Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 12-20.157, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Lacabarats
ECLIECLI:FR:CCASS:2013:SO01588
Case OutcomeCassation partielle sans renvoi
CitationSur le n° 1 : Sur la compétence du conseil de prud'hommes pour connaître de la demande d'indemnisation du préjudice spécifique d'anxiété du salarié admis au bénéfice du dispositif ACAATA, à rapprocher :Soc., 25 septembre 2013, pourvoi n° 12-12.883, Bull. 2013, V, n° 208 (cassation partielle sans renvoi). Sur le n° 2 : Sur la délimitation des compétences respectives du conseil de prud'hommes et du tribunal des affaires de sécurité sociale, à rapprocher :Soc., 25 septembre 2013, pourvoi n° 12-12.883, Bull. 2013, V, n° 208 (cassation partielle sans renvoi), et l'arrêt cité. Sur le n° 3 : Sur la définition du préjudice d'anxiété, à rapprocher :Soc., 11 mai 2010, pourvoi n° 09-42.241, Bull. 2010, V, n° 106 (cassation partielle). Sur l'impossibilité d'indemniser un salarié bénéficiaire de l'ACAATA, d'une part du préjudice d'anxiété, d'autre part, d'un préjudice en lien avec le bouleversement des conditions d'existence, à rapprocher :Soc., 25 septembre 2013, pourvoi n° 12-12.110, Bull. 2013, V, n° 201 (rejet)
Date25 septembre 2013
Appeal Number51301588
CounselSCP Célice,Blancpain et Soltner,SCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray
Docket Number12-20157
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2013, V, n° 209

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et quatre autres salariés de la société Babcock Wanson (la société) ont présenté leur démission pour prétendre au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) en application de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir la condamnation de la société à leur verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts réparant leur préjudice économique, ainsi qu'un préjudice d'anxiété résultant de leur exposition à l'amiante ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une somme en réparation du préjudice résultant de son exposition à l'amiante, subi par M. Y..., alors, selon le moyen :

1°/ que le « trouble dans les conditions d'existence » est un préjudice consécutif à un dommage corporel handicapant et causé par lui, de sorte qu'en allouant à M. Y... une indemnisation correspondant à la « période antérieure » au déclenchement de sa maladie, la cour d'Agen a violé l'article 1147 du code civil et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

2°/ que constatant que le tribunal des affaires de sécurité sociale avait débouté M. Y... de sa demande en faute inexcusable dirigée contre la société Babcock Wanson, la cour d'appel, saisie d'une nouvelle action en droit commun, ne pouvait sans violer l'article L. 451 du code de la sécurité sociale décider à l'encontre du même employeur qu'une telle décision « n'interdit pas à la juridiction prud'homale de constater d'une part l'exposition du salarié au risque d'inhalation des poussières d'amiante et le manquement à son obligation de sécurité de résultat » ;

3°/ que dès lors qu'un employeur a été condamné à réparer, dans les termes de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale qui comprend l'indemnisation des « souffrances morales », le dommage consécutif à une exposition à un produit toxique, dont il est l'auteur direct, le juge ne saurait, sans organiser un cumul d'indemnisation, condamner un autre employeur en raison de la simple exposition au même risque dont la réalisation ne lui est pas imputable ; qu'en mettant à la charge de la société Babcock Wanson une indemnité de 1 000 euros pour trouble dans les conditions d'existence tout en relevant que M. Y... devait obtenir de la Société générale de Fonderie la pleine indemnisation du préjudice résultant du déclenchement d'une maladie liée au même risque, la cour d'appel est entrée dans une double réparation en violation, ensemble des articles L. 452-1, L. 452-3 du code de la sécurité sociale et du principe de la responsabilité intégrale sans perte ni profit pour la victime ;

Mais attendu que la déclaration de la maladie et le contentieux auquel elle a donné lieu ne privent pas le salarié du droit de demander à la juridiction prud'homale la réparation des conséquences du trouble psychologique, compris dans le préjudice d'anxiété, subi avant la déclaration de la maladie ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de diverses sommes en réparation d'un préjudice d'anxiété et du bouleversement dans les conditions d'existence subis par MM. X..., Z..., A... et B..., alors, selon le moyen :

1°/ que tant le conseil des prud'hommes que la cour d'Agen ont relevé que la société Babcock Wanson avait contesté le droit à indemnisation des prétendues victimes en l'absence de tout « état pathologique constaté » et en l'absence de toute « preuve médicale » ; que de surcroît l'exposante faisait valoir que le risque d'anxiété dans la population concernée s'avérait inférieur à 3 % et pouvait, en ce cas, être « médicalement pris en charge » ; qu'en se contentant d'affirmer que tous les demandeurs seraient recevables à invoquer « une situation d'inquiétude permanente » caractérisant un préjudice d'anxiété et une impossibilité invalidante d'envisager l'avenir, sans répondre au moyen fondé sur la nécessité d'établir médicalement le trouble psycho-social invoqué, la cour d'Agen a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en imputant à une faute de l'employeur une « forte inquiétude » permanente de nature à entraîner « une modification dans les conditions d'existence » et en caractérisant l'ampleur de ces troubles psychiques consécutifs à l'activité professionnelle par des indemnités atteignant respectivement 5 000 et 3 000 euros, la cour d'Agen, qui déclare par ailleurs que les « salariés appelants ne sont pas malades », prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 451-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale et, par fausse application, 1147 du code civil ;

3°/ que l'anxiété consécutive à une prétendue exposition à des agents nocifs, dans le cadre de l'exécution d'un contrat de travail constitue une maladie d'origine professionnelle hors tableau et doit, comme telle, relever du contrôle des organismes gestionnaires du risque de maladie professionnelle prévus par les articles L. 461-1 et D. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; que de surcroît, ce trouble psychique doit, en vertu de l'article L. 451-1 être porté au contentieux exclusivement devant les juridictions de sécurité sociale de sorte qu'en affirmant la recevabilité des demandes formées devant le juge prud'homal par les anciens salariés de Babcock, et en constatant, par elle-même, l'existence de l'anxiété perturbatrice affectant les travailleurs, en en appréciant l'importance chez chacun d'eux et en évaluant la réparation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ainsi que l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant constaté que les quatre requérants n'avaient pas déclaré souffrir d'une maladie professionnelle causée par l'amiante et que n'étaient contestés ni leur droit à bénéficier de l'ACAATA, ni son montant, la cour d'appel en a exactement déduit que leurs demandes indemnitaires fondées sur le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat relevaient de la compétence de la juridiction prud'homale ;

Et attendu, ensuite, que, répondant aux conclusions prétendument délaissées, la cour d'appel, qui a relevé que les salariés, qui avaient travaillé dans un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi de 1998 et figurant sur une liste...

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