Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 5 décembre 2012, 11-23.756, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Terrier
ECLIECLI:FR:CCASS:2012:C301457
Case OutcomeRejet
CounselMe Bouthors,SCP Boré et Salve de Bruneton,SCP Boulloche,SCP Célice,Blancpain et Soltner,SCP Odent et Poulet,SCP Roger et Sevaux,SCP Thouin-Palat et Boucard
Docket Number11-23756
Appeal Number31201457
Date05 décembre 2012
Subject MatterARCHITECTE ENTREPRENEUR - Réception de l'ouvrage - Réserves - Levée - Office du juge - Etendue - Limites
CourtTroisième Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2012, III, n° 179

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 30 mai 2011), que la Caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile (CRPNPAC) a, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Atelier d'architecture André Martin (société 3AM), assurée auprès de la MAF, fait édifier un immeuble ; que sont intervenues à cette opération de construction la société Devilette et Chissadon, assurée auprès de la SMABTP, et à la suite de la liquidation judiciaire de cet intervenant, la société SAEP, aux droits de laquelle se trouve la société Eiffage construction Val de Seine (Eiffage), chargée du lot "gros oeuvre", la société Ruberoid, assurée auprès de la SMABTP, chargée du lot "étanchéité", la société Daniel Pechon, assurée auprès de la société MMA, chargée du lot "charpente, couverture, zinc" et la société carrelage revêtement Fiore (société Carrefiore), assurée auprès de la société Axa France, chargée du lot revêtement de carrelage ; qu'une police "dommages ouvrage" a été souscrite auprès de la société Covea Risks, venant aux droits de la société MMA ; que la réception a été prononcée avec réserves le 15 janvier 2003 ; que des infiltrations affectant plusieurs logements et des désordres affectant les revêtements et la structure des balcons de l'ensemble immobilier sont apparus ; qu'après expertise, la CRPNPAC a assigné les intervenants et leurs assureurs en paiement de sommes ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société Carrefiore :

Attendu que la société Carrefiore fait grief à l'arrêt de dire que les désordres constatés par l'expert engageaient sa responsabilité sur le fondement de l'article 1792 du code civil à l'égard du maître d'ouvrage, alors, selon le moyen, que la réception des travaux, lorsqu'elle est tacite, doit résulter d'une volonté claire et non équivoque du maître d'ouvrage ; qu'en considérant levées les réserves émises initialement par le maître d'ouvrage, sans autrement caractériser l'existence d'une réception définitive, expresse ou tacite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1792 et 1792-6 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la réception avait été prononcée avec réserves le 15 janvier 2003, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de caractériser l'existence d'une réception définitive, expresse ou tacite lors de la levée des réserves, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le second moyen du pourvoi principal de la société Carrefiore, le moyen unique du pourvoi incident de la société Covea Risks, le moyen unique du pourvoi incident de la société MMA et les premier et deuxième moyens du pourvoi incident de la CRPNPAC, réunis :

Attendu que la société Carrefiore fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande formée contre la société Axa, alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes des articles L. 241-1 et R. 243-2 du code des assurances, l'attestation d'assurance délivrée par l'assureur, tenu d'une obligation d'information et de renseignement, doit être précise, notamment sur le secteur d'activité professionnelle de l'assuré ; que l'assureur ne peut refuser sa garantie pour une raison touchant au secteur d'activité de l'assuré, qui n'avait pas, comme en l'espèce, été expressément mentionnée dans l'attestation d'assurance ; qu'ainsi, la cour a violé les articles L. 241-1 et R. 243-2 du code des assurances, ensemble l'article 1382 du code civil ;

2°/ que le défaut de réponse à conclusion constitue un défaut de motifs ; que le requérant faisait valoir que l'assureur est tenu d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de l'assuré ; que s'agissant d'une assurance construction obligatoire, l'assureur ne peut soumettre à l'assuré un contrat d'assurance ne prenant pas en compte une partie essentielle de son activité professionnelle, sans méconnaître son devoir d'information et de conseil ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusion, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que, s'agissant d'une assurance construction obligatoire, l'assureur ne peut soumettre à l'assuré un contrat d'assurance ne prenant pas en compte une partie essentielle de son activité professionnelle, sans méconnaître son devoir d'information et de conseil ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors, sauf à priver sa décision de base légale au regard des dispositions précitées, statuer de la sorte, sans rechercher si la société Axa avait mis en garde la société Carrefiore sur les conséquences de la souscription d'une assurance ne couvrant pas une part essentielle de son activité ;

4°/ que l'assureur est tenu d'une obligation d'information et de conseil à l'égard de l'assuré ; que s'agissant d'une assurance obligatoire en matière de construction, l'assureur ne peut soumettre à l'assuré un contrat d'assurance ne prenant pas en compte une partie essentielle de son activité professionnelle ; qu'en laissant souscrire à l'assuré un tel contrat dans le cadre d'une assurance obligatoire, l'assureur a méconnu ses obligations d'information et de conseil ; que dès lors, la cour a commis une erreur de droit au regard de l'article L. 112-2 du code des assurances ensemble l'article 1382 du code civil ;

5°/ que, s'agissant d'une assurance obligatoire, l'assureur ne peut soumettre à l'assuré un contrat d'assurance ne prenant pas en compte une partie de son activité professionnelle ; qu'en agissant de la sorte, il engage sa responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage, dans l'intérêt duquel est imposée l'assurance construction ; qu'en laissant souscrire à la société Carrefiore un tel contrat dans le cadre d'une assurance obligatoire, l'assureur a méconnu ses obligations d'information et de conseil et commis une faute au préjudice de la CRPNPAC ; qu'en en décidant autrement, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté qu'il résultait de l'attestation d'assurance délivrée par la société Axa France que parmi les seules activités garanties se trouvaient les revêtements de sols et murs intérieurs en matériaux durs (marbre, carrelage, faïence) et que les travaux réalisés par la société Carrefiore relevaient de l'activité revêtement de sols et murs extérieurs en matériaux durs et d'étanchéité qui ne faisaient pas partie des activités garanties, la cour d'appel, qui, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu retenir que cette attestation énonçait clairement les activités pour lesquelles la garantie était acquise, et n'avait pu induire en erreur le maître de l'ouvrage ni l'assureur "dommages ouvrage", sur la portée de la garantie dont la société Carrefiore bénéficiait, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen du pourvoi incident de la CRPNPAC, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs adoptés, procédant à la recherche prétendument omise que les frais d'assistance technique à expertise justifiés par facture Artexia du 27 décembre 2006 pouvaient donner lieu à indemnisation pour 669,76 euros, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille douze.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour la société Carrefiore, demanderesse au pourvoi principal

Premier moyen de cassation

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que les désordres évolutifs constatés par l'expert sur l'ensemble immobilier en cause engageaient la responsabilité de la société Carrefiore sur le fondement de l'article 1792 du code civil à l'égard du maître d'ouvrage et d'avoir en conséquence statuer sur les réparations ;

aux motifs propres que «que, sur la description des désordres, il convient seulement de souligner que l'immeuble comporte 140 logements desservis par 6 cages d'escaliers de 6 niveaux ; que la construction est en béton armé et les façades sont revêtues de pierres minces agrafées ; que les balcons, dont les pentes sont dirigées vers les façades, ont reçu un revêtement d'étanchéité du type Système d'Etanchéité Liquide (SEL) protégé par un carrelage en grès scellé sur une chape maigre, que l'évacuation des eaux de ruissellement et de pluie est assuré par des siphons de sol de marque NICOLL raccordés à des descentes pluviales situées à proximité immédiate des façades ; que les désordres consistent en des dégâts des eaux affectant les façades et quelques logements (les travaux de réfection de cinq appartements dans lesquels des infiltrations se sont produites ont été pris en charge par l'assureur « dommages ouvrage ») qui trouvent leur origine sur les balcons en raison des défauts d'étanchéité entre les siphons et les chapes de pose du carrelage de revêtement des balcons ; que l'expert a relevé 54 sols de balcons affectés de désordres sur siphon et joints de fractionnement, 49 sous-faces de balcons affectées de désordres apparents ; que, concernant les siphons des balcons, l'expert a indiqué que les infiltrations d'eau prenant naissance en périphérie des siphons sont à l'origine du décollement progressif du revêtement d'étanchéité de son support, par capillarité, vers les parties courantes des balcons, que la défaillance du revêtement d'étanchéité est à l'origine de dégâts des eaux en voie d'extension, apparents sur les maçonneries et affectant certains appartements mais soumet également les fers d'armatures du béton constituant les dalles des balcons à l'action nocive des infiltrations susceptibles de provoquer leur oxydation ; qu'il a constaté le décollement des relevés d'étanchéité en résine, non renforcés par...

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