CAA de VERSAILLES, 7ème Chambre, 11/06/2015, 14VE01161, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme HELMHOLTZ
Judgement Number14VE01161
Record NumberCETATEXT000030716595
Date11 juin 2015
CounselCMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE
CourtCour administrative d'appel de Versailles (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la requête, enregistrée le 18 avril 2014, présentée pour la SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE (SFR), dont le siège social est situé 42 avenue de Friedland à Paris (75008), par Me A...et Me B...(C...), avocats ;

la SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE (SFR) demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1310334 du 3 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques qu'elle a acquittées au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2012 pour le montant de 60 987 756 euros et à la restitution de cette somme augmentée des intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la décharge correspondante et la restitution de la somme de 60 987 756 euros augmentée des intérêts moratoires ;

3°) le cas échéant, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de toute question préjudicielle sur la notion de lien d'affectation contraignant et son application et de surseoir à statuer jusqu'à l'intervention de la réponse de cette Cour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé sur le moyen tiré de la non-conformité de la taxe à la Directive Autorisation ;
- la taxe méconnaît l'article 107 et le paragraphe 3 de 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; sauf à priver d'effet utile l'obligation prévue à l'article 108, ce qui serait contraire au principe de l'interprétation téléologique du droit de l'Union européenne appliqué dans l'arrêt 19/03/13 Bouygues SA, on ne peut regarder comme exclue d'un lien d'affectation contraignant toute taxe dont le produit est affecté au budget général de l'Etat ; l'existence d'un lien d'affectation contraignant ressort du IV de l'article 33 de la loi du 5 mars 2009 ; l'instruction du 21 décembre 2009 publiée au BOI du 29 décembre 2009 sous le n° 3 P-2-09 le confirme ; l'article 75 de la loi du 5 mars 2009 confirme l'existence de ce lien, la suppression d'une partie de cet article par le décret n°2013-722 du 2 août 2013 étant révélatrice à cet égard ; le Conseil constitutionnel a considéré que la loi établit un tel lien ; il existe un lien économique direct entre la taxe et l'aide apportée à France Télévisions, ce dont attestent les modifications introduites par l'article 28 de la loi n° 2013-1028 du 15 novembre 2013 ; la taxe sur la publicité et la taxe litigieuse ont été calibrées pour générer un rendement cumulé d'un montant égal au manque à gagner de France Télévisions ; une question préjudicielle pourrait être posée à la Cour de justice de l'Union européenne ;
- la taxe méconnaît le principe de la liberté des prestations de services garanti par l'ancien article 49 du TCE devenu l'article 56 du TFUE en ce qu'elle rend moins attractif l'exercice de leur activité par les opérateurs non établis en France, puisqu'en pratique seuls les opérateurs nationaux pourront déduire de l'assiette de la taxe les dotations aux amortissements sur les infrastructures et matériels établis sur le territoire national ; il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de Union européenne, comme de la décision du Conseil d'Etat du 26 décembre 2013, n° 368540, Deutsche Bahn AG, qu'une législation nationale applicable indistinctement aux opérateurs nationaux et étrangers mais pesant plus lourdement sur les opérateurs étrangers méconnaît l'article 56 du TFUE ;
- la taxe méconnaît l'article 12 de la directive Autorisation et les considérants 31 et 30 de cette directive ; l'arrêt C-485/11 du 27 juin 2013 de la de la Cour de justice de Union européenne n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée à cet égard ; cet arrêt confond la notion de fait générateur de la taxe et celle d'assiette taxable ; le champ d'application de la taxe correspond à la catégorie des opérateurs de communications électroniques ayant fait une déclaration auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), visés au 2 de l'article 3 de la directive ; la circonstance que le dispositif prévoit certaines exonérations est sans incidence, d'autant que les opérateurs dont le chiffre d'affaires est inférieur à 5 millions d'euros sont soumis aux mêmes obligations déclaratives que les autres et que l'instruction du 24 juin 2013 rappelle que l'interruption du versement des acomptes relève de la seule initiative des redevables ; la taxe ne relève pas des cas limitativement admis par la directive; la jurisprudence Albacom de la Cour de justice de l'Union européenne, relative à la taxe italienne, est transposable car la taxe prive la directive d'effet utile ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques ;

Vu l'arrêt C-485/11 du 27 juin 2013 de la Cour de justice de l'Union européenne;

Vu la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 14, ensemble le premier protocole additionnel, notamment son article 1er ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des postes et des communications électroniques ;

Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;

Vu la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelles et au nouveau service public de la télévision, dans sa version applicable ;

Vu la décision 2009-577 DC du 5 mars 2009 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2015 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,
- les conclusions de Mme Garrec, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour la SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE (SFR) ;


1. Considérant que la SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE (SFR) a acquitté des cotisations de taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques, pour un montant de 60 987 756 euros au titre de la période du 1er janvier au
31 décembre 2012 ; qu'elle relève appel du 3 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations de taxe ;

2. Considérant que les impositions litigieuses sont fondées sur les dispositions de l'article 302 bis KH du code général des impôts, selon lesquelles : " I. - Il est institué une taxe due par tout opérateur de communications électroniques, au sens de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, qui fournit un service en France et qui a fait l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en vertu de l'article L. 33-1 du même code. / II. - La taxe est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers aux opérateurs mentionnés au I en rémunération des services de communications électroniques qu'ils fournissent, déduction faite du montant des dotations aux amortissements comptabilisés au cours de l'exercice clos au titre de l'année au cours de laquelle la taxe est devenue exigible, lorsqu'ils sont afférents aux matériels et équipements acquis, à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, par les opérateurs pour les besoins des infrastructures et réseaux de communications électroniques établis sur le territoire national et dont la durée d'amortissement est au moins égale à dix ans. / Sont toutefois exclues de l'assiette de la taxe : 1° Les sommes acquittées par les opérateurs au titre des prestations d'interconnexion et d'accès faisant l'objet des conventions définies au I de l'article L. 34-8 du code des postes et des télécommunications électroniques ; 2°...

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