saurait ainsi être exigé des sociétés ayant présenté une réclamation, au regard des principes d'effectivité et d'équivalence du droit de l'Union européenne, la production de justificatifs au-delà du délai légal de conservation ;
- elle a mené d'importants travaux de recherche pour justifier de la réalité et de la régularité des distributions ainsi que du taux et du montant d'impôt acquitté par ses filiales dans d'autres États membres de l'Union européenne ; il est précisé que les distributions ayant bénéficié à sa filiale BNP Paribas Arbitrage - qui représentent en définitive plus de 98,5 % du montant de l'avoir fiscal dont elle sollicite l'octroi - proviennent de sociétés cotées soumises à une réglementation stricte, si bien que le caractère régulier de celles-ci doit être présumé et que les données issues de la base Bloomberg revêtent une valeur probante suffisante ; pour les autres filiales, les justificatifs peuvent provenir d'autres sources ; elle présente par ailleurs un descriptif des activités des sociétés distributrices afin de justifier de leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés dans l'État membre considéré ;
- la banque étant une banque de stature internationale, les titres sont placés chez des dépositaires qui peuvent à leur tour s'adresser à d'autres dépositaires ; qu'ainsi, les demandes de l'administration équivalent à exiger une preuve impossible ;
- le cabinet Ernst et Young a adressé à chaque société distributrice une demande concernant le niveau d'imposition des distributions ; l'absence de réponse démontre que la preuve exigée par l'administration est impossible à apporter ; l'imposition acquittée apparaît distinctement au niveau de la société consolidante qui correspond la plupart du temps, s'agissant de sociétés cotées, à l'entité distributrice ; en tout état de cause, le tableau annexé au rapport d'expertise mentionne pour un certain nombre de distributions un " impôt sur les sociétés statutaire " ;
- certaines solutions issues des décisions rendues le 10 décembre 2012 par le Conseil d'État apparaissent en contrariété avec la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ; il résulte de la jurisprudence européenne que l'impôt acquitté par les sous-filiales doit être pris en compte ; cette jurisprudence fait en outre obstacle à l'instauration d'un mécanisme fiscal d'imputation...

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