Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 21/12/2017, 15BX02666, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. DE MALAFOSSE
Date21 décembre 2017
Record NumberCETATEXT000036253077
Judgement Number15BX02666
CounselCABINET TEN FRANCE
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Innov'ia a demandé au tribunal administratif de Poitiers de condamner la compagnie d'assurances MMA et à défaut la communauté d'agglomération de La Rochelle ou, subsidiairement, les constructeurs pris solidairement, à lui verser la somme de 744 554,19 euros HT au titre du coût des travaux de réparation des désordres subis par l'usine agroalimentaire dont elle est devenue propriétaire, indexé sur l'indice BT01 du coût de la construction en avril 2009, 19 918,32 euros au titre des dépenses d'amélioration apportées à l'ouvrage et la somme de 913 800 euros au titre de ses préjudices économique et d'image.

Par un jugement n° 1202631 du 3 juin 2015, le tribunal administratif de Poitiers a condamné la compagnie d'assurances MMA à verser à la société Innov'ia la somme de 20 000 euros HT et a condamné les sociétés AT2I et Arcature à verser 10 000 euros chacune à la compagnie MMA.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2015, et des mémoires enregistrés les 16 décembre 2016, 3 mars et 23 mars 2017, la société Innov'ia, représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du 3 juin 2015 ;

2°) de faire entièrement droit à ses demandes indemnitaires de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la compagnie d'assurances MMA, à défaut à la charge de la communauté d'agglomération de La Rochelle ou, subsidiairement, à la charge solidaire des locateurs d'ouvrage, une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le maître d'ouvrage a signé pour chacun des lots des procès-verbaux de réception sans réserve ; la réception définitive a été prononcée à effet du 22 juillet 2003 pour l'ensemble des lots ; les constats de non-conformité par Innov'ia ne peuvent être regardés comme des réserves ;
- le tribunal a estimé à tort, compte tenu de la réception définitive, que pour certains désordres l'absence de levée des réserves faisait obstacle à la mise en oeuvre de la garantie décennale ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que certains désordres ne pouvaient être pris en considération dès lors qu'ils étaient apparents le jour de la réception ; en tout état de cause, les désordres n° 2, 8, 12 et 13 n'étaient pas apparents au jour de la réception ;
- c'est également à tort que le tribunal a estimé, en dépit des conclusions de l'expert, que les désordres 3, 4, 9 et 13 ne portent pas atteinte à la destination de l'ouvrage ;
- les désordres imputables à la société Etandex et afférents à l'insuffisance de pente des sols, au défaut de qualité de la résine de sol, au défaut de tenue des peintures, sont clairement établis par l'expert ; elle ne peut se dégager de sa responsabilité au motif que la société Innov'ia a validé le CCTP dans le cadre de l'appel d'offres ;
- les désordres imputables à la société Pianazza, à la société Ridoiret Menuiseries et à la société AT2I tenant à la non-conformité des portes de distribution intérieures, au défaut des joints de dilatation au sol, au défaut de finition des caniveaux, sont également établis ;
- elle a expliqué et justifié du fondement de son action contre les locuteurs d'ouvrage ; ceux-ci connaissaient les besoins particuliers d'Innov'ia et devaient en tenir compte ; le rapport d'expertise démontre les responsabilités des entreprises ACI et Brunet ;
- le désordre n° 13 qui concerne la société Cegelec provient selon l'expert d'un non respect des prescriptions du CCTP ; l'impossibilité de sécher correctement les locaux les rend impropres à leur destination ; le caractère visible des travaux ne permet pas de connaître la capacité de l'installation et n'est donc pas de nature à remettre en cause l'engagement de la garantie décennale, indépendamment de toute faute commise par Cegelec ;
- AT2I admet que les désordres affectant les menuiseries intérieures ne pouvaient être appréhendés dans leur ampleur et dans leurs conséquences dès la réception ;
- la note technique du 26 octobre 2001 a été communiquée au maître d'oeuvre et au maître d'ouvrage à destination de l'ensemble des entreprises ; ce document est antérieur au devis de la société Etandex ; s'il ne lui a pas été remis, il s'agit d'une carence imputable au maître d'oeuvre et de nature à engager sa responsabilité ;
- le recours engagé par une personne privée contre un maître d'ouvrage public en raison de désordres apparus en cours de garantie décennale relève de la compétence de la juridiction administrative ; le contrat d'assurance conclu entre la communauté d'agglomération et la société MMA est par ailleurs un contrat de droit public ; elle actionne la communauté d'agglomération en sa qualité de constructeur-vendeur et non simplement de vendeur ;
- elle subit vingt-quatre types de dommages distincts, réels et à l'origine d'un important préjudice ; selon l'expert, treize d'entre eux nécessitent des travaux de reprise ; le coût de ces travaux a été chiffré à la somme de 744 554,49 euros HT ; ces travaux visent à rendre l'immeuble propre à sa destination compte tenu des contraintes spécifiques de l'activité qui s'y exerce ;
- elle subit également un préjudice économique tenant à la mise en oeuvre de travaux complémentaires de nettoyage entraînant des frais de personnel et des pertes d'exploitation évalués à 474 000 euros, à des pertes d'exploitation liées aux travaux de réparation des désordres pour 240 000 euros et à une perte d'image et de crédibilité qui peut être évaluée à 200 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 15 octobre 2015, M.B..., mandataire liquidateur de la société Arcature conclut à la réformation du jugement du 3 juin 2015 en ce qu'il n'a pas entièrement rejeté les demandes de la société Innov'ia, au rejet de l'ensemble des prétentions indemnitaires de cette société, subsidiairement, à ce que la société Arcature soit garantie par l'ensemble des maîtres d'oeuvres et constructeurs des condamnations prononcées contre elle, à titre infiniment subsidiaire, à ce qu'il soit fait application de coefficients de vétusté et d'enrichissement sur les demandes formulées par Innov'ia et, enfin, à ce que soit mise à la charge de celle-ci seule ou solidairement avec les autres intervenants à l'opération, une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- le tribunal a omis de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée aux conclusions de la société Innov'ia dirigées contre la société Arcature dans la mesure où celle-ci n'a plus d'existence légale depuis le 18 décembre 2012 et où la mission du liquidateur a pris fin avec la radiation de la société ;
- le tribunal s'est livré à une parfaite analyse des vingt-quatre désordres pour lesquels une réparation est sollicitée et en a tiré à juste titre que les conditions de mobilisation de la garantie décennale ne sont pas remplies ; cette analyse doit être confirmée ;
- les désordres 14 à 24 sont sans objet ou concernent l'exploitant ;
- il conviendra de confirmer l'analyse du tribunal s'agissant des désordres apparents à réception n'ayant pas fait l'objet de réserves ;
- il est indifférent que ce ne soit pas la société Innov'ia qui ait procédé à la réception des travaux ;
- ainsi, le désordre n° 8 n'a fait l'objet d'aucune réserve à la réception alors que la non-conformité était apparente ; aucune demande ne saurait donc prospérer à ce titre ;
- il en va de même s'agissant des parois de support en béton des portes et des défauts du système de ventilation ;
- la société Arcature n'avait pas la charge de la pose des appareils d'éclairage et aucune faute dans le suivi des travaux ne peut lui être reprochée ; la responsabilité échoit ici in fine à la société Brunet Sicot, au bureau de contrôle Socotec et au bureau d'études ACI ;
- l'origine du désordre portant sur les ouvrages de ventilation relève de l'intervention de la société Cegelec, titulaire du lot considéré ; il y a lieu en tout état de cause d'appliquer un abattement de 50 % au titre de l'enrichissement et de 10 % supplémentaires au titre de la vétusté;
- les défauts de réservations dans les parois du support béton sont imputables à la société Pianazza, en charge du lot gros oeuvre, pour vice d'exécution ;
- le tribunal a estimé à juste titre que la réparation des désordres ayant fait l'objet d'une réception avec réserves n'étaient pas possible sur le fondement de la garantie décennale dès lors que ceux-ci avaient fait l'objet de réserves non levées ;
- les défauts de mise en oeuvre des plinthes ne peuvent concerner que la société Isol France pour le problème de pose et la société AT2I pour le choix du matériau ; il y a lieu en tout état de cause d'appliquer un abattement au titre de l'enrichissement ;
- les défauts relatifs aux portes extérieures concernent la société Miroiteries de l'ouest ;
- la corrosion de la charpente métallique incombe aux sociétés Sorométal et Isol France ;
- les défaut des joints de dilatation au sol sont imputables à la société Pianazza, de même que les défauts de finition des caniveaux ;
- le défaut de qualité des résines du sol est imputable à la société Etandex, de même que le défaut de tenue des peintures ; un abattement de 60 % devra être appliqué sur ce dernier poste ;
- la société Brunet Sicot est responsable des défauts des réseaux électriques ;
- les sociétés Etandex et Pianazza sont seules responsables du défaut des pentes de sols ;
- s'agissant des désordres n'ayant pas fait l'objet de réserves à réception mais ne rendant pas l'ouvrage impropre à sa destination, la non-conformité des portes intérieures, seules la société Ser et la société AT2I devront être tenues à indemnisation ; un abattement pour vétusté et enrichissement devra en tout état de cause être appliqué ;
- s'agissant des défauts d'étanchéité du clos couvert, le désordre 4.1 est devenu sans objet, le désordre...

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