CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 07/07/2020, 14VE02786, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. BRESSE
Judgement Number14VE02786
Record NumberCETATEXT000042132550
Date07 juillet 2020
CounselPWC SOCIETE D'AVOCATS
CourtCour administrative d'appel de Versailles (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société L'AIR LIQUIDE SA POUR L'ETUDE ET L'EXPLOITATION DES PROCEDES GEORGES CLAUDE (ci-après "SOCIETE L'AIR LIQUIDE ") a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la restitution des sommes payées au titre du précompte mobilier dont elle s'est acquittée en 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004 à hauteur de la somme totale, dans le dernier état de ses prétentions, de 212 961 535 euros.

Par une ordonnance n° 0902606 du 15 septembre 2009, le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, a transmis la demande au Tribunal administratif de Montreuil.

Par un jugement n° 0902606 du 11 juillet 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a, d'une part, prononcé la restitution des sommes litigieuses à hauteur, respectivement, des sommes de 18 315 969 euros au titre de l'année 2002 et de 11 994 059 euros au titre de l'année 2003 et, d'autre part, rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 septembre 2014 et des mémoires, enregistrés les 24 juin 2015, 1er juin 2016, 20 février et 28 juin 2017, 22 janvier 2018, 21 janvier et 26 décembre 2019 et 12 février 2020, la SOCIETE L'AIR LIQUIDE, représentée en dernier lieu par Mes A... et Madec, avocats, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1° d'annuler ce jugement, en ce qu'il ne fait pas droit à l'intégralité de sa demande ;

2° à titre principal, de prononcer la restitution des montants de précompte mobilier dont elle s'est acquittée au titre des années 2000, 2001, 2002, 2003 et 2004 à due concurrence de la somme totale de 207 881 829 euros, comprenant les sommes dont la restitution a été prononcée par le jugement attaqué, et augmentée de l'application des intérêts moratoires ;

3° à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que de la somme de 26 292, 63 euros au titre des frais de traduction qu'elle a engagés pour les besoins de la procédure.


Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- elle est recevable à demander la restitution des montants de précompte dont elle s'est acquittée au titre des années 2000 et 2001, dans la mesure où sa réclamation préalable présentée le 22 décembre 2004 n'était pas tardive en vertu des dispositions du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction lors applicable, l'événement motivant sa réclamation étant constitué en l'espèce par l'intervention de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 7 septembre 2004, n° C-319 /02 " Petri Manninen " ;
- elle est fondée à obtenir la restitution de l'intégralité des montants de précompte mobilier restant en litige en ce qu'ils se rapportent à la redistribution de revenus tirés de ses filiales établies dans d'autres États de l'Union européenne, dans la mesure où, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne rendue en ce qui concerne le dispositif fiscal, identique dans ses fondements, de la " fairness tax " belge, le dispositif du précompte mobilier n'est pas conforme aux dispositions de l'article 4, paragraphe 1, de la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990, reprises sans changement, pour ce qui concerne le présent litige, par la directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 sur le fondement de laquelle s'est prononcée la Cour, dès lors qu'il institue une double imposition de ces dividendes supérieure à celle admise par la directive ;
- au surplus, les premiers juges, en restreignant le droit à restitution du précompte mobilier acquitté à hauteur de l'imputation du montant des impositions effectivement payées par ses filiales dans les autres États de l'Union européenne dans lesquelles elle sont établies, ont laissé perdurer une inégalité de traitement incompatible avec les principes du droit de l'Union en ce qui concerne le traitement fiscal des dividendes versés par ces filiales étrangères et celui des dividendes qui auraient été servis par des filiales françaises, lesquels sont intégralement exonérés d'impôt, dans la mesure où le taux d'imposition effectif des bénéfices des sociétés appliqué dans les autres États de l'Union peut être inférieur au taux de l'impôt sur les sociétés français ;
- les déclarations de précompte qu'elles a souscrites ne lui sont pas opposables, en ce que ces formulaires, dont l'objet est purement fiscal, conduisent à déclarer des imputations de dividendes servis par les filiales d'une société mère incompatibles avec les principes d'effectivité et d'équivalence prévus par le droit de l'Union, les conditions d'imputation dans le précompte mobiliers des revenus provenant de ses filiales établis dans d'autres États de l'Union européennes qui découlent de l'utilisation de ces déclarations de précompte étant moins favorables que celles applicables aux revenus provenant de ses filiales françaises ; pour la détermination de ses droits à crédit d'impôt, il convient de prendre en compte uniquement les documents sociaux émanant des organes compétents pour décider d'une distribution ; en tout état de cause, elle est fondée à demander, nonobstant les mentions portées sur ces déclarations de précompte, que les distributions de dividendes ayant donné lieu au prélèvement de ce précompte soient réputées avoir été effectuées par reversement aux actionnaires des revenus de ses filiales situées dans l'autres États de l'Union européenne dont elle disposait au titre de chacune des années de distribution en litige et à obtenir, par suite, la restitution des montants de précompte en cause, dans la mesure où, pour les motifs exposés ci-dessus, ces revenus auraient dû être distribués en franchise de précompte ;
- pour ce dernier motif, elle est fondée à obtenir la restitution des montants de précompte dont elle s'est acquittée par redistribution de sommes prélevées sur sa réserve spéciale de plus-values de long terme, dans la mesure où elle aurait choisi de manière préférentielle, en tout état de cause, de redistribuer ses revenus remontés de ses filiales établies dans l'autres États de l'Union européenne, qui l'auraient ainsi été en franchise de précompte ; lui refuser une telle affectation rétroactive de ces revenus à ses distributions la prive de la possibilité de bénéficier de l'exonération d'impôt qui s'y attache et méconnait donc le principe d'effectivité, qui est au nombre des principes garantis par le droit de l'Union ; en tout état de cause, il y aurait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle portant sur la compatibilité avec ce principe de l'impossibilité de procéder, pour ces motifs, à une nouvelle liquidation de l'assiette du précompte mobilier dont la restitution est demandée ;
- les stipulations de la convention fiscale franco-italienne du 5 octobre 1989, qui permet à une société mère de demander au fisc italien le bénéfice de l'avoir fiscal qui aurait été attaché, en vertu de la législation de cet État, aux dividendes versés par ses filiales italiennes, ne peuvent avoir pour effet de réduire le droit à restitution du précompte mobilier qu'elle tire de l'incompatibilité de ce dispositif avec le droit de l'Union ; en tout état de cause, la prise en compte de ces avoir fiscaux devrait elle-même être minorée à raison de la prise en compte de la retenue à la source opérée sur ces mêmes dividendes en application du paragraphe 4 b de l'article 10 de cette même convention ;
- la limitation du crédit d'impôt dont elle peut demander la restitution au tiers du montant des dividendes perçus de ses filiales et pris en compte pour le calcul du précompte mobilier, par référence au taux nominal de l'impôt sur les sociétés appliqué en France, dont le tribunal a fait application, ne permet pas d'assurer l'égalité de traitement des dividendes versés par les filiales d'une société-mère, que ces filiales soient françaises ou établies dans d'autres Etats de l'Union européenne, et elle est en outre entachée d'une erreur de droit ; à ce titre, elle est fondée à obtenir la restitution de l'intégralité du précompte acquitté au titre de ces distributions, soit 50 % du montant des revenus de ses filiales européennes redistribués à ses actionnaires pour chacune des années en litige ;
- elle est fondée à obtenir la restitution des montants de précompte mobilier qu'elle a acquitté à l'occasion de la distribution à ses actionnaires des résultats versés par ses filiales établies hors de l'Union européenne, en ce que l'application du précompte à ces revenus est contraire au principe de liberté de circulation des capitaux sans que la clause de gel de l'article 65 du TFUE puisse lui être opposée ;
- elle est également fondée à obtenir la restitution des montants de précompte mobilier prélevés à l'occasion de la redistribution de revenus tirés de ses filiales établies hors de l'Union européenne, dès lors que l'imposition de ces redistributions au titre du précompte emporterait, pour les contribuables devant s'acquitter de ce dernier, une discrimination vis-à-vis de ceux distribuant à leurs actionnaires des revenus tirés de leurs filiales situées dans l'autres États de l'Union européenne, cette discrimination étant incompatible avec les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinées avec celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ; le service ne saurait opposer l'existence de la " clause de gel " prévue par l'article 65 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui est sans effet sur l'appréciation de l'existence d'une discrimination au regard des stipulations précitées ;
- à...

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