Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 15 janvier 2014, 12-27.261 12-27.262 12-27.263 12-27.266 12-27.267 12-27.268 12-27.283, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:SO00097
Case OutcomeRejet
Docket Number12-27263,12-27266,12-27262,12-27283,12-27268,12-27267,12-27261
Date15 janvier 2014
Appeal Number51400097
CounselSCP Gatineau et Fattaccini,SCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray
CitationSur les règles de preuve en matière de discrimination, à rapprocher :Soc., 29 juin 2011, pourvoi n° 10-14.067 (arrêt n° 1) et pourvoi n° 10-15.792 (arrêt n° 2), Bull. 2011, V, n° 166 (cassation partielle et cassation).
Subject MatterPREUVE - Règles générales - Moyen de preuve - Rapport établi par un inspecteur ou un contrôleur du travail - Eléments de fait - Force probante - Détermination - Portée TRAVAIL REGLEMENTATION, CONTROLE DE L'APPLICATION DE LA LEGISLATION - Inspection du travail - Prérogatives et moyens d'intervention - Législation relative aux discriminations - Pouvoir de communication de documents ou d'informations - Production en justice du rapport établi par l'inspecteur ou le contrôleur du travail - Validité - Fondement - Détermination - Portée
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2014, V, n° 14

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Liebherr France de son désistement partiel de la deuxième branche des premier, septième et huitième moyens de son pourvoi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 12-27. 261, F 12-27. 262, H 12-27. 263, K 12-27. 266, M 12-27. 267, N 12-27. 268 et D 12-27. 283 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Colmar, 13 septembre 2012), que MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C... et D..., qui ont été employés par la société Liebherr France, ont saisi la juridiction prud'homale de demandes pour discrimination syndicale ;

Sur les premier, septième et huitième moyens du pourvoi de l'employeur, pris en leur première branche :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que les salariés ont été victimes d'une discrimination à raison de leur activité syndicale et de la condamner à leur payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts à ce titre, alors, selon le moyen, que le juge ne peut se fonder exclusivement sur un rapport d'enquête réalisée à la demande de l'une des parties ; qu'en l'espèce, pour dire que les salariés avaient subi une discrimination en raison de leur engagement syndical, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur le rapport d'enquête établi par l'inspection du travail sur sollicitation des salariés ; qu'en statuant ainsi, sur la seule base d'un rapport établi à la demande d'une des parties, la cour d'appel a violé l'article 455 du code du travail ;

Mais attendu qu'il appartient au salarié, qui invoque un retard de carrière discriminatoire, de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; qu'au nombre de ces éléments peut figurer un rapport établi par un inspecteur ou un contrôleur du travail eu égard aux compétences reconnues aux corps de l'inspection du travail, notamment par les articles L. 8112-1 et L. 8112-2 du code du travail, aux prérogatives qui leur sont reconnues par l'article L. 8113-5 du même code et aux garanties d'indépendance dont bénéficient leurs membres dans l'exercice de leurs fonctions, peu important que l'agent de contrôle soit intervenu à la demande de l'une des parties et n'ait pas relevé par un procès-verbal les infractions éventuellement constatées ;

Et attendu qu'après avoir examiné contradictoirement l'ensemble des éléments de fait relevés par l'inspecteur du travail dans son rapport produit à l'appui de leurs demandes par les salariés, la cour d'appel, qui a constaté que ces éléments, dont elle a vérifié la pertinence, laissaient présumer l'existence d'une discrimination puis relevé que l'employeur n'établissait pas que les différences de traitement dont les intéressés avaient fait l'objet étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, n'encourt pas les griefs du moyen ;

Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, les deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième moyens, le septième moyen, pris en sa troisième à douzième branches et le huitième moyen, pris en sa troisième à onzième branches réunis :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Liebherr France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Liebherr France à payer aux défendeurs la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits aux pourvois par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Liebherr France.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Relatif à l'ensemble des salariés défendeurs au pourvoi, à l'exception de Messieurs B... et D...

IL EST FAIT GRIEF à la décision attaquée d'AVOIR dit que les défendeurs avaient été victimes d'une discrimination à raison de leur activité syndicale, d'AVOIR condamné la SAS LIEBHERR FRANCE à leur payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour discrimination majorée des intérêts au taux légal à compter du jour de l'arrêt et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel et d'AVOIR condamné la SAS LIEBHERR FRANCE à supporter les dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QU'« Attendu qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, « aucune personne (...) ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de (...) rémunération, (...), classification, promotion professionnelle (...), en raison (...) de ses activités syndicales ou mutualistes... » ;
Attendu que l'article L. 1134-1 dispose qu'en cas de survenance d'un litige au sujet d'une discrimination invoquée par un salarié, celui-ci doit seulement présenter « des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte... », l'employeur devant, au vu de ces éléments, « prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination... » ;
Attendu en l'espèce que le salarié produit aux débats le rapport établi par le Directeur Adjoint du Travail rattaché à la Direction Régionale des Entreprises de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi d'Alsace, en date du 28 janvier 2011 ;
(...)
Attendu que ce panel de comparaison est pertinent, les salariés qui y ont été intégrés se trouvant dans une situation comparable caractérisée par des fonctions identiques ou proches reposant sur les mêmes formations et savoir-faire, d'une part, et une ancienneté similaire permettant des mises en parallèle significatives de leurs carrières respectives, d'autre part ;
(...)
Attendu dès lors qu'il convient de retenir le panel de comparaison établi par l'inspection du travail qui rassemble bien des salariés placés dans une situation comparable ;
(...)
Attendu que cette série d'éléments précis et concordants, pris ensemble, laisse présumer une discrimination directe à raison d'une activité syndicale » ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut se fonder exclusivement sur un rapport d'enquête réalisée à la demande de l'une des parties ; qu'en l'espèce, pour dire que les salariés avaient subi une discrimination en raison de leur engagement syndical, la Cour d'appel s'est exclusivement fondée sur le rapport d'enquête établi par l'inspection du travail sur sollicitation des salariés ; qu'en statuant ainsi, sur la seule base d'un rapport établi à la demande d'une des parties, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code du travail ;

2°) ALORS en tout cas QU'est insuffisante à laisser supposer l'existence d'une discrimination syndicale, la seule production d'un rapport d'investigation de l'inspection du travail ayant conclu avec réserves que des salariés ont subi un retard de carrière et qu'une concomitance apparaît avec leur activité syndicale sans toutefois juger ces éléments suffisants pour donner lieu à un procès-verbal pour discrimination ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du Code du travail ;

3°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que dans son courrier en réponse au rapport de l'inspection un travail en date du 29 avril 2011, la société LIEBHERR FRANCE ne se bornait pas à contester la composition du panel proposé par l'inspection du travail mais critiquait aussi le champ de ses investigations en soulignant qu'il portait sur des périodes prescrites ne pouvant venir à l'appui d'une éventuelle discrimination ; qu'en se bornant à examiner les critiques formulées par la société LIEBHERR FRANCE dans son courrier du 29 avril 2011 relatives au panel de comparaison, sans examiner fut-ce sommairement, la partie du courrier faisant référence à la prescription de certains des faits retenus par l'inspecteur dans son rapport, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code du travail ;

4°) ALORS QU'en se bornant à retenir les panels établis par l'inspection du travail sans s'expliquer sur ceux établis par l'employeur qui étaient pourtant gage d'une analyse plus précise et plus significative en ce qu'ils intégraient le nouveau système de classification et de rémunération applicable au personnel ouvrier depuis novembre 2009 chez LIEBHERR FRANCE et mettaient en comparaison la situation des salariés avec celles des salariés occupant une fonction dont le coefficient de tenue de poste est comparable et disposant d'une ancienneté comparable à plus ou moins 5 ans, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Concerne le pourvoi auquel Monsieur X... est défendeur

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que Monsieur X... avait été victime d'une discrimination à raison de son activité syndicale, d'AVOIR condamné la SAS LIEBHERR FRANCE à lui payer la somme de 13. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour discrimination majorée des intérêts au taux légal à compter du jour de l'arrêt, la somme de 1000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR condamné la SAS LIEBHERR FRANCE à supporter les dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QU'« Attendu qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, « aucune personne (...) ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de (...) rémunération, (...), classification, promotion professionnelle (...), en raison (...) de ses activités syndicales ou mutualistes... » ;
Attendu que l'article L. 1134-1 dispose qu'en cas de survenance d'un litige au sujet...

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