Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 18 février 2014, 12-27.643 12-27.697 12-27.698 12-27.700 12-28.026, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Espel
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:CO00199
CitationSur le n° 1 : A rapprocher :Com., 15 mai 2012, pourvoi n° 11-18.507, Bull. 2012, n° 99 (cassation)
Case OutcomeCassation partielle
Appeal Number41400199
Date18 février 2014
CounselMe Spinosi,SCP Baraduc et Duhamel,SCP Coutard et Munier-Apaire,SCP Piwnica et Molinié
Docket Number12-27698,12-27700,12-27643,12-27697,12-28026
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2014, IV, n° 38

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° V 12-27. 643, D 12-27. 697, E 12-27. 698, H 12-27. 700 et M 12-28. 026 qui attaquent le même arrêt ;

Statuant tant sur les pourvois principaux formés par la société Entreprise Pradeau et Morin (la société Pradeau et Morin), la société Pateu et Robert, la société Degaine, la société TERH monuments historiques (la société TERH) et la société Charpentier PM, que sur le pourvoi incident relevé par la société TERH ;

Donne acte à la société Pradeau et Morin et à la société TERH du désistement partiel de leur pourvoi respectif en ce qu'il est dirigé contre la société Entreprise H. Chevalier Nord, la société Faber, la SCP Berkowicz Henneau, en sa qualité d'administrateur de la société Faber, M. X..., en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Faber, la société Pavy, la société Payeux Invest, la société Entreprise Georges Lanfry et la société Nouvelle Bodin ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un signalement effectué en 2001 concernant une anomalie constatée lors d'une procédure d'appel d'offres pour la restauration d'un monument historique, une information judiciaire a été ouverte au cours de laquelle des perquisitions, des écoutes téléphoniques et des auditions ont été réalisées ; que le Conseil de la concurrence, devenu l'Autorité de la concurrence (l'Autorité), a par ailleurs été saisi, en 2005 et 2007, de pratiques mises en oeuvre dans le secteur de la restauration des monuments historiques et s'est lui-même saisi d'office de cette situation à la fin de l'année 2007 ; qu'à l'issue de différentes investigations et après avoir notifié à plusieurs sociétés des griefs d'ententes anticoncurrentielles par lettre du 26 janvier 2009, l'Autorité a, par décision n° 11- D-02 du 26 janvier 2011, notamment dit que la société TERH, la société Charpentier PM, la société Pradeau et Morin, l'Entreprise Degaine, la société Pateu et Robert avaient enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du code de commerce et leur a infligé des sanctions pécuniaires, assorties d'une mesure de publication ; que ces entreprises ont formé un recours contre cette décision ;

Sur le premier moyen des pourvois n° E 12-27. 698, H 12-27. 700 et M 12-28. 026, réunis :

Attendu que les sociétés Degaine, TERH et Charpentier PM font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur recours, alors, selon le moyen :

1°/ que les lois relatives à la procédure sont d'application immédiate ; que si les nouvelles dispositions de l'article L. 462-7 du code commerce, instaurées par l'ordonnance du 13 novembre 2008, selon lesquelles la prescription est acquise en toute hypothèse lorsqu'un délai de dix ans à compter de la pratique anticoncurrentielle s'est écoulé sans que l'Autorité de la concurrence ait statué sur celle-ci, ne peuvent pas priver d'effet une décision de l'Autorité de la concurrence rendue plus de dix ans après la cessation des pratiques avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, la prescription décennale est, en revanche, immédiatement applicable dans toutes les procédures en cours au 13 novembre 2008 dans lesquelles l'Autorité de la concurrence n'a pas encore statué : qu'en refusant d'appliquer la prescription aux pratiques ayant cessé depuis plus de dix ans avant la décision de l'Autorité de la concurrence, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil, ensemble l'article L. 462-7 du code de commerce ;

2°/ que les lois qui organisent des prescriptions extinctives sont des lois de procédure et, comme telles, s'appliquent immédiatement aux faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur à condition de ne pas priver d'effet les actes accomplis régulièrement avant leur entrée en vigueur ; qu'en l'espèce, pour dire que la prescription décennale prévue à l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 13 novembre 2008, n'était pas applicable aux pratiques en cause, la cour d'appel ne pouvait faire application des dispositions transitoires fixées par le III de l'article 5 de cette ordonnance qui prévoient que l'examen des affaires de pratiques anticoncurrentielles ayant donné lieu à une notification de griefs avant la date de la première réunion de l'Autorité de la concurrence se poursuivent selon les règles de procédure en vigueur antérieurement à cette date quand, ayant elle-même relevé que la notification des griefs avait été adressée aux entreprises poursuivies le 16 décembre 2008, soit antérieurement à la première réunion de l'Autorité qui avait eu lieu en mars 2009, il en résultait que la prescription décennale issue de l'ordonnance du 13 novembre 2008 était bien applicable car entrée en vigueur avant la première réunion de l'Autorité de mars 2009 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 5 III de l'ordonnance du 13 novembre 2008 par fausse application et l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce par refus d'application ;

3°/ que la décision de l'Autorité en date du 26 janvier 2011 ayant été rendue postérieurement à l'entrée en vigueur de la prescription décennale, elle ne constituait pas un acte accompli régulièrement avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 novembre 2008 et ne faisait donc pas obstacle à son application immédiate par la cour d'appel aux pratiques en cause, même si celles-ci avaient été commises antérieurement à son entrée en vigueur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 5 III de l'ordonnance du 13 novembre 2008 par fausse application et l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce par refus d'application ;

4°/ que selon l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce, la prescription est acquise en toute hypothèse lorsqu'un délai de dix ans à compter de la cessation de la pratique anticoncurrentielle s'est écoulé sans que l'Autorité de la concurrence ait statué sur celle-ci ; qu'en l'espèce, pour écarter la prescription, la cour d'appel ne pouvait retenir qu'un délai inférieur à dix ans s'était écoulé entre la cessation des ententes et la décision de l'Autorité de la concurrence en date du 26 janvier 2011, aux motifs que les ententes de répartition des marchés publics mises en oeuvre par les entreprises au niveau régional en Haute-Normandie, Basse-Normandie et Picardie constituaient des infractions continues, qui s'étaient poursuivies respectivement jusqu'au 24 février 2002, 12 février 2002 et 19 octobre 2001 quand elle avait constaté que la société TERH n'avait participé à l'entente en Picardie que jusqu'en juillet 1999, ce dont il résultait que la prescription décennale était acquise s'agissant des pratiques reprochées à la société TERH en Picardie ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

5°/ que de nouvelles lois de procédure s'appliquent immédiatement aux faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur à condition de ne pas priver d'effet les actes accomplis régulièrement avant leur entrée en vigueur ; qu'en refusant de faire application de la prescription décennale prévue par l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce, lorsque la décision de l'Autorité de la concurrence avait pourtant été rendue le 26 janvier 2011, à une date à laquelle l'ordonnance du 13 novembre 2008 instaurant le délai de dix ans prévu par l'alinéa 3 de l'article L. 462-7 du code de commerce était entrée en vigueur, la cour d'appel a violé les articles 2 du code civil et L. 462-7 du code de commerce ;

6°/ que l'examen des affaires de concentration notifiées avant la date de la première réunion de l'Autorité de la concurrence et l'examen des affaires de pratiques anticoncurrentielles ayant donné lieu à une notification de griefs ou à une proposition de non-lieu avant cette même date se poursuivent selon les règles de procédure en vigueur antérieurement à cette date ; qu'en refusant de faire application de la prescription prévue par l'article L. 462-7, alinéa 3, du code de commerce, tout en constatant que la première réunion de l'Autorité était intervenue en mars 2009, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de ce texte issu de l'ordonnance du 13 novembre 2008, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article 5 III de l'ordonnance du 13 novembre 2008 ;

7°/ que la société Charpentier PM faisait valoir dans ses écritures en cause d'appel qu'un appel d'offres constitue un marché en soi, de sorte que la pratique anticoncurrentielle alléguée devait cesser le jour de la remise des offres ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur l'existence de marchés distincts invoquée par l'exposante, la cour d'appel, qui n'a pas répondu à ses écritures, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt constate que les notifications de griefs, antérieures à la première réunion de l'Autorité intervenue le 2 mars 2009, ont été adressées aux entreprises poursuivies le 26 janvier 2009 et que l'Autorité a rendu sa décision le 26 janvier 2011 ; que ces actes de poursuite et de sanction, intervenus postérieurement à l'entrée en vigueur, le 15 novembre 2008, de l'ordonnance du 13 novembre 2008, sont soumis au régime de cette ordonnance ; que ce texte de procédure étant toutefois dépourvu d'effet rétroactif, le nouveau délai préfix qu'il instaure ne peut courir, à l'égard des pratiques ayant cessé avant le 15 novembre 2008, qu'à compter de l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions ; que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, substitué à ceux critiqués par les six premières branches du moyen, l'arrêt ayant constaté que toutes les ententes avaient cessé avant 2008 et ayant écarté la prescription des pratiques qui ont été sanctionnées par une décision intervenue en 2011 se trouve justifié ;

Et attendu, en second lieu, qu'ayant constaté le nombre très important de marchés sur lesquels des pratiques anticoncurrentielles identiques avaient été...

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