CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 11/10/2016, 15VE00551, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. BERGERET
Record NumberCETATEXT000033236511
Date11 octobre 2016
Judgement Number15VE00551
CounselCMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE
CourtCour administrative d'appel de Versailles (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société GROUPEMENT CHARBONNIER MONTDIDERIEN, venant aux droits de la société Bunburry, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles assises sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1207103 du 18 décembre 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 17 février 2015, le 10 mai 2015 et le 22 septembre 2016, la société GROUPEMENT CHARBONNIER MONTDIDERIEN, représentée par Me A...et MeB..., avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions supplémentaires en litige pour une somme globale de 10 931 487 euros ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- en se bornant à juger que le principe d'un débat oral et contradictoire n'avait pas été méconnu, le tribunal a, dans le jugement attaqué, omis de répondre aux critiques qu'elle avait formulées devant lui et tendant à ce que soit sanctionné le détournement de procédure auquel l'administration s'est livrée lorsqu'elle a mis en oeuvre de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;
- en subordonnant, dans le cadre de la procédure de visite et de saisie domiciliaire, l'éventuelle sanction d'un emport irrégulier de documents à l'existence d'un lien entre les documents emportés et les rectifications en litige, le tribunal a ajouté à la loi, telle qu'interprétée par le Conseil d'Etat, étant rappelé que l'administration n'a jamais sérieusement contesté le fait que la procédure de visite et de saisie domiciliaire lui avait permis d'obtenir des documents auxquels elle n'aurait pas eu accès lors de la vérification de comptabilité et alors que le Conseil d'Etat veille à ce que la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article L. 16 B ne conduise pas à la violation des garanties dont le contribuable bénéficie dans le cadre de ce contrôle sur place ;
- la mise en oeuvre, au cours de la vérification de comptabilité, de la procédure prévue à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales - en ce qu'elle a eu pour but exclusif de soustraire les documents emportés, irrégulièrement de surcroît, à la contrainte du débat oral et contradictoire - traduit un détournement de procédure ; de fait, la consultation des documents saisis n'a fait l'objet d'aucun débat oral et contradictoire ;
- la vérification de comptabilité est, en conséquence de ce qui précède, elle-même entachée d'une irrégularité de nature à entraîner la décharge des impositions ;
- en outre, la procédure suivie devant le comité consultatif pour la répression des abus de droit est également irrégulière dès lors qu'elle a été privée, en l'absence de justification, par l'administration, de l'envoi régulier d'une convocation, de la faculté de présenter valablement ses observations ; en tout état de cause, l'administration n'a pas contesté que la convocation a été adressée à la société dissoute, Bunburry, et non à elle-même ;
- le régime des sociétés mères est applicable aux dividendes reçus de la société FGK dès lors que l'opération n'a pas eu un but exclusivement fiscal, mais également un objectif financier dès lors qu'elle a permis de dégager un gain financier substantiel, représentant 12 % de l'investissement ; qu'il ne s'agit pas d'un gain financier négligeable comme dans l'affaire Garnier Choiseul, n° 352989, jugée le 17 juillet 2013 par le Conseil d'Etat, où ce gain s'élevait au plus à 2 % de l'investissement ; il suit de là que l'abus de droit défini à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales n'est pas constitué au cas particulier ;
- le législateur n'a pas entendu limiter le bénéfice du régime des sociétés mères aux dividendes exclusivement imputés sur des résultats ayant supporté l'impôt et qui sont distribués par des sociétés ayant conservé une activité opérationnelle ;
- il est indispensable de distinguer, dans la présente espèce, entre, d'une part, les actes qui, sans correspondre à l'objectif initial fixé il y a plus de quatre-vingt ans par le législateur, n'outrepassent pas les limites, de surcroît évolutives, de cet objectif, des actes clairement contraires à l'intention du législateur ; l'administration ne saurait ainsi lui faire grief de ne pas avoir su, il y a plus de dix ans, que le Conseil d'Etat interpréterait, de manière stricte, dans sa décision du 17 juillet 2013, les limites à apporter au régime d'exonération des produits de participation pour l'application du régime des sociétés mères ;
- l'interprétation retenue par le service des impôts des articles 145 et 216 est contraire au droit de l'Union européenne, notamment la directive 2011/96/UE du 30 novembre 2011 ; par ailleurs, il n'existe aucune trace dans le régime des sociétés mères, tel que nous le connaissons aujourd'hui, de l'objectif fixé dans les années vingt selon lequel le régime d'alors aurait été créé pour faciliter le développement économique des sociétés filles, par leurs mères, pour les besoins de la structuration et du renforcement de l'économie française en ce que ce régime originel concernait, en fait, les actionnaires des sociétés mères, et non elles-mêmes ; l'évolution, à la baisse, du taux minimum de détention du capital de la filiale au cours des cinquante dernières années (de 50 % à 5 %) atteste de l'écart entre la réalité du régime actuel et l'objectif de développement économique des filiales et du renforcement de l'économie française, étant également relevé qu'un tel objectif serait rigoureusement incompatible avec de nombreuses dispositions légales applicables depuis très longtemps pour certaines d'entre elles ;
- aucune majoration pour abus de droit ne peut être mise à sa charge sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts, dès lors que l'administration ne démontre pas qu'un tel abus est constitué ; l'importance à accorder à l'objectif du législateur, au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, à des faits litigieux postérieurs de plus de quatre-vingt ans à l'édiction de la législation applicable ne tombe pas sous le coup de l'évidence ;
- l'interprétation retenue par le premier juge est directement contraire au droit de l'Union européenne dès lors qu'aucune disposition de la directive n° 2011/96/UE du 30 novembre 2011 (qui se substitue à celle n° 90/435/CEE du 23 juillet 1990) ne permet d'écarter du bénéfice de l'exonération des dividendes prévu par le régime des sociétés mères, les entreprises n'exerçant pas une activité industrielle, commerciale ou économique, de sorte que le tribunal et le Conseil d'Etat donnent une interprétation du droit national contraire au droit européen ;
- le tribunal...

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