Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 décembre 2013, 12-23.976, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Espel
ECLIECLI:FR:CCASS:2013:CO01173
Case OutcomeRejet
Appeal Number41301173
Docket Number12-23976
CitationSur le n° 1 : Dans le même sens que :Com., 10 juin 2008, pourvoi n° 06-19.905, Bull. 2008, IV, n° 117 (cassation partielle), et l'arrêt cité. Sur le n° 2 : Dans le même sens que :Com., 26 mai 2010, pourvoi n° 09-14.431, Bull. 2010, IV, n° 95 (rejet)
CounselSCP Bénabent et Jéhannin,SCP Potier de La Varde et Buk-Lament
Date03 décembre 2013
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2013, IV, n° 176

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Banque populaire du Sud que sur le pourvoi incident relevé par M. X... et Mme Y... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 25 avril 2012), que M. X... a contracté auprès de la société Banque populaire du Sud (la banque) un emprunt d'un montant de 200 000 euros afin d'apporter cette somme en compte courant d'associé à la société Aduno, dont il était le fondateur et président-directeur général ; que ce crédit a été garanti par Oseo Sofaris et Oseo Sofaris Région à concurrence de 70 %, Mme Y... se rendant caution solidaire des engagements de M. X... ; que, devant la défaillance de M. X..., la banque l'a assigné, ainsi que Mme Y..., en paiement de diverses sommes dues au titre du prêt ; que ceux-ci ont opposé à la banque un manquement à son obligation d'information sur les conditions de fonctionnement de la garantie Oseo Sofaris et ont sollicité sa condamnation à leur payer des dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir jugé qu'elle avait commis une faute dans son obligation d'information de M. X... et de l'avoir condamnée à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice alors, selon le moyen :

1°/ que la note datée du 13 décembre 2005, rédigée par le conseiller bancaire de M. X..., mentionnait que la banque devait participer à la mobilisation de capitaux en faveur de la société Aduno par le biais d'un prêt «Capitalis + : 200 k (Prêt à Mr X... pour apport en cpte courant d'associé)» et que «les fonds doivent être apportés en cpte courant d'associé de Mr X...» ; que la cour d'appel qui, pour juger que la banque avait manqué à son obligation d'information à l'égard de M. X..., a retenu qu'il résultait de la note du conseiller bancaire que le projet initial était un prêt accordé à la société Aduno, de sorte que la modification de ce projet par l'octroi d'un prêt à M. X... devait conduire la banque à l'informer quant à la consistance ou à l'absence de consistance de la garantie Oseo Sofaris qui assortissait le prêt litigieux, a dénaturé la note du 13 décembre 2005 et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que, en tout état de cause, le banquier dispensateur de crédit n'est pas débiteur d'une obligation d'information à l'égard de l'emprunteur averti ; que la cour d'appel qui, après avoir constaté que M. X... était président directeur général de la société Aduno qu'il avait fondée et qu'il était un dirigeant très impliqué personnellement dans la réussite de son entreprise, s'est néanmoins fondée, pour dire qu'il n'était pas un emprunteur averti au regard de la garantie Oséo Sofaris qui assortissait le prêt qui lui avait été consenti par la Banque populaire du Sud afin de faire un apport à son compte courant d'associé, sur la circonstance inopérante qu'il n'était pas un professionnel de la finance, a violé l'article 1147 du code civil ;

3 / que le banquier dispensateur de crédit n'a aucune information à délivrer à l'emprunteur au titre d'une garantie dont l'établissement prêteur peut seul se prévaloir ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait relevé que la garantie Oséo Sofaris ne bénéficiait qu'à l'établissement intervenant et qu'elle ne pouvait pas être invoquée par l'emprunteur pour contester tout ou partie de sa dette, a néanmoins jugé que la Banque populaire du Sud avait manqué à son obligation d'information sur la modification du prêt, accordé à M. X... plutôt qu'à sa société, et les conséquences qui en résultaient quant à la consistance ou à l'absence de consistance de la garantie Oséo Sofaris, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1147 du code civil ;

4 / que l'information de l'emprunteur quant à la teneur de la garantie qui assortit son prêt peut résulter des conditions générales de cette garantie lorsque celles-ci sont claires et précises ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait relevé, pour écarter une faute de la banque à l'égard de la caution du prêt consenti à M. X..., qu'elle ne pouvait pas prétendre méconnaître le caractère subsidiaire de la garantie Oséo Sofaris puisque les stipulations contractuelles des conditions générales de cette garantie étaient très claires à ce sujet, celles-ci indiquant clairement dans leur article 10 que la garantie ne peut être mise en oeuvre qu'après épuisement de toutes les poursuites et, dans leur article 2, que la garantie ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant et qu'elle ne peut pas être invoquée par l'emprunteur ou ses garants pour contester tout ou partie de leur dette, a néanmoins jugé, à l'égard de l'emprunteur, que la banque avait manqué à son obligation d'information relativement à la consistance de la garantie Oséo Sofaris, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine de la note de la banque du 13 décembre 2005, rendue nécessaire par l'ambiguïté de ses termes et, partant, exclusive de dénaturation, que la cour d'appel a considéré qu'il résulte de ce document que la banque a substitué au projet initial de prêt à la société Aduno, assorti d'un engagement de caution d'Oseo Sofaris pour 70 % et de M. X... pour 30 %, un prêt personnel à M. X... ; qu'elle a relevé, ensuite, que cette modification du projet initial s'est effectuée dans la précipitation et la confusion, notamment de la part de la banque, qui s'est égarée dans le montage du projet et n'a pu transmettre à M. X... des informations qu'elle-même ne semblait pas maîtriser, en particulier sur la garantie d'Oseo Sofaris ; qu'ayant ainsi fait ressortir que M. X..., peu important sa qualité, n'avait pas été mis en mesure d'apprécier les conséquences, sur son engagement personnel, de la modification du projet initial intervenue dans de telles conditions, la cour d'appel a pu en déduire que la banque avait commis une faute à son égard ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir limité à la somme de 50 000 euros le montant des dommages-intérêts mis à la charge de la banque en réparation de la faute qu'elle a commise à son égard dans son obligation d'information alors, selon le moyen :

1°/ qu' en retenant que le préjudice subi par M. X... aurait nécessairement été inférieur à 70 000 euros, correspondant au différentiel entre le montant du prêt accordé de 200 000 euros et le cautionnement de sa fille de 130 000 euros, cependant qu'une telle limitation n'avait été invoquée par aucune des parties, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que le contrat de prêt mettait à la charge de l'emprunteur, non seulement le remboursement du capital emprunté, mais encore le paiement d'intérêts, majorés en cas de retard de remboursement, le paiement d'une assurance, celui de commissions dues au titre de la garantie Sofaris, outre le règlement de frais de dossier ; qu'en retenant que la perte de chance de M. X..., causée par le manquement de la banque à son obligation d'information, devrait «être appréciée, en son maximum, relativement au différentiel entre le risque pris par le prêt accordé de 200 000 euros et sa capacité d'être cautionné à hauteur de 130 000 euros, de sorte qu'en toute hypothèse, son préjudice ne pourrait s'élever à une somme supérieure à celle de 70 000 euros» et en ne prenant ainsi en considération que le seul capital et non les autres frais pesant sur l'emprunteur, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;

3°/ que la caution qui a payé la dette dispose d'un recours personnel, ou subrogatoire, contre le débiteur principal ; qu'en retenant que la perte de chance de M. X..., causée par le manquement de la banque à son obligation d'information, devrait «être appréciée, en son maximum, relativement au différentiel entre le risque pris par le prêt accordé de 200 000 euros et sa capacité d'être cautionné à hauteur de 130 000 euros, de sorte qu'en toute hypothèse, son préjudice ne pourrait s'élever à une somme supérieure à celle de 70 000 euros», cependant qu'après avoir payé, la caution disposerait toujours d'un recours à l'encontre de M. X... pour recouvrer les sommes qu'elle aurait versées, de sorte que celui-ci ne serait pas libéré de sa dette à hauteur de 130 000 euros, la cour d'appel a violé les articles 1147, 2305 et 2306 du code civil ;

Mais attendu que, sous le couvert de griefs de violations de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain d'appréciation dévolu aux juges du fond pour fixer, à partir des éléments versés au débat, le montant du préjudice soumis à réparation ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du même pourvoi :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir dire que la banque a violé son obligation d'information à son égard et, en conséquence, à la voir condamner à lui verser la somme de 93 420,43 euros avec intérêts au taux de 4,65 % se compensant avec les sommes réclamées par la banque à son égard alors, selon le moyen :

1°/ que la banque est tenue d'une obligation d'information envers la caution non avertie ; que le juge est tenu d'établir les éléments sur lesquels il se fonde pour retenir que la caution aurait été avertie ; que dans son courriel du 25 mars 2008, Mme X... écrivait : «si le bénéficiaire du prêt est Bernard X... aux conditions particulières il est clair (objet de l'opération) que l'entreprise bénéficiaire du prêt est SAS Aduno. Ma caution est une caution solidaire de la personne du débiteur du prêt en cas de mise en jeu de son défaut, alors que celle d'Oseo est une caution liée à l'entreprise mise en jeu en cas de procédures collectives à hauteur de 70 %»...

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