Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 27 octobre 1997, 96-83.698, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Culié
Case OutcomeRejet
CounselGeorges et Thouvenin,la SCP Piwnica et Molinié,la SCP Waquet,Farge et Hazan,M. Cossa.,la SCP Masse-Dessen
Docket Number96-83698
Date27 octobre 1997
CitationCONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1997-02-06, Bulletin criminel 1997, n° 48, p. 148 (cassation). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1995-11-09, Bulletin criminel 1995, n° 346, p. 1003 (irrecevabilité et rejet). CONFER : (3°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1986-11-17, Bulletin criminel 1986, n° 342, p. 875 (rejet). CONFER : (4°). (4) Cf. Chambre criminelle, 1992-04-22, Bulletin criminel 1992, n° 169, p. 441 (rejet) ; Chambre criminelle, 1996-01-11, Bulletin criminel 1996, n° 21, p. 51 (rejet) ; Chambre criminelle, 1997-02-06, Bulletin criminel 1997, n° 48, p. 148 (cassation).
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin criminel 1997 N° 352 p. 1169

I. REJET des pourvois formés par :

- X... Alain, Y... Jean-Louis, Z... Frédéric, A... Louis, B... Jean-Jacques, prévenus,

II. CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :

- l'Union fédérale des consommateurs (UFC) " Que Choisir ", partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 9 juillet 1996, qui a condamné Alain X..., pour complicité d'abus de biens sociaux, recels d'abus de biens sociaux, corruption passive et subornation de témoin, à 5 ans d'emprisonnement, dont 1 an avec sursis, avec mandat d'arrêt, 400 000 francs d'amende, 5 ans d'interdiction du droit de vote et d'éligibilité, Jean-Louis Y..., pour abus de biens sociaux, recels d'abus de biens sociaux, complicité de corruption et subornation de témoins, à 4 ans d'emprisonnement, dont 1 an avec sursis, 400 000 francs d'amende et 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, Frédéric Z..., pour recel d'abus de biens sociaux, à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 60 000 francs d'amende, Louis A..., pour abus de biens sociaux, à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 60 000 francs d'amende, Jean-Jacques B..., pour complicité d'abus de biens sociaux et corruption active, à 3 ans d'emprisonnement, dont 2 ans avec sursis, et 400 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires ampliatifs, complémentaires et en défense produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la fin de l'année 1985 Alain X..., maire de la ville de Grenoble depuis 1983, qui projetait de concéder le service des eaux de cette ville, a indiqué à Marc-Michel C... que, s'il voulait que le groupe qu'il dirigeait fût retenu dans la compétition qui allait s'ouvrir, il devrait acheter et mettre à sa disposition un appartement à Paris ; que, le 14 janvier 1986, le groupe C... a acquis pour la somme de 5 000 000 francs, outre 1 000 000 francs de travaux et de mobilier, un appartement de 280 m2, sis... à Paris, qui, sous le couvert d'un bail consenti à l'association " Modernité Régionale ", a été occupé de 1986 à 1988 par Alain X..., devenu ministre de l'Environnement, et par son chargé de mission et homme de confiance, Jean-Louis Y..., en laissant des loyers impayés d'un montant de 726 800 francs ;

Qu'en septembre 1987, Alain X..., qui venait de bénéficier, du 8 au 23 août 1987, d'une croisière en Méditerranée avec sa famille, à bord d'une goélette louée pour la circonstance par le groupe C..., au prix de 170 784 francs, a fait connaître à Marc-Michel C... qu'en contrepartie de la concession du service des eaux de Grenoble au groupe C... et à la société Lyonnaise des Eaux, il désirait que la propriété de l'appartement du... lui fût transférée ;

Que le projet de concession a été arrêté dans son principe entre les partenaires, au cours d'un déjeuner pris le 3 octobre 1987 au Conseil général de l'Isère, en présence notamment de Jean-Louis Y... et de Jean-Jacques B..., directeur commercial et directeur de l'eau pour la France de la Lyonnaise des Eaux, puis reporté après les élections municipales de mars 1989, la décision de délégation pour une durée de 25 ans à la société Cogese, filiale commune du groupe C... et de la Lyonnaise des Eaux, du service des eaux de la ville de Grenoble ayant été finalement signée par le maire de la ville le 3 novembre 1989 ;

Attendu que, selon l'arrêt attaqué, le 23 juin 1988, la société anonyme Whip a été constituée entre Jean-Louis Y..., des membres de sa famille et des proches d'Alain X... ; que cette " société écran ", dirigée en fait par Jean-Louis Y..., a acheté le 19 décembre 1988, pour la somme de 7 000 000 francs, l'appartement du... à Paris ; que, pour financer cette acquisition et prendre en charge les salaires des collaborateurs de l'équipe parisienne d'Alain X..., la société Whip a facturé, de 1988 à 1993, des honoraires fictifs de 9 373 060 francs à des sociétés du groupe C... et de 2 220 000 francs à la Lyonnaise des Eaux ; qu'en outre, le groupe C... a, en 1987 et 1988, supporté 250 000 francs d'honoraires non causés du cabinet d'avocat de Jean-Louis Y..., ainsi que les frais d'un voyage en Australie d'un coût de 137 690 francs, effectué par ce dernier, avec un ami, du 23 décembre 1988 au 8 janvier 1989 ;

Que le groupe C..., pour s'attirer les faveurs d'Alain X..., a pris en charge, dès 1984 et jusqu'au mois d'avril 1993, date à laquelle il est devenu ministre de la Communication, le coût de 122 voyages en avions-taxis de la compagnie Sinair, d'un montant de 2 200 000 francs ;

Attendu qu'il ressort encore des énonciations de l'arrêt attaqué que, dans la perspective des élections municipales de mars 1989 et à l'initiative d'Alain X..., ont été constituées, à partir du 4 juillet 1988, trois sociétés anonymes Holding Dauphiné News, Dauphiné News et News Gratuit, afin de diffuser des publications quotidiennes ou périodiques favorables à la réélection du maire de Grenoble et de promouvoir son image ; que, devant les déficits de ce groupe de presse, dirigé en fait par Alain X..., et pour éviter un dépôt de bilan, Jean-Jacques B... a accepté de faire racheter pour 0 franc la holding Dauphiné News par la société Serecom, filiale de la société Serepi, elle-même filiale de la société Lyonnaise des Eaux, associée de la société Cogese et de faire régler par elle-même, entre janvier et septembre 1990, son passif s'élevant à 5 260 000 francs ; qu'au total, les prélèvements opérés au profit de la holding Dauphiné News, sur instructions de Jean-Jacques B..., par Louis A..., directeur de la société Lyonnaise des Eaux pour la région Rhône Alpes et président des sociétés Serepi et Serecom, se sont élevés à 5 770 702 francs ;

En cet état,

I. Sur le pourvoi de Frédéric Z... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II. Sur les pourvois des autres demandeurs :

Sur le premier moyen de cassation proposé pour Jean-Louis Y..., pris de la violation des articles 162, 166, 174, 175, 179, 591 et 593 du Code de procédure pénale, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité tirée de l'irrégularité des deux rapports d'expertise déposés les 15 et 29 décembre 1994 établis avec la participation d'intervenants extérieurs sans désignation préalable du magistrat instructeur ;

" aux motifs que les prévenus avaient connaissance, dès le dépôt des rapports d'expertise, que l'expert missionné avait fait appel à un correspondant bruxellois de son cabinet selon une mention figurant en page 56 du rapport coté D 693 ; qu'ils n'ont pas sollicité que soit prononcée la nullité de cette expertise in limine litis bien qu'ils aient eu connaissance des vices allégués lors de l'audience du tribunal et n'ont pas déposé de conclusions à cette audience et sont donc irrecevables à présenter une telle demande devant la Cour ; que, si l'expert doit accomplir personnellement la mission qui lui est confiée, cette exigence ne l'empêche pas d'utiliser le concours de personnes non désignées comme expert pour des interventions qui ne comportent aucune appréciation à formuler ; qu'il ne peut être reproché à l'expert d'avoir eu recours à son collaborateur, dès lors où celui-ci n'a pas accompli des tâches relevant de la compétence de l'expert ; qu'en tout état de cause, en vertu de l'article 179 du Code de procédure pénale, l'ordonnance de renvoi lorsqu'elle est devenue définitive, couvre, s'il en existe, les vices de la procédure ; que l'article 174 du Code précité ne déroge pas à cette disposition ;

" alors, qu'après avoir déclaré irrecevable comme tardive, l'exception de nullité dirigée contre le rapport d'expertise établi avec la participation d'un intervenant extérieur, non désigné par le magistrat instructeur, les juges d'appel ne pouvaient, sans se contredire, déclarer régulières les opérations d'expertise ; que le collaborateur de l'expert n'avait accompli aucune des tâches relevant de la compétence de l'expert, celui-ci ayant attesté avoir personnellement conduit sa mission ; que la décision est ainsi privée de toute base légale ;

Attendu que, l'affaire ayant été renvoyée devant les juges par la juridiction d'instruction, l'exception tirée par Jean-Louis Y..., en cause d'appel, d'une prétendue nullité des expertises comptables ordonnées dans la procédure antérieure, était irrecevable en application des articles 179, alinéa 5, et 385, alinéa 1er, du Code de procédure pénale ;

Que, si la cour d'appel, après avoir énoncé que l'exception était irrecevable, a cru devoir y répondre pour la rejeter, le moyen qui reprend cette exception est lui-même irrecevable ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour Alain X..., pris de la violation des articles 6. 3 d de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 509, 513 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'audition de Jérôme D..., présentée par Alain X... ;

" aux motifs que Jérôme D... a été entendu, en qualité de témoin, au cours de l'information et devant le tribunal correctionnel à la requête, non d'Alain X..., mais de Jean-Jacques B... et de Louis A... ; qu'à la lecture des notes d'audience, il n'apparaît pas qu'Alain X... ou ses conseils lui aient posé des questions ; qu'une nouvelle audition de ce témoin n'apparaît pas utile à la manifestation de la vérité ;

" alors qu'aux termes de l'article 6. 3 d de la Convention européenne des droits de l'homme, tout accusé a droit à obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à charge et à décharge ; qu'en outre, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel se trouve saisie de toute l'affaire jugée en première instance qu'elle doit examiner à nouveau complètement, notamment, en ordonnant l'audition de témoins pour établir la vérité ; que, par conséquent, en l'espèce, la cour d'appel...

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