Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 18 octobre 2017, 16-10.271, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2017:CO01288
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Boré,Salve de Bruneton et Mégret,SCP Marc Lévis
Appeal Number41701288
Docket Number16-10271
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Date18 octobre 2017
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 21 novembre 2006, Mme Y..., cliente de la société Banque populaire Rives de Paris (la banque), a procédé, par l'intermédiaire de cette dernière, à l'achat d'actions Natixis proposées à la vente dans le cadre d'une offre publique à prix ouvert ; que se prévalant d'un manquement de la banque à ses obligations, Mme Y... l'a assignée en paiement de dommages-intérêts ; que l'association UFC Que choisir est intervenue volontairement à l'instance ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'intervention volontaire de l'association UFC Que choisir et, en conséquence, de la condamner à payer à cette dernière des dommages-intérêts alors, selon le moyen, que les dispositions des articles L. 421-1 et L. 421-7 du code de la consommation sont inapplicables aux actions indemnitaires relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des investisseurs ou de certaines catégories d'entre eux, lesquelles relèvent des seuls articles L. 452-1 et suivants du code monétaire et financier ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles L. 421-1 et L. 421-7 du code de la consommation et, par refus d'application, les articles L. 452-1 et L. 452-2 du code monétaire et financier, ensemble le principe selon lequel les lois spéciales dérogent aux lois générales ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que les dispositions de l'article L. 421-7 du code de la consommation permettent aux associations de consommateurs agréées d'intervenir devant les juridictions civiles lorsque la demande initiale a pour objet la réparation d'un préjudice subi par un ou plusieurs consommateurs à raison de faits de fourniture d'un bien ou d'un service non constitutifs d'une infraction pénale, la cour d'appel en a exactement déduit que l'association UFC Que choisir était recevable à intervenir dans l'instance en responsabilité introduite par Mme Y..., au titre de la prestation fournie, contre la banque dont elle était cliente ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et le deuxième moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en ses première et cinquième branches :

Vu l'article L. 533-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable en la cause, et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour condamner la banque à payer des dommages-intérêts à Mme Y... et à l'association UFC Que choisir, l'arrêt retient que si Mme Y... a reconnu avoir pris connaissance avant l'achat des actions du prospectus visé par l'Autorité des marchés financiers, constitué notamment de la note d'opération qui contient le résumé du prospectus et en particulier des facteurs de risques décrits dans le prospectus, cette note de quatre-vingt-dix pages n'est pas adaptée à l'expérience personnelle et à la compréhension du consommateur moyen qu'est Mme Y..., ancienne secrétaire médicale ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que Mme Y... possédait un compte titres ouvert en 1984 dans les comptes de la banque, qu'elle gérait elle-même et qui lui avait permis de constater que le prix des actions était susceptible d'évoluer à la hausse comme à la baisse, et que le prospectus visé par l'Autorité des marchés financiers, dont elle avait pris connaissance, mentionnait les facteurs de risques, précisant que le cours des actions de la société Natixis pourrait être très volatil et être affecté par de nombreux événements concernant la société, ses concurrents, ou le marché financier en général et le secteur bancaire en particulier, ce dont il résultait que la banque avait délivré à sa cliente une information appropriée sur le risque de perte attaché à la souscription de ces actions, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la cassation de l'arrêt en ce qu'il retient la faute de la banque envers Mme Y..., entraîne, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt en ce qu'il condamne la première à payer des dommages-intérêts à l'association UFC Que choisir ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'intervention de l'association UFC Que choisir, l'arrêt rendu le 15 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme Y... et l'association UFC Que choisir aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Banque populaire Rives de Paris la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lévis, avocat aux Conseils, pour la Banque populaire Rives de Paris


PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable l'intervention volontaire de l'association UFC Que Choisir et, en conséquence, condamné la Banque Populaire Rives de Paris à payer la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts à l'association UFC Que Choisir ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE la Banque Populaire Rives de Paris considère que l'intervention volontaire de l'association UFC Que Choisir est irrecevable au motif qu'il n'y a pas d'intérêt collectif de consommateurs en l'espèce mais qu'il ne s'agit que de l'intérêt particulier de Madame Y... ; que l'association UFC Que Choisir est une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et a pour but de « réaliser ou promouvoir toutes actions, études, recherches, essais comparatifs de biens ou de services, soit à sa propre initiative, soit en collaboration avec d'autres associations ou organismes, permettant de fournir aux consommateurs et usagers, les informations et éléments de jugements utiles... de présenter en tous lieux et auprès de toutes instances, et notamment en justice, les intérêts matériels et moraux des consommateurs et usagers » ; que conformément à l'article L. 421-7 du code de la consommation, elle peut intervenir devant les juridictions civiles « lorsque la demande initiale a pour objet la réparation d'un préjudice subi par un ou plusieurs consommateurs à raison de faits non constitutifs d'une infraction pénale » ; qu'en conséquence, l'intervention volontaire de l'association UFC Que Choisir est recevable, s'agissant d'une demande d'indemnisation d'un préjudice civil subi par un seul consommateur ;

ET AUX MOTIFS PROPRES, d'une part, QUE rien ne permet d'affirmer, comme l'expose la banque, qu'il "semblerait que madame Y... n'ait jamais été informée de l'existence de la procédure dans laquelle elle apparaît aux côtés de l'association UFC Que choisir .. ce qui peut laisser craindre que ce qui est présenté connue une intervention volontaire constituerait, en réalité, une action principale pourtant non ouverte à une association de consommateurs." ;qu'en effet cette allégation, formulée sur le mode conditionnel et qui n'est pas motivée par l'intimée, est contredite par les actes de la procédure ; qu'aux termes de l'article L. 421-1 du code de la consommation, les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ; que selon l'article L. 421-7, les associations mentionnées à l'article L. 421-1 peuvent intervenir devant les juridictions civiles lorsque la demande initiale a pour objet la réparation d'un préjudice subi par un ou plusieurs consommateurs à raison de faits non constitutifs d'une infraction pénale ; que la Banque populaire soutient que l'intervention volontaire de l'association UFC est irrecevable puisque les dispositions des articles L. 452-1 et suivants du code monétaire et financier dérogent à celles de l'article L. 421-7 du code de la consommation, réservant l'action en justice aux seules associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des investisseurs en titres financiers ou en produits financiers relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des investisseurs ; que cependant l'action en justice des associations de défense des investisseurs financiers suppose un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des investisseurs ; que l'action prévue par l'article L. 452-2 du code monétaire et financier suppose qu'elles aient été mandatées par deux investisseurs pour agir en leur nom ; qu'en revanche, l'action des associations de consommateurs ne peut avoir d'autre but que la réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif des consommateurs qui ne se superpose pas avec l'intérêt collectif des investisseurs ; qu'elle ne peut être formée qu'après qu'un ou plusieurs consommateur a introduit une demande en réparation de son préjudice personnel ; que l'association UFC est une association déclarée en préfecture...

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