Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 19 mars 2014, 11-22.194 12-28.921, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Savatier (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2014:C100279
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Bénabent et Jéhannin,SCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray
Docket Number11-22194,12-28921
Date19 mars 2014
Appeal Number11400279
Subject MatterPREUVE - Règles générales - Charge - Applications diverses - Jugement de séparation de biens - Tierce opposition - Action des créanciers d'un époux - Caractère frauduleux des modalités de l'acte de partage TIERCE OPPOSITION - Conditions d'exercice - Jugement de séparation de biens - Fraude aux droits des créanciers - Preuve - Charge - Détermination PREUVE - Règles générales - Charge - Demandeur - Applications diverses
CourtPremière Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2014, I, n° 48

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° B 11-22. 194 et J 12-28. 921 qui attaquent les mêmes arrêts ;

Sur l'irrecevabilité du pourvoi n° B 11-22. 194 relevée d'office, après avertissement délivré aux parties et après délibération de la chambre commerciale :

Vu l'article 613 du code de procédure civile ;

Attendu que Mme X... s'est pourvue en cassation, le 29 juillet 2011, contre deux arrêts rendus par défaut et susceptibles d'opposition ; qu'il n'est pas justifié de l'expiration du délai d'opposition à la date de ce pourvoi qui est en conséquence irrecevable ;

Sur le pourvoi n° J 12-28. 921 :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Douai, 22 mars 2010 et 19 mai 2011), qu'à la demande de Mme X..., agissant sur le fondement des articles 1443 et suivants du code civil, la séparation des biens des époux Y...- X... a été prononcée et la liquidation de leur communauté ordonnée par jugement du 14 septembre 2000 ; que M. B... (le liquidateur), liquidateur judiciaire de la Sccv Synergie Cals (la société Synergie Cals) dirigée par M. Y... , et la société Dexia banque Belgique (la banque) ont formé, le 22 janvier 2002, tierce opposition à ce jugement en application de l'article 1447 du code civil, soutenant que, le partage de communauté attribuant la quasi-totalité des biens des époux à Mme X..., les biens communs se trouvent soustraits aux poursuites des créanciers ; que, M. Y... ayant lui-même été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 6 février et 7 mai 2004, le liquidateur désigné, M. B..., a été assigné en intervention forcée, ainsi que M. Z... désigné en qualité de mandataire ad hoc par ordonnance du 17 novembre 2004 ;

Sur le premier moyen, qui est recevable comme étant de pur droit, après délibération de la chambre commerciale :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt du 22 mars 2010 de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les tierces oppositions du liquidateur de la société Synergie Cals et de la banque, alors, selon le moyen, que les créanciers d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective ne peuvent exercer une action individuelle tant qu'ils ne démontrent pas l'existence d'un préjudice personnel distinct de celui de la collectivité des créanciers, y compris lorsqu'il s'agit de former tierce opposition ; qu'en considérant qu'il importait peu que, du fait de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de M. Y... le 6 février 2004, converti en liquidation judiciaire le 6 mai 2005, le droit de poursuite individuelle de ses créanciers ait été suspendu et que cette procédure collective ne les privait pas de leur qualité de créancier, seule exigée pour l'exercice de la tierce opposition, la cour d'appel a méconnu le monopole reconnu aux organes de la procédure collective et violé l'article L. 621-39 du code de commerce issu de la loi du 10 juin 1994 ;

Mais attendu que le droit exclusif que l'article L. 621-39 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 10 juin 1994, confère au représentant des créanciers pour agir au nom et dans l'intérêt de ceux-ci ne fait pas obstacle à ce qu'un créancier exerce la tierce opposition ouverte par l'article 1447 du code civil contre le jugement qui prononce la séparation des biens des époux, s'il a été porté atteinte à ses droits ; qu'ainsi la cour d'appel a exactement retenu que la procédure collective ouverte à l'égard de M. Y... ne privait pas le liquidateur de la société et la banque, créanciers de M. Y... , de leur qualité de créanciers, seule exigée pour former tierce opposition ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1447, alinéa 2, du code civil, ensemble l'article 1315 du même code ;

Attendu que, lorsque des créanciers d'un époux forment tierce opposition à l'encontre d'un jugement de séparation de biens en arguant de fraude l'acte, consécutif à cette décision, de liquidation et partage de la communauté, il leur incombe de démontrer le caractère frauduleux des modalités de l'acte ;

Attendu que, pour confirmer le jugement qui a ordonné la « rétractation » de la décision de séparation de biens judiciaire et déclaré inopposable aux créanciers l'acte de liquidation de la communauté, la cour d'appel a fait supporter à Mme X... la charge de la preuve du bien-fondé des récompenses retenues dans l'acte ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il incombait aux créanciers de M. Y... de prouver le caractère frauduleux du principe et du montant des récompenses retenues dans l'acte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° B 11-22. 194 ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que l'arrêt du 22 mars 2010 a déclaré recevables les tierces oppositions de M. B..., ès qualités, et de la société Dexia banque Belgique, les arrêts rendus les 22 mars 2010 et 19 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société Dexia banque Belgique et la société B... et D..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° J 12-28. 921 par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué du 22 mars 2010 d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré recevables les tierces oppositions de Maître B..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Synergie Cals et de la société Dexia Banque ;

AUX MOTIFS QUE « sur la recevabilité de la tierce opposition ; que l'article 1447 du code civil dispose que si la séparation de biens a été prononcée en fraude de leurs droits, les créanciers d'un époux peuvent se pourvoir contre elle par voie de tierce opposition dans les conditions prévues au code de procédure civile ; que selon l'article 1298 du code de procédure civile les créanciers de l'un ou de l'autre des époux peuvent, dans l'année qui suit l'accomplissement des formalités de publication et notification du jugement prononçant la séparation de biens former tierce opposition audit jugement ; que le jugement du 14 septembre 2000 a été notifié à l'officier d'état civil le 23 janvier 2001 ; qu'il n'est pas contesté que l'assignation en tierce opposition du 22 janvier 2002 a été délivrée dans le délai d'un an ; que le litige porte sur la qualité de créancier des demandeurs à la tierce opposition ; sur la qualité de Maître B..., liquidateur judiciaire ; que par jugement du 12 janvier 2001 le tribunal de grande instance de Lille a prononcé la liquidation judiciaire de la SCCV Synergie Cals et nommé Me B... en qualité de liquidateur judiciaire ; que par jugement en date du 6 avril 2001 ce même tribunal a reporté la date de cessation des paiements de la société au 13 octobre 1999 ; que M. Y... a été mis en examen pour escroqueries, abus de confiance, faux en écritures et usage au préjudice notamment de la SCCV Synergie Cals, commis de 1996 à 1999, pour lesquels Me B..., liquidateur judiciaire de la SCCV Synergie Cals, s'est constitué partie civile devant le juge d'instruction ; que par ordonnance du juge d'instruction en date du 8 juillet 2002 M. Y... a été renvoyé devant le...

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