CAA de PARIS, 5ème chambre, 27/05/2021, 20PA01778, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. FORMERY
Judgement Number20PA01778
Record NumberCETATEXT000043587544
Date27 mai 2021
CounselPERE
CourtCour administrative d'appel de Paris (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 mai 2020 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2007400 du 13 juin 2020, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.


Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2007400 du 13 juin 2020 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 15 mai 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile ainsi qu'un formulaire OFPRA dans le délai de cinq jours à compter de la notification du présent arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors le premier juge a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- le préfet de police a commis une erreur de droit en désignant l'Allemagne comme l'État membre responsable de l'examen de sa demande d'asile ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 2e alinéa de l'article 3.2 et de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Par un courrier du 15 décembre 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public tiré de l'existence d'un non-lieu à statuer sur la requête, dans la mesure où l'arrêté de transfert du 15 mai 2020 n'est plus susceptible d'exécution à l'expiration d'un délai de six mois ayant couru à compter de la notification du jugement du 13 juin 2020 au préfet de police.


Par un mémoire en défense enregistré le 21 décembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Le préfet de police soutient que :
- il y a lieu de statuer sur la requête, dès lors que M. A... a été remis aux autorités allemandes le 10 novembre 2020 ;
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.


Le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A... par une décision en date du 3 septembre 2020.


Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 de la Commission modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.


Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.


Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan qui serait né le 1er janvier 1997 selon ses déclarations, est entré irrégulièrement sur le territoire français et a présenté une demande d'asile au guichet unique des demandeurs d'asile de Paris le 13 février 2020. La consultation du fichier " Eurodac " a révélé que l'intéressé a présenté une demande d'asile auprès des autorités bulgares le 26 octobre 2018, puis auprès des autorités allemandes le 31 mars 2019. Le préfet de police a adressé aux autorités allemandes une demande de reprise en charge de M. A... le 14 février 2020, qu'elles ont acceptée le 21 février 2020 sur le fondement des dispositions du d) du 1. de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Le préfet de police a alors décidé, par l'arrêté contesté du 15 mai 2020, de remettre M. A... aux autorités allemandes. L'intéressé fait appel du jugement du 13 juin 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.


Sur la régularité du jugement :

2. M. A... soutient que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration. Si le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, soulevé par le requérant en première instance, était inopérant et pouvait, à ce titre, être écarté implicitement, il appartenait toutefois au premier juge de l'analyser dans les visas du jugement attaqué. Dès lors, en l'absence d'une telle analyse et de réponse dans les motifs du jugement attaqué, celui-ci est entaché d'irrégularité.

3. Par suite, il y a lieu d'annuler le jugement, sauf en ce qu'il admet M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, et de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision du préfet de police prononçant sa remise aux autorités allemandes.


Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de transfert :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article
L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Et aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre État peut faire l'objet d'un transfert vers l'État responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre État membre ayant accepté de le prendre ou de reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des...

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