Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 12 septembre 2018, 14-19.589, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:CO00754
Case OutcomeCassation
Publication au Gazette officielBull. 2018, IV, n° 96.
CitationDans le même sens que : CJUE, arrêt du 14 novembre 2017, Association des producteurs vendeurs d'endives (APVE) e.a., C-671/15.
Appeal Number41800754
Date12 septembre 2018
Docket Number14-19589
CounselSCP Baraduc,Duhamel et Rameix,SCP Célice,Soltner,Texidor et Périer,SCP Piwnica et Molinié,SCP Marc Lévis
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Subject MatterCONCURRENCE - Pratique anticoncurrentielle - Entente illicite - Domaine d'application - Cas - Prix, quantitées mises sur le marché ou échanges d'informations stratégiques - Concertation entre différentes organisations de producteurs, associations d'organisations de producteurs ou entités non reconnues UNION EUROPEENNE - Concurrence - Entente et position dominante - Entente - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Concertation sur les prix ou sur les quantités mises sur le marché ou échanges d'informations stratégiques - Conditions - Pratiques entre membres d'une organisation de producteurs ou d'une association d'organisations de producteurs reconnue
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, saisie par le ministre chargé de l'économie de la situation de la concurrence dans le secteur de la production et de la commercialisation des endives, l'Autorité de la concurrence (l'Autorité) a, par une décision n° 12-D-08 du 6 mars 2012, dit établi que l'Association des producteurs d'endives de France (l'APEF), l'Association des producteurs vendeurs d'endives (l'APVE), le Comité économique fruits et légumes du Nord de la France (le CELFNORD), le Comité économique régional agricole fruits et légumes (le CERAFEL), la Fédération du commerce de l'endive (la FCE), la Fédération nationale des producteurs d'endives (la FNPE), devenue l'Union des endiviers, la Section nationale endives (la SNE), la société Groupe Perle du Nord et les organisations de producteurs Cap'endives, Fraileg, France endives, Marché de Phalempin, Primacoop, Prim'Santerre, Soleil du Nord, Sipema et Valois-Fruits avaient enfreint les dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité CE, devenu l'article 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et de l'article L. 420-1 du code de commerce, en participant à une entente complexe et continue sur le marché français, ayant consisté en une concertation sur le prix et sur les quantités d'endives mises sur le marché et en un système d'échanges d'informations stratégiques ayant servi à mettre en place une police des prix, ces pratiques ayant eu pour objet la fixation en commun d'un prix minimum de vente à la production d'endives et ayant permis aux producteurs et à plusieurs de leurs organisations professionnelles de maintenir des prix de vente minima, et ce, pendant une période ayant débuté en janvier 1998 et toujours en cours à la date de la décision ; que des sanctions pécuniaires ont été prononcées ; que la cour d'appel, par l'arrêt attaqué, a réformé la décision de l'Autorité et dit qu'il n'était pas établi que les entités en cause avaient enfreint les dispositions des articles 101, paragraphe 1, TFUE et L. 420-1 du code de commerce ; que la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, estimant qu'il existait une difficulté sérieuse quant à l'interprétation des règlements portant organisation commune des marchés (OCM), dans le secteur des fruits et légumes, et l'étendue des "dérogations spécifiques", selon la terminologie employée par la Commission européenne dans ses observations d'amicus curiae, aux règles de concurrence que ces règlements étaient susceptibles de contenir dans leurs dispositions relatives aux organisations de producteurs (OP) et leurs associations (AOP), notamment au regard de l'objectif de régularisation des prix à la production assigné à ces organisations, a sursis à statuer sur le pourvoi formé par le président de l'Autorité et a interrogé, à titre préjudiciel, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) ;

Attendu que par un arrêt du 14 novembre 2017 (C-671/15), la CJUE a dit pour droit :

L'article 101 TFUE, lu conjointement avec l'article 2 du règlement n° 26 du Conseil, du 4 avril 1962, portant application de certaines règles de concurrence à la production et au commerce des produits agricoles, l'article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 2200/96 du Conseil, du 28 octobre 1996, portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes, l'article 2 du règlement (CE) n° 1184/2006 du Conseil, du 24 juillet 2006, portant application de certaines règles de concurrence à la production et au commerce de certains produits agricoles, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil, du 22 octobre 2007, l'article 3, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1182/2007 du Conseil, du 26 septembre 2007, établissant des règles spécifiques pour le secteur des fruits et légumes, modifiant les directives 2001/112/CE et 2001/113/CE ainsi que les règlements (CEE) n° 827/68, (CE) n° 2200/96, (CE) n° 2201/96, (CE) n° 2826/2000, (CE) n° 1782/2003 et (CE) n° 318/2006, et abrogeant le règlement (CE) n° 2202/96, ainsi que l'article 122, premier alinéa, et les articles 175 et 176 du règlement n° 1234/2007, tel que modifié par le règlement (CE) n° 491/2009 du Conseil, du 25 mai 2009, doit être interprété en ce sens que :

- des pratiques qui portent sur la fixation collective de prix minima de vente, sur une concertation relative aux quantités mises sur le marché ou sur des échanges d'informations stratégiques, telles que celles en cause au principal, ne peuvent être soustraites à l'interdiction des ententes prévue à l'article 101, paragraphe 1, TFUE lorsqu'elles sont convenues entre différentes organisations de producteurs ou associations d'organisations de producteurs, ainsi qu'avec des entités non reconnues par un État membre aux fins de la réalisation d'un objectif défini par le législateur de l'Union européenne dans le cadre de l'organisation commune du marché concerné, telles que des organisations professionnelles ne disposant pas du statut d'organisation de producteurs, d'association d'organisations de producteurs ou d'organisation interprofessionnelle au sens de la réglementation de l'Union européenne,

- des pratiques qui portent sur une concertation relative aux prix ou aux quantités mises sur le marché ou sur des échanges d'informations stratégiques, telles que celles en cause au principal, peuvent être soustraites à l'interdiction des ententes prévue à l'article 101, paragraphe 1, TFUE lorsqu'elles sont convenues entre membres d'une même organisation de producteurs ou d'une même association d'organisations de producteurs reconnue par un État membre et qu'elles sont strictement nécessaires à la poursuite du ou des objectifs assignés à l'organisation de producteurs ou à l'association d'organisations de producteurs concernée en conformité avec la réglementation de l'Union européenne ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le président de l'Autorité fait grief à l'arrêt de réformer la décision n° 12-D-08 et de dire qu'il n'est pas établi que les entités en cause ont enfreint les dispositions de l'article 101, paragraphe 1, TFUE et de l'article L. 420-1 du code de commerce alors, selon le moyen :

1°/ que les règles de concurrence sont applicables à l'ensemble des accords, décisions et pratiques qui se rapportent à la production ou au commerce des produits agricoles et ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, sous réserve de trois dérogations appliquées de manière restrictive ; qu'en jugeant que "la primauté des objectifs de la politique agricole commune a été rappelée de manière constante par la jurisprudence communautaire", la cour d'appel a violé les articles 42, 101 et 288 TFUE, 1 et 2 du règlement n° 26/62 du Conseil du "20 avril 1962", 1 et 2 du règlement (CEE) n° 1184/2006 du Conseil du 24 juillet 2006, 175 et 176 du règlement (CEE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 et L. 420-1 du code de commerce ;

2°/ que les articles 101 à 106 TFUE s'appliquent par principe à l'ensemble des accords, décisions et pratiques qui se rapportent à la production ou au commerce des produits agricoles et ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ; que par exception, l'article 101, paragraphe 1, TFUE ne s'applique pas à de tels accords, décisions et pratiques lorsqu'ils font partie intégrante d'une organisation nationale de marché, ou lorsqu'ils sont nécessaires à la réalisation des objectifs de la politique agricole commune, ou encore lorsqu'ils ont été mis en oeuvre par des exploitants agricoles, associations d'exploitants agricoles ou associations de ces associations ressortissant à un seul État membre, dans la mesure où, sans comporter l'obligation de pratiquer un prix déterminé, ils concernent la production ou la vente de produits agricoles ou l'utilisation d'installations communes de stockage, de traitement ou de transformation de produits agricoles ; qu'en jugeant que les règles de concurrence relatives aux accords, décisions et pratiques visés par les articles 101 TFUE et L. 420-1 du code de commerce ne s'appliquaient à la production et au commerce des produits agricoles que dans la mesure où leur application ne met pas en péril la réalisation des objectifs de la PAC et n'entrave pas le fonctionnement des organisations nationales des marchés agricoles, la cour d'appel a inversé le principe et les exceptions et a ainsi violé les articles 101 et 288 TFUE, 1 et 2 du règlement n° 26/62 du Conseil du "20 avril 1962", 1 et 2 du règlement (CE) n° 1184/2006 du Conseil du 24 juillet 2006, 175 et 176 du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 et L. 420-1 du code de commerce ;

3°/ que la Commission européenne a compétence exclusive pour constater pour quels accords, décisions et pratiques les conditions d'exemption relatives à la production et au commerce des produits agricoles sont remplies ; qu'en s'appuyant sur les objectifs de la politique agricole commune pour écarter l'analyse de l'Autorité de la concurrence selon laquelle en l'absence de décision de la Commission européenne, les organismes poursuivis n'étaient pas recevables à se prévaloir de la justification des pratiques au titre du régime spécifique au secteur agricole en application de l'article 2 du règlement (CE) n° 1184/2006, la cour d'appel a violé les articles 42, 101 et 288 TFUE, 1 et 2 du règlement n° 26/62 du Conseil du "20 avril 1962", 1 et 2 du règlement (CE) n° 1184/2006 du Conseil du 24 juillet 2006, 175 et 176 du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 et L. 420-1 du code de commerce ;

4°/ que l'article 101, paragraphe 1, TFUE ne s'applique pas à des accords, décisions et pratiques anticoncurrentiels lorsqu'ils font partie intégrante d'une organisation nationale de marché ; qu'en énonçant que : "les règles de concurrence (...) ne s'appliquent à la production et au commerce des produits...

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