Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 mars 2017, 15-21.183, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Frouin
ECLIECLI:FR:CCASS:2017:SO00547
CitationSur la cessation complète d'activité de l'employeur comme motif de licenciement économique, à rapprocher :Soc., 15 octobre 2002, pourvoi n° 01-46.240, Bull. 2002, V, n° 311 (1) (cassation partielle partiellement sans renvoi) ;Soc., 10 octobre 2006, pourvoi n° 04-43.453, Bull. 2006, V, n° 296 (2) (cassation) ;Soc., 18 janvier 2011, pourvoi n° 09-69.199, Bull. 2011, V, n° 23 (2) (rejet), et les arrêts cités
Case OutcomeRejet
Date23 mars 2017
Docket Number15-21183
CounselMe Rémy-Corlay,SCP Gatineau et Fattaccini,SCP Hémery et Thomas-Raquin
Appeal Number51700547
Subject MatterCONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Définition
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 mai 2015), que le 3 juin 1988, la chambre de commerce et d'industrie de Lyon, concessionnaire de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, a signé avec la société internationale des Hôtels Sofitel, filiale du groupe Accor, une convention d'exploitation de l'hôtel 4 étoiles implanté dans l'enceinte de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, l'exploitation de l'hôtel étant confiée à la société Marcq Hôtel, également filiale du groupe Accor ; que par acte sous seing privé des 25 juillet et 3 décembre 2005, la chambre de commerce et d'industrie de Lyon a accordé à la Compagnie foncière franco-suisse une autorisation d'occupation temporaire pour une parcelle dépendant du domaine public concédée en vue de la réalisation et de la gestion d'un ensemble immobilier comprenant un hôtel 4 étoiles NH Hoteles et des bureaux ; que la chambre de commerce et d'industrie de Lyon s'est engagée à résilier le contrat consenti au groupe Accor et autorisant ce dernier à exploiter l'hôtel à l'enseigne Sofitel ; que par convention du 3 juillet 2006, la Compagnie financière franco-suisse, en sa qualité d'occupant principal, a conféré à la société NH Hôtel Rallye une sous-occupation précaire de l'immeuble à usage d'hôtel qu'elle s'engageait à construire sur la parcelle sise sur le domaine public aéronautique ; que le 20 mars 2008, la chambre de commerce et d'industrie de Lyon a informé la société Marcq Hôtel de l'arrêt de l'exploitation de l'hôtel Sofitel à la date du 6 octobre 2009 ; que la société NH Hoteles a refusé de reprendre les contrats de travail des salariés affectés à l'hôtel Sofitel de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, dont celui de M. Y..., engagé le 29 juillet 1980 par la société Sofitel et salarié de la société Marcq Hôtel, qui occupait les fonctions de responsable d'hébergement ; que le 4 février 2010, la société Marcq Hôtel a licencié M. Y... pour motif économique, douze autres salariés étant également concernés par cette procédure ; que contestant cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes présentées contre les sociétés Accor, Marcq Hôtel et NH Hoteles ;

Sur la recevabilité du pourvoi incident, en tant que formé par la société Accor, examinée d'office après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Attendu que la société Accor, mise hors de cause par la cour d'appel, est sans intérêt à former un pourvoi incident contre un arrêt qui ne prononce aucune condamnation contre elle ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié et le premier moyen du pourvoi incident de la société Marcq Hôtel, réunis :

Attendu que le salarié et la société Marcq Hôtel font grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société NH Hoteles et de dire que le contrat de travail n'a pas été transféré à cette dernière et rejeter les demandes en nullité du licenciement et indemnitaires à ce titre, alors, selon le moyen :

1°/ que constitue une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; que si le transfert d'éléments d'actifs corporels figure au nombre des critères à prendre en considération par le juge pour apprécier la réalité d'un transfert d'entreprise, l'absence de pareils éléments n'exclut pas nécessairement l'existence d'un tel transfert, la reprise de la clientèle pouvant être considérée comme un élément d'exploitation significatif pour la poursuite de l'activité ; qu'en retenant qu'il n'y aurait pas eu de transfert de clientèle de l'hôtel Sofitel Aeroport de Lyon à l'hôtel NH Hôtel Aeroport de Lyon au motif de la proximité d'un hôtel Sofitel et de la différence des prestations proposées par les deux établissements et ce, après avoir mis en exergue qu'en vue de la réalisation et la gestion d'un hôtel 4 étoiles par la société NH Hoteles sur l'emprise de l'aéroport de Lyon, la Chambre de commerce et d'industrie de Lyon s'était engagée à résilier le contrat autorisant le Groupe Accor à exploiter un hôtel Sofitel au sein de l'aéroport de Lyon, ce qui justifiait le transfert de clientèle, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°/ qu'aux termes de ses conclusions d'appel, le salarié a soutenu que la résiliation de la concession accordée à la société Marcq Hôtel, filiale de la société Accor, au profit de la SARL NH Hoteles pour que ne subsiste qu'un hôtel 4 étoiles sur l'emprise de l'aéroport de Lyon, permettait d'établir le transfert d'une entité économique justifiant le transfert de son contrat de travail ; que le salarié a notamment fait valoir de ce qu'« il est de jurisprudence constante que le changement de concessionnaire entraîne le transfert d'une entité économique autonome constituée d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'existence d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ayant conservé son identité et dont l'activité est poursuivie » ; qu'en se bornant à retenir qu'il n'y aurait eu ni transfert d'éléments corporels, ni transfert d'éléments incorporels sans répondre aux conclusions d'appel du salarié mettant en exergue le changement de concessionnaire, lequel conduisait au transfert d'une entité économique autonome, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que la reprise de la commercialisation de l'activité hôtelière sur un même site aéroportuaire et de la clientèle qui y est attachée entraîne en principe, en l'absence même d'éléments corporels ou incorporels d'exploitation, le transfert d'une entité économique autonome au sens de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que la concomitance entre la fermeture d'un établissement hôtelier unique sur un site aéroportuaire et l'ouverture d'un second établissement destiné à reprendre l'exploitation de la même activité sur le même site suffit à caractériser un tel transfert de clientèle, peu important l'existence d'un changement dans le niveau et le contenu des prestations hôtelières proposées par le second établissement ; qu'en l'espèce, il était constant que la gestion de l'activité hôtelière sur le site de l'aéroport de Lyon, confiée pour une durée de quinze ans à la société Marcq Hôtel par convention du 3 juin 1988, avait ensuite été attribuée à compter du 6 octobre 2009 à la société NH Hoteles sur décision de la chambre de commerce et d'industrie de Lyon notifiée par lettre de l'aéroport de Lyon (filiale de la chambre de commerce et d'industrie) en date du 20 mars 2008 à la société Marcq Hôtel ; que la cour d'appel a retenu que la chambre de commerce et d'industrie de Lyon, concessionnaire de l'aéroport de Lyon, avait « clairement voulu une concomitance entre la fermeture de l'hôtel Sofitel et l'ouverture de l'hôtel NH Hoteles » ; qu'en se bornant à relever, d'une part, que l'activité hôtelière n'était pas exploitée dans le même bâtiment ni selon les mêmes modalités, qu'il n'y avait eu aucun transfert d'éléments corporels et qu'un hôtel Sofitel était implanté à Lyon, des navettes assurant les trajets des voyageurs entre Lyon et l'aéroport, de sorte que « la différence des prestations proposées par les deux établissements ne permettent pas de retenir un transfert de la clientèle », lorsqu'il résultait de ses constatations que le nouvel exploitant (la société NH Hoteles) avait repris la commercialisation de l'activité de l'unique établissement hôtelier situé dans l'enceinte de l'aéroport, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés et répondant aux conclusions prétendument omises, constaté que les deux hôtels n'étaient pas exploités sur le même site, qu'aucun élément d'exploitation corporel n'avait été repris et que, s'agissant de la clientèle, aucun transfert n'était intervenu dès lors qu'il existait un autre hôtel Sofitel implanté à Lyon à proximité de l'aéroport et assurant des navettes entre les deux lieux et que les prestations offertes par l'hôtel NH Hoteles étaient d'un niveau supérieur et s'adressaient dès lors à une clientèle différente ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à retenir une situation de coemploi entre les sociétés Accor et Marcq Hôtel, de mettre hors de cause la société Accor et de rejeter les demandes en nullité du licenciement et en paiement de dommages-intérêts subséquentes, alors, selon le moyen, qu'une société faisant partie d'un groupe doit être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; que pour déterminer s'il y a situation de coemploi les juges doivent apprécier globalement les différents éléments de nature à démontrer une immixtion d'une société mère dans la gestion de sa filiale ; que la cour d'appel a constaté que « les dirigeants de la filiale proviennent du groupe »,« la société mère (a) pris dans le cadre de la politique du groupe des décisions affectant le devenir de la filiale », les « deux sociétés ont leur siège social dans les mêmes locaux », « l'objet de l'une est inclus dans l'objet social de l'autre », que « les missions confiées au salarié par une société le sont pour les clients de l'autre société », « les deux sociétés entretiennent une confusion dans...

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