Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 16 avril 2015, 14-12.244, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Batut
ECLIECLI:FR:CCASS:2015:C100468
Case OutcomeCassation
Date16 avril 2015
Docket Number14-12244
CounselSCP Spinosi et Sureau
Appeal Number11500468
CourtPremière Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2015, I, n° 98

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 16 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que, lors des débats devant la cour d'appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un membre de la chambre ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, sur l'action disciplinaire exercée par le ministère public conformément à l'article 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, M. X..., notaire associé, alors mis en examen pour faux et usage de faux en écriture publique et complicité d'escroquerie en bande organisée, a été condamné par le tribunal de grande instance à la peine disciplinaire d'interdiction temporaire pour une durée de dix mois ;

Attendu que l'arrêt mentionne que le président de la chambre régionale de discipline était représenté, selon pouvoir du 12 novembre 2013, par « Me Philippe E..., notaire à Marseille, » qui, « ayant mandat spécial de représenter le président du conseil régional de discipline des notaires de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a présenté ses observations » ;

Qu'en procédant ainsi, sans vérifier que ce mandataire spécial était membre de la chambre régionale de discipline, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Monsieur X... à dix mois d'interdiction temporaire et, précisant le jugement entrepris, d'avoir dit qu'il est coupable de diverses fautes disciplinaires commises entre 2004 et 2008 ;

Aux motifs que, « M. Philippe X..., né le 11 octobre 1960 à Marseille, a été nommé notaire en 1996. Il a exercé au sein de la société civile professionnelle P..., X... et Q..., notaires associés, titulaire d'un office ministériel à Marseille, devenue après le départ de M. P..., la société civile professionnelle X... et Q....
Il détient un tiers des parts de la société civile professionnelle.

En dehors des deux notaires associés, l'étude comprend deux notaires salariés M° Franck-Laurent Y... et M° François Z....

Le 15 mars 2012, M. le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille a fait assigner à jour fixe M. Philippe X... devant le tribunal de grande instance de Marseille statuant en matière disciplinaire, au visa de l'article 13 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973.

Par jugement en date du 24 juin 2013, le tribunal de grande instance de Marseille a, au visa des articles 1, 2, 3, 5, 6-1, 10, 20, 23, 25 et 26 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945, des articles 3, 13, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 23 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973,
- prononcé à l'encontre de M° X..., notaire associé à la résidence de Marseille, une mesure d'interdiction temporaire de l'exercice de ses fonctions d'une durée de dix mois,
- désigné la SCP P...- X...- Q... en qualité d'administrateur provisoire.

Par déclaration de M° Christian MEJEAN, avocat au barreau de Marseille, au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 9 septembre 2013, M. Philippe X... a formé recours contre ce jugement.

L'affaire a été audiencée pour le 22 novembre 2013.

M. Philippe X... a été convoqué par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 15 octobre 2013 pour cette audience du 22 novembre 2013.

Les débats se sont déroulés le 22 novembre 2013 en audience en chambre du conseil, M. Philippe X..., interrogé sur ce point, ayant précisé qu'il ne demandait pas que les débats se déroulent en audience publique.

L'avis écrit du 20 novembre 2013 du Parquet Général, par lequel il demande la confirmation du jugement a été porté à la connaissance de M. X... et de son avocat par télécopie du 20 novembre 2013.

Aucune partie n'a demandé le renvoi de l'affaire.

M. Philippe X... a été entendu en ses explications orales à l'appui de son appel.

Me Christian MEJEAN, avocat, a soutenu oralement des conclusions écrites remises à la cour et au parquet général au début de l'audience le 22 novembre 2013. Il a demandé l'infirmation du jugement aux motifs que M. X... n'avait commis aucun manquement à ses obligations professionnelles et que la condamnation porterait atteinte à la présomption d'innocence eu égard au dossier pénal en cours.

M. l'avocat général a conclu oralement, sans dépôt de conclusions écrites, à la confirmation du jugement.

Me Philippe E..., notaire à Marseille, et ayant mandat spécial de représenter le président du conseil régional de discipline des notaires de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a présenté ses observations.

M. Philippe X... a eu de nouveau la parole en dernier.


I) Procédure

I-1) la recevabilité du recours

Le jugement a été prononcé le 2 septembre 2013.
L'appel a été formé par déclaration d'appel du 9 septembre 2013.

La recevabilité de cet appel n'est pas contestée. Cet appel est recevable.

1-2) l'acte de poursuite

L'assignation expose qu'une information judiciaire a été ouverte contre X devant le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Marseille sur réquisitoire introductif du procureur de la république de Marseille du 2 juin 2008, pour escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux, exercice illégal de l'activité d'intermédiaire en opérations de banque, que cette instruction a abouti à la mise en cause de responsables et commerciaux de la société Apollonia et que l'instruction a été étendue, par réquisitoires supplétifs successifs, jusqu'à une réquisition d'informer contre des notaires, dont M. Philippe X..., notaire à Marseille, lequel a été mis en examen le 15 janvier 2010 par le juge d'instruction de Marseille pour faux en écriture publique et usage de faux en écriture publique commis à Aix-en-Provence, Paris, Lyon, Marseille de 2002 à 2008, et complicité d'escroquerie commise en bande organisée durant la même période de temps ;

M. le procureur de la République estime qu'indépendamment des infractions pénales sur lesquelles il sera statué à terme par les juridictions pénales, M. Philippe X... a commis des infractions aux règles morales et professionnelles.

Les conclusions annexées à l'assignation exposent :
« Il ressort du dossier d'instruction que M° X... était seul parmi les associés à avoir traité depuis 2000 ou 2003 les programmes confiés à l'étude par Apollonia (qui décidait donc du choix du notaire aux lieu et place non seulement des clients mais également des promoteurs vendeurs) ... M° X... avait dédié un service de l'étude à la gestion des dossiers apportés par Apollonia.
Après avoir réfuté être asservi aux exigences d'Apollonia, il n'en confirmait pas moins que cette société avait conçu (fautes d'orthographe comprises et jamais corrigées) le modèle de procuration (importé de M° G... où il avait transité) fixait d'autorité les rendez-vous avec les clients sans se préoccuper des disponibilités de l'étude, imposait les notaires (surtout M° G...) susceptibles de recevoir les procurations lorsque M° X..., chargé des actes d'un programme ou inversement et l'avait conduit à passer outre aux limites de la compétence territoriale d'attribution pourtant rappelées par la profession ... Jean A... avait enjoint à M° X... en septembre 2007 de remplacer Muriel B..., clerc affecté aux relations avec Apollonia... M° X..., tout en estimant que ce clerc était compétent, s'était exécuté au nom de la rentabilité de l'étude.
Cette rentabilité s'était traduite par la réception de 620 actes de vente sans que M° X... se révèle capable... de préciser le chiffre d'affaires résultant de l'activité induite par Apollonia, autrement qu'en avançant des pourcentages, soit 7 % en moyenne de 2004 à 2008 sauf en 2007 où le niveau avait atteint 20 %.
M° X... se résolvait... à constater diverses " malfaçons " altérant la sincérité des multiples procurations reçues par lui, ou, plus exactement, supposées telles.
Ainsi ratifiait il sous son nom les procurations (même celles reçues par ses clercs qui n'apparaissaient donc pas dans l'acte) " parce qu'on signait " ou encore " parce que logiquement ce document doit être parfait... et enfin parce qu'un notaire pouvait se contenter d'une simple " lecture en diagonale ".
Mais il croyait devoir les qualifier " d'erreurs " ou " d'omissions ", " non préméditées " ou encore " involontaires " et soutenait qu'elles n'avaient pas porté à conséquence préjudiciable puisque, précisait-il, le préjudice effectivement subi par les victimes n'était causé que par des faits extérieurs à...

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