Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 16 mai 2018, 16-18.174, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:CO00495
Case OutcomeCassation
Date16 mai 2018
Subject MatterUNION EUROPEENNE - Concurrence - Entente et position dominante - Entente - Exemption par catégorie - Nécessité (non) - Réseau de distribution sélective - Licéité
Appeal Number41800495
Docket Number16-18174
CounselSCP Piwnica et Molinié,SCP Rousseau et Tapie
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2018, IV, n° 55
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et L. 420-1 du code de commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Coty France division prestige (la société Coty) exploite en France un réseau de distribution sélective de produits cosmétiques et de parfumerie de luxe de différentes marques dont sa société-mère est le licencié exclusif dans le monde ; que les 5 et 6 février 2010, des émissions diffusées par la société France télévisions ont fait la promotion d'un site internet présenté par Mme X..., en qualité de créatrice, et dont la société de droit américain Marvale était éditrice ; qu'ayant constaté la commercialisation sur ce site de certains des produits qu'elle distribue, la société Coty a assigné la société France télévisions, la société Marvale et Mme X... en cessation de ces pratiques et en réparation de ses préjudices ; que les sociétés France télévisions et Marvale ont opposé l'illicéité du réseau de distribution sélective ;

Attendu que pour rejeter les demandes de la société Coty, l'arrêt retient que trois clauses contractuelles constituent des restrictions caractérisées au sens du règlement (CE) n° 2790/99 du 22 décembre 1999 concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3 du Traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées et en déduit que l'existence de ces clauses "noires" dans le contrat de distribution sélective exclut tout caractère licite du réseau ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la circonstance, à la supposer établie, que l'accord ne bénéficie pas d'une exemption par catégorie n'implique pas nécessairement que le réseau de distribution sélective contrevient aux dispositions de l'article 101, paragraphe 1, TFUE, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne les sociétés France télévisions et Marvale LLC et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés France télévisions et Marvale LLC à payer à la société Coty France la somme globale de 3 000 euros et rejette la demande de la société France télévisions ;

Vu l'article R. 490-5 du code de commerce, dit que sur les diligences du directeur de greffe de la Cour de cassation, le présent arrêt sera notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception, à la Commission européenne, à l'Autorité de la concurrence et au ministre chargé de l'économie ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Coty France - division prestige

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la société Coty France de ses demandes ;

Aux motifs que se prévalant d'actes de concurrence déloyale commis à son encontre, la société Coty France doit justifier que le réseau sélectif qu'elle a mis en place est licite ; que tout d'abord la preuve de l'existence du réseau doit être faite ; qu'ensuite la preuve de sa licéité doit être établie ; qu'à cet égard, les différentes décisions intervenues entre Coty et des parties autres que celles présentes dans ce litige, qui ont pu reconnaître l'existence ou la validité du réseau, ne peuvent être invoquées pour faire la preuve, dans ce litige, de l'existence et de la licéité du réseau ; qu'il sera observé que la société Coty verse aux débats différents contrats de distribution sélective des produits en pièces 3a à 3g ; que la pièce 3a est un contrat de distribution « vierge », que les pièces 3b à 3g sont des photocopies plus ou moins complètes des contrats signés par Coty France et des distributeurs agréés ; qu'il est remarqué que le contrat vierge ne correspond aucunement aux contrats signés dont la photocopie est donnée, que sa présentation et son contenu sont totalement différents ; que la cour ne prendra pas le contrat «vierge » en référence, qui n'est pas celui qu'ont signé Coty et ses distributeurs, notamment avec Burdin ; que pour ce qui concerne l'existence du réseau de distribution sélective, Coty verse aux débats plusieurs contrats intitulés « contrat de distributeur agréé » dont seul le contrat signé avec Burdin le 26 août 2008 est antérieur aux faits, tous les autres contrats produits étant postérieurs (notamment celui signé avec Marionnaud du 3 janvier 2013), celui signé avec Sephora étant quant à lui sans date ; que néanmoins, Coty peut prétendre justifier de l'existence d'un réseau de distribution sélective pour les produits au moment des faits litigieux par la production du contrat Burdin ; que le contrat comporte en son article 3.4.3 une disposition destinée à assurer l'étanchéité juridique du réseau tout du moins sur le territoire français en interdisant la vente à des distributeurs non agréés ; que par ailleurs pour ce qui concerne la licéité du réseau, les faits à l'origine de la procédure ont eu lieu en février 2010 ; que pour déterminer la validité du réseau, il convient de se référer à l'article 81 §1 du traité de Rome alors en vigueur (désormais article 101 du TFUE) et au règlement 2790/1999 du 22 décembre 1999 ainsi qu' à l'article L 420-1 du code de commerce ; que d'une part, un système de distribution sélective peut être considéré licite au regard des termes de l'article 81 § 3 du Traité de Rome ou de l'article L. 420-1 du code de commerce si trois conditions sont réunies cumulativement soit : la nature du produit requiert un système de distribution sélective pour en préserver la qualité et en assurer l'usage, que les revendeurs soient choisis sur la base de critères objectifs de caractère qualitatif fixés de manière uniforme pour tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire, et que les critères retenus ne soient pas au-delà de ce qui est nécessaire (proportionnalité) ; que la nature des produits en cause peut tout à fait justifier la mise en place d'un réseau de distribution sélective ; qu'à cette fin, l'annexe 1 du contrat de distributeur agréé signé avec Burdin donne les critères suffisamment précis pour la sélection du distributeur que ne remettent pas en doute sérieusement les sociétés France...

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