Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 mai 2014, 12-26.705 12-26.970 12-29.281, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Espel
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:CO00492
Case OutcomeRejet
Appeal Number41400492
CitationSur le n° 1 : Sur la nature de la responsabilité au regard du droit interne, dans le même sens que :Com., 6 février 2007, pourvoi n° 04-13.178, Bull. 2007, IV, n° 21 (cassation) ; Com., 13 janvier 2009, pourvoi n° 08-13.971, Bull. 2009, IV, n° 3 (cassation) ;Com., 18 janvier 2011, pourvoi n° 10-11.885, Bull. 2011, IV, n° 9 (cassation)
Date20 mai 2014
CounselSCP Bénabent et Jéhannin,SCP Piwnica et Molinié
Docket Number12-26705,12-26970,12-29281
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2014, IV, n° 90

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° A 12-26. 705, P 12-26. 970 et A 12-29. 281 respectivement formés par la société Hunter Douglas Belgium Helioscreen, par les sociétés Chavanoz industries et Porcher industries et par la société Mermet industries, M. C..., pris en qualité de mandataire judiciaire de cette société et la société AJ Partenaires représentée par M. Sapin, pris en qualité d'administrateur judiciaire de la même société, qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 6 septembre 2012), que la société Porcher industries (la société Porcher), spécialisée dans la production de fils technologiques, entretenait des relations commerciales soit directement, soit par le canal de sa filiale la société Chavanoz industries (la société Chavanoz), avec les prédécesseurs de la société XL Screen aux droits de laquelle vient la société Mermet industries (la société Mermet), ainsi qu'avec la société Hunter Douglas Belgium Helioscreen (la société Helioscreen) appartenant l'une et l'autre au groupe Hunter Douglas NV de droit néerlandais ; que ces relations commerciales ont abouti, les 19 juillet et 22 juin 2006, à la signature d'un contrat d'approvisionnement à long terme en fils de verre enduit de référence 165 Tex avec chacune des deux sociétés ; que ces deux contrats avaient pour terme le 31 décembre 2008, le contrat conclu avec la société XL Screen contenant cependant une clause de tacite reconduction sauf préavis notifié deux mois avant le terme contractuel ; qu'entre-temps, courant 2005, la société Mermet industries, également spécialisée dans la production de fils technologiques, avait été rachetée par le groupe Hunter Douglas, dont l'objectif était de parvenir à une intégration verticale de sa production ; que la société XL Screen ayant dénoncé son contrat par lettre du 26 février 2009, et la société Helioscreen ayant confirmé par lettre du 27 mars 2009 la cessation de toute commande au titre de l'année 2009, les sociétés Chavanoz et Porcher les ont assignées en responsabilité, la première pour résiliation fautive et la seconde pour rupture brutale des relations commerciales ; qu'elles ont également reproché à la société Hunter Douglas NV son immixtion fautive dans les relations commerciales de ses filiales et demandé sa condamnation in solidum à réparer leurs préjudices ; que les société XL Screen, Helioscreen et Hunter Douglas NV se sont prévalues du caractère restrictif de concurrence des contrats litigieux au regard des dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 81 et 82 du traité CE devenus les articles 101 et 102 TFUE et ont reconventionnellement demandé que soit prononcée leur nullité ; que la société Mermet ayant été déclarée en redressement judiciaire en cours d'instance, M. C... et la société AJ Partenaires ont été désignés respectivement mandataire et administrateur judiciaires ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° A 12-26. 705 :

Attendu que la société Helioscreen fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Chavanoz une certaine somme au titre de la rupture brutale de leurs relations commerciales, alors, selon le moyen :

1°/ que la forme d'un acte juridique est régie par la loi du lieu où il est accompli ; qu'il s'en déduit que les conditions de forme de la rupture d'une relation commerciale établie sont régies par la loi du lieu de sa dénonciation ; qu'en retenant, pour refuser d'appliquer la loi néerlandaise aux conditions de forme de la rupture de la relation commerciale entre les sociétés Helioscreen et Chavanoz, bien que la société Chavanoz ait été informée par son partenaire commercial de la cessation progressive des approvisionnements en fil de fibre de verre ignifugé lors d'une réunion tenue à Schiphol aux Pays-Bas le 7 septembre 2005, que le litige ne portait pas sur le droit de rompre la relation commerciale mais sur la faute résultant de la rupture brutale d'une relation commerciale établie avec un fournisseur dont l'activité se situe en France, lieu du dommage, dont la loi exige un préavis écrit, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil et la règle locus regit actum ;

2°/ que l'existence d'une relation commerciale établie suppose, d'une part, que la relation commerciale revêtait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et, d'autre part, que la partie victime de l'interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial ; que la cour d'appel a constaté, d'une part, qu'il résultait du courriel du 6 octobre 2005 émanant du groupe Porcher qu'il était informé depuis la réunion du 7 septembre 2005 de ce que la société Helioscreen cesserait progressivement ses approvisionnements en fil de fibre de verre ignifugé auprès de la société Chavanoz et, d'autre part, que la stratégie d'intégration verticale de la société Helioscreen était connue de tous les acteurs du marché, ce dont il se déduisait que la société Chavanoz ne pouvait raisonnablement anticiper, en décembre 2008, un maintien du flux d'affaires ; qu'en retenant, pour affirmer néanmoins l'existence d'une relation commerciale établie entre les sociétés Helioscreen et Chavanoz, que le flux d'affaires était ancien et suivi, que le volume des commandes avait augmenté entre 2006 et 2008 et que des négociations avaient eu lieu à propos d'approvisionnements ultérieurs, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et violé l'article L. 442-6- I, 5° du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels, engage, en vertu de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, la responsabilité délictuelle de son auteur, l'exigence d'un préavis écrit prévue par ce texte constituant une règle de fond ; qu'ayant retenu que l'activité du fournisseur se situait en France, lieu du dommage résultant de la brutalité de la rupture, de sorte que les sociétés Chavanoz et Porcher étaient bien fondées à solliciter l'application de la loi française, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé par une appréciation souveraine des pièces produites que les sociétés Chavanoz et Porcher, d'un côté, Helioscreen et sa holding, de l'autre, ont discuté jusqu'en 2009 de la quantité des achats et des prix comme le démontrent leurs échanges et la conclusion du contrat d'approvisionnement dont le terme était le 31 décembre 2008, puis leurs discussions pour poursuivre une relation commerciale jusqu'en 2010, l'arrêt retient que ces éléments de fait ne caractérisent pas une volonté ferme et définitive de mettre fin à la relation commerciale, notifiée au fournisseur, lequel était fondé à croire que celle-ci continuerait, d'autant plus que les volumes commandés entre 2006 et 2008 avaient augmenté, ce en dépit de la stratégie du groupe Hunter Douglas qui, connue de tous les acteurs du marché, était de poursuivre une stratégie d'intégration verticale avec le rachat de la société Mermet et de sa filiale XS Screen ; qu'ayant ainsi fait ressortir que les sociétés Chavanoz et Porcher étaient fondées à croire en la poursuite des relations commerciales entretenues avec leur client, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le second moyen du même pourvoi :

Attendu que la société Helioscreen fait le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen, que la société Helioscreen exposait, en cause d'appel, que les sociétés Porcher et Chavanoz ne justifiaient pas le taux de marge particulièrement élevé sur lequel elles fondaient l'évaluation du préjudice de la société Chavanoz ; qu'elle soutenait, d'une part, que la pièce n° 25 était « illisible » et « truffée d'erreurs de référence qui se traduisent par des " trous " » dans la colonne relative à la marge et, d'autre part, que la pièce n° 42 était lacunaire et non conforme, en la forme et au fond, aux exigences de « la norme NEP-9030 applicable aux attestations entrant dans le cadre des diligences directement liées à la mission de commissaires aux comptes » ; que la cour d'appel, qui a évalué le prétendu préjudice de la société Chavanoz sans répondre à ces chefs de conclusions pertinents, précisant même qu'elle n'entendait pas répondre aux critiques adressées à la pièce n° 42, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; Mais attendu que l'arrêt retient que le caractère relativement élevé de la marge bénéficiaire réalisée sur le produit en cause ressort de tous les documents fournis au débat ; que le moyen, qui ne tend qu'à remettre en cause l'évaluation souveraine, par les juges du fond, du préjudice résultant de la brutalité de la rupture, ne peut être accueilli ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° P 12-26. 970 :

Attendu que les sociétés Chavanoz et Porcher font grief à l'arrêt d'avoir mis hors de cause la société Hunter Douglas NV, alors, selon le moyen, que l'agent qui ordonne à une personne placée sous son autorité de commettre un manquement à ses obligations légales ou contractuelles commet lui-même une faute engageant sa propre responsabilité ; qu'en conséquence, doit être condamnée in solidum la société-mère qui ordonne à ses filiales de rompre brutalement leurs relations en méconnaissance de leurs obligations légales ou contractuelles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'en cessant brutalement toute commande auprès de la société Chavanoz, la société Helioscreen a méconnu l'exigence de préavis raisonnable prévue par l'article L. 442-6 du code de commerce ; qu'elle a...

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