Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 14 février 2018, 16-10.636, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:CO00211
Case OutcomeRejet
Docket Number16-10636
Appeal Number41800211
Date14 février 2018
CounselSCP Gatineau et Fattaccini,SCP Piwnica et Molinié,SCP Sevaux et Mathonnet
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBull. 2018, IV, n° 23
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 décembre 2015, RG n° 14/17695), que la société VFLI, société de transport ferroviaire de marchandises, qui avait demandé à bénéficier de son droit d'accès au réseau ferré national et s'était vu attribuer par le gestionnaire du réseau, l'établissement public à caractère industriel et commercial Réseau ferré de France (RFF), plusieurs capacités d'infrastructure ou "sillons" au titre de l'horaire de service 2013, s'estimant victime par le passé de modifications ou suppressions tardives de sillons-jours qui lui avaient été attribués, a saisi, le 9 avril 2013, à l'instar de trois autres entreprises, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires, devenue l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (l'Autorité), sur le fondement de l'article L. 2134-2 du code des transports, d'une demande de règlement de différend, aux fins, à titre principal, d'être exonérée du paiement de l'acompte de 20 % sur la redevance de réservation tant que RFF n'aurait pas remédié aux insuffisances propres au processus d'allocation, de suivi et de facturation des sillons-jours, en mettant en place un dispositif l'incitant au respect des sillons attribués et, à titre subsidiaire, qu'il soit enjoint à RFF de mettre en oeuvre un tel dispositif dans les délais les plus brefs ; que, par une décision n° 2013-019 du 1er octobre 2013, l'Autorité a rejeté la demande principale de la société VFLI et a, notamment, à l'article 7 de sa décision, enjoint à RFF de mettre en place, au plus tard pour l'horaire de service 2015, un mécanisme financier l'incitant à proposer des sillons alternatifs en cas de suppression de sillons alloués initialement "fermes", et dit qu'elle organiserait, à cette fin, une concertation à l'issue de laquelle elle fixerait un système de pénalités forfaitaires pour les cas de suppression de sillons sans solution alternative ; qu'à l'article 11 de sa décision, l'Autorité a dit qu'elle organiserait une concertation concernant la mise en place d'incitations à la non-surréservation de sillons et à la libération anticipée de capacités par les entreprises ferroviaires, à l'issue de laquelle elle fixerait ces incitations ; qu'après avoir mis en oeuvre ces procédures de concertation et avoir soumis à la consultation publique les dispositions qu'elle envisageait d'arrêter, l'Autorité, par une décision n° 2014-019 du 15 juillet 2014, a enjoint à RFF de mettre en oeuvre un système incitatif à la délivrance effective des sillons attribués "fermes", l'encourageant à ne pas les supprimer ni les modifier, système dont elle a défini, à l'article 1er, les objectifs et caractéristiques, en précisant notamment le montant a minima des pénalités applicables à RFF, au profit des entreprises ferroviaires, en cas de suppression ou de modification importante de sillons-jours ; qu'à l'article 3 de sa décision, l'Autorité a enjoint à RFF de mettre en place un système incitatif à l'utilisation optimale, par les entreprises ferroviaires, des sillons attribués, dont elle a décrit les caractéristiques ; que l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF réseau, venant aux droits de RFF, a formé un recours en annulation contre ces décisions ;

Sur les premier et sixième moyens, rédigés en termes identiques, réunis :

Attendu que SNCF réseau fait grief à l'arrêt du rejet de ses recours en annulation partielle des décisions n° 2013-019 du 1er octobre 2013 et n° 2014-019 du 15 juillet 2014 alors, selon le moyen, que la compétence réglementaire d'une autorité publique indépendante est déterminée par la loi et s'exerce dans le respect des principes et des contrôles prévus par le législateur ; que les dispositions réglementaires édictées par l'Autorité relatives aux conditions de raccordement au réseau ferroviaire, aux conditions techniques et administratives d'accès au réseau et de son utilisation, aux conditions d'accès aux services présentant un caractère de facilités essentielles et leurs conditions d'utilisation et aux règles d'imputation comptable sont soumises à l'homologation du ministre chargé des transports et publiées au Journal officiel ; qu'en décidant que l'Autorité était compétente, lorsqu'elle statue sur des différends, pour imposer directement aux opérateurs des mesures réglementaires concernant les modalités d'accès au réseau ferroviaire non soumise à l'homologation des pouvoirs publics, la cour d'appel a violé l'article L. 2131-7 ancien du code des transports ;

Mais attendu que le moyen, pris de la violation de l'article 2131-7 du code des transports, relatif au pouvoir réglementaire supplétif de l'Autorité, est inopérant pour critiquer les motifs par lesquels la cour d'appel a écarté le moyen de SNCF réseau qui soutenait que seul le gestionnaire d'infrastructure était compétent, en application des articles 17 et 18 du décret n° 2003-194 du 7 mars 2003 modifié, relatif à l'utilisation du réseau ferré national, pour fixer les conditions d'accès aux infrastructures ferroviaires ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que SNCF réseau fait grief à l'arrêt du rejet de son recours en annulation partielle de la décision n° 2014-019 du 15 juillet 2014 alors, selon le moyen :

1°/ que lorsqu'elle règle un différend, l'Autorité est tenue de respecter le principe du contradictoire ; qu'en affirmant au contraire que le principe du contradictoire ne revêt pas un caractère absolu et que son étendue varie en fonction des spécificités des procédures en cause, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 2134-2 du code des transports, les articles 14 à 16 du règlement intérieur de l'Autorité dans sa version consolidée au 1er juillet 2013 et l'article 16, alinéa 2, du code de procédure civile ;

2°/ que le juge ou l'autorité administrative qui tranche un litige ne peut retenir dans sa décision des documents ou notes produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'ainsi une décision qui tranche un différend ne peut se fonder que sur des pièces ayant fait l'objet d'un débat contradictoire préalable ; qu'en considérant qu'à défaut de justifier d'un grief, l'Autorité n'a pas porté atteinte au principe du contradictoire en ne communiquant aux parties qu'une synthèse qu'elle avait elle-même établie des réponses aux questionnaires qu'elle avait adressés et des contributions qu'elle avait reçues, quand la décision déférée vise expressément les pièces non communiquées parmi celles justifiant les mesures prononcées, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 2134-2 du code des transports, les articles 14 à 16 du règlement intérieur de l'Autorité dans sa version consolidée au 1er juillet 2013 et l'article 16, alinéa 2, du code de procédure civile ;

3°/ qu'en affirmant péremptoirement, pour exclure toute atteinte au principe du contradictoire, que ce principe doit être concilié avec le secret des affaires, sans établir que les réponses aux questionnaires et les contributions non communiquées étaient couvertes par le secret des affaires justifié par une décision de classement à ce titre, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 2134-2 du code des transports, les articles 14 à 16 du règlement intérieur de l'Autorité dans sa version consolidée au 1er juillet 2013 et l'article 16, alinéa 2, du code de procédure civile ;

4°/ que le respect du principe du contradictoire tient compte de l'urgence à examiner et à prononcer les mesures en cause ; qu'en affirmant, pour exclure toute atteinte au principe du contradictoire, que le principe du contradictoire ne revêt pas un caractère absolu et que son étendue varie en fonction des spécificités des procédures en cause, tout en constatant que l'Autorité ne conteste pas que les délais de règlement du différend n'ont pas été tenus, s'agissant de la décision du 15 juillet 2014, en raison de la concertation publique qu'elle avait engagée, ce dont il résultait que l'urgence ne justifiait pas de porter atteinte au principe du contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 2134-2 du code des transports, les articles 14 à 16 du règlement intérieur de l'Autorité dans sa version consolidée au 1er juillet 2013 et l'article 16, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que le principe de la contradiction ne revêt pas un caractère absolu et que son étendue varie en fonction des spécificités des procédures en cause, qu'il doit en outre être concilié avec le secret des affaires et qu'il appartient à la partie qui se plaint du défaut de communication de pièces de démontrer que cette absence de communication lui a fait grief, l'arrêt constate que l'Autorité a engagé, préalablement à sa décision du 15 juillet 2014, une procédure de concertation et de consultation publique afin d'élaborer le dispositif incitatif litigieux et relève que RFF a participé à l'ensemble des réunions de concertation aux cours desquelles l'Autorité a présenté aux parties une synthèse des réponses obtenues aux questionnaires remis aux opérateurs, qu'il a été informé, à chaque étape du processus, des résultats des phases antérieures et qu'il a pu faire valoir ses remarques et critiques ; qu'il ajoute que RFF, qui a reçu, comme toutes les parties, des synthèses des contributions établies par l'Autorité et qui a eu accès aux mêmes pièces du dossier que les opérateurs, ne démontre pas en quoi l'absence de communication de l'intégralité des réponses aux questionnaires des autres intervenants aurait porté atteinte à ses droits et souligne que le...

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