Cour de cassation, Assemblée plénière, 7 janvier 2011, 09-14.316 09-14.667, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Loriferne
Case OutcomeCassation
CounselSCP Baraduc et Duhamel,SCP Célice,Blancpain et Soltner,SCP Hémery et Thomas-Raquin
Appeal NumberP1100587
Date07 janvier 2011
Docket Number09-14316,09-14667
CitationSur le n° 1 : Sur l'applicabilité du code de procédure civile et du code de commerce, dans le même sens que :Com., 3 mars 2009, pourvois n° 08-14.435 et n° 08-14.464, Bull. 2009, IV, n° 30 (1) (cassation), et l'arrêt cité. Sur le n° 2 : Sur l'irrecevabilité de l'enregistrement d'une conversation téléphonique à l'insu de l'intéressé : - dans le même sens que :Com., 3 juin 2008, pourvois n° 07-17.147 et n° 07-17.196, Bull. 2008, IV, n° 112 (cassation) ;- à rapprocher :Soc., 20 novembre 1991, pourvoi n° 88-43.120, Bull. 1991, V, n° 519 (cassation) ; Soc., 23 mai 2007, pourvoi n° 06-43.209, Bull. 2007, V, n° 85, (rejet), et l'arrêt cité
Subject MatterCONCURRENCE - Autorité de la concurrence - Décision - Recours - Textes applicables - Code de procédure civile - Limite - Disposition expresse contraire du code de commerce
CourtAssemblée Plénière (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2011, Assemblée plénière, n° 1

Arrêt n° 587 P + B + R + I
Pourvois n° X 09-14.316
et n° D 09-14.667 JONCTION

LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

I-Sur le pourvoi n° X 09-14. 316 formé par la société Philips France, dont le siège est 33 rue de Verdun, 92150 Suresnes,

contre l'arrêt (n° RG 2008. 11907) rendu le 29 avril 2009 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section H), dans le litige l'opposant :

1°/ au ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, 59 boulevard Vincent Auriol, 75013 Paris,

2°/ au président de l'autorité de la concurrence, 11 rue de l'Echelle, 75001 Paris,

3°/ à la société Avantage enseigne TVHA, société à responsabilité limitée, dont le siège est 24 rue Docteur Mazet, 38000 Grenoble,

4°/ à M. Joseph X..., domicilié..., 38000 Grenoble (Aide juridictionnelle totale, Décision du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation du 11 août 2009),

5°/ à l'association FO consommateurs, dont le siège est 141 avenue du Maine, 75014 Paris,

6°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, 4 boulevard du Palais, 75001 Paris,

7°/ à la société Sony France, société anonyme, dont le siège est 20-26 rue Morel, 92110 Clichy-la-Garenne,

défendeurs à la cassation ;

II-Sur le pourvoi n° D 09-14. 667 formé par la société Sony France,

contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant :

1°/ au ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi,

2°/ au président de l'autorité de la concurrence,

défendeurs à la cassation ;

La société Philips France, demanderesse au pourvoi n° X 09-14. 316 et la société Sony France, demanderesse au pourvoi n° D 09-14. 667 se sont pourvues en cassation contre un arrêt rendu le 19 juin 2007 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section H) ;

La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a ordonné la jonction des deux pourvois et cassé le 3 juin 2008 l'arrêt rendu le 19 juin 2007 ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée qui a statué par arrêt du 29 avril 2009 dans le même sens que l'arrêt du 19 juin 2007 par des motifs qui sont en opposition avec la doctrine de l'arrêt de cassation ;

Deux pourvois ayant été formés contre l'arrêt rendu le 29 avril 2009, le premier président, par deux ordonnances en date du 24 février 2010, a renvoyé la cause et les parties devant l'assemblée plénière ;

La demanderesse au pourvoi n° X 09-14. 316 invoque devant l'assemblée plénière les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Ces moyens ont été formulés dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Philips France ;

La demanderesse au pourvoi n° D 09-14. 667 invoque devant l'assemblée plénière les moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Ces moyens ont été formulés dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Thomas-Raquin et Benabent, avocat de la société Sony France ;

Des observations complémentaires en demande ont été déposées pour la société Sony France par la SCP Hémery et Thomas-Raquin ;

Des observations et des observations complémentaires en défense ont été déposées dans les deux pourvois par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de l'autorité de la concurrence ;

Le rapport écrit de M. Bargue, conseiller, et l'avis écrit de Mme Petit, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 17 décembre 2010, où étaient présents : M. Lamanda, premier président, Mme Collomp, MM. Lacabarats, Louvel, Charruault, Loriferne, présidents, Mme Pinot, conseiller remplaçant Mme Favre président empêché, M. Bargue, conseiller rapporteur, M. Cachelot, Mmes Mazars, Ponroy, MM. Pluyette, Dulin, Breillat, Albertini, Linden, Grellier, Fournier, Mme Jacques, conseillers, Mme Petit, premier avocat général, Mme Tardi, directeur de greffe ;

Sur le rapport de M. Bargue, conseiller, assisté de M. Barbier, greffier en chef au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Hémery et Thomas-Raquin, la SCP Baraduc et Duhamel, l'avis de Mme Petit, premier avocat général, tendant au rejet du pourvoi, auquel parmi les parties invitées à le faire, la SCP Célice, Blancpain et Soltner a répliqué, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à la société Philips France du désistement partiel de son pourvoi à l'égard de la société Avantage-TVHA, de M. X..., de l'association FO consommateurs et de la société Sony France ;

Joint les pourvois n° X 09-14. 316 et D 09-14. 667 qui sont connexes ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi formé par la société Sony et le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, du pourvoi formé par la société Philips, réunis :

Vu l'article 9 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le principe de loyauté dans l'administration de la preuve ;

Attendu que, sauf disposition expresse contraire du code de commerce, les règles du code de procédure civile s'appliquent au contentieux des pratiques anticoncurrentielles relevant de l'Autorité de la concurrence ; que l'enregistrement d'une communication téléphonique réalisé à l'insu de l'auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, 3 juin 2008, Bull. 2008, IV, n° 112), que la société Avantage-TVHA a saisi le Conseil de la concurrence (devenu l'Autorité de la concurrence), de pratiques qu'elle estimait anticoncurrentielles sur le marché des produits d'électronique grand public, en produisant des cassettes contenant des enregistrements téléphoniques mettant en cause les sociétés Philips France et Sony France ; que ces sociétés ont demandé au Conseil de la concurrence d'écarter ces enregistrements au motif qu'ils avaient été obtenus de façon déloyale ;

Attendu que pour rejeter leur recours formé contre la décision du Conseil de la concurrence qui a prononcé une sanction pécuniaire à leur encontre, l'arrêt retient que les dispositions du code de procédure civile, qui ont essentiellement pour objet de définir les conditions dans lesquelles une partie peut obtenir du juge une décision sur le bien-fondé d'une prétention dirigée contre une autre partie et reposant sur la reconnaissance d'un droit subjectif, ne s'appliquent pas à la procédure suivie devant le Conseil de la concurrence qui, dans le cadre de sa mission de protection de l'ordre public économique, exerce des poursuites à fins répressives le conduisant à prononcer des sanctions punitives ; qu'il retient encore que, devant le Conseil de la concurrence, l'admissibilité d'un élément de preuve recueilli dans des conditions contestées doit s'apprécier au regard des fins poursuivies, de la situation particulière et des droits des parties auxquelles cet élément de preuve est opposé ; qu'il ajoute enfin que si les enregistrements opérés ont constitué un procédé déloyal à l'égard de ceux dont les propos ont été insidieusement captés, ils ne doivent pas pour autant être écartés du débat et ainsi privés de toute vertu probante par la seule application d'un principe énoncé abstraitement, mais seulement s'il est avéré que la production de ces éléments a concrètement porté atteinte au droit à un procès équitable, au principe de la contradiction et aux droits de la défense de ceux auxquels ils sont opposés ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Philips France ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en assemblée plénière, et prononcé par le premier président en son audience publique du sept janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° X 09-14. 316 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Philips France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

– sur la loyauté des preuves –

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté le recours formé par la société PHILIPS FRANCE contre une décision n° 05- D-66 du conseil de la concurrence, en date du 5 décembre 2005, qui a dit que cette société avait enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce et lui a infligé une sanction pécuniaire de 16 millions d'euros ;

AUX MOTIFS QUE la société Avantage a produit au soutien de sa saisine du Conseil des cassettes contenant les enregistrements de conversations que son responsable, M. X..., avait tenues avec les représentants de fournisseurs ou de grossistes avec lesquels il était entré en relation, accompagnées de leur transcription ; Que, le Conseil ayant refusé d'écarter ces enregistrements bien qu'il fût soutenu qu'ils avaient été obtenus de façon déloyale pour avoir été recueillis à l'insu des interlocuteurs de M. X..., les requérantes lui font le grief d'une erreur de droit en ce qu'il a refusé d'appliquer le principe général de la loyauté de la preuve et a rattaché les règles de preuve de la procédure suivie devant lui à celles de la procédure pénale ; Que...

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