Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 décembre 2018, 18-23.655, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Cathala (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:SO01883
Case OutcomeRejet
Docket Number18-23655
CitationN2 >Sur la définition de la notion d'"autonomie de gestion", nécessaire à la caractérisation d'un établissement distinct, cf. : CE, 29 juin 1973, n° 77982, publié au Recueil Lebon ;CE, 27 mars 1996, n° 155791, publié au Recueil Lebon
Appeal Number51801883
Date19 décembre 2018
CounselSCP Célice,Soltner,Texidor et Périer,SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Subject MatterTRIBUNAL D'INSTANCE - Compétence - Compétence matérielle - Elections professionnelles - Comité social et économique - Nombre et périmètre des établissements distincts - Recours contre la décision de l'autorité administrative - Office du juge - Détermination - Portée
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Saint-Denis, 11 octobre 2018), qu'à la suite de l'échec des négociations menées entre la direction et les organisations syndicales du groupe public ferroviaire (le groupe SNCF) pour la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts des trois établissements publics industriels et commerciaux (EPIC) composant le groupe, la direction de la SNCF a fixé unilatéralement, par deux décisions des 19 février et 23 mars 2018, le périmètre des trente-trois établissements distincts retenus pour la mise en place des comités sociaux et économiques au sein des trois EPIC ; que deux organisations syndicales, la fédération nationale CGT des travailleurs, cadres et techniciens des chemins de fer français et la fédération des syndicats de travailleurs du rail, solidaires, unitaires et démocratiques (fédération Sud Rail), ont saisi la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) pour contester ces décisions ; que la DIRECCTE a, par décision du 30 mai 2018, fixé le nombre et le périmètre des établissements distincts selon les mêmes modalités que celles figurant dans la décision de l'employeur ; que les deux organisations syndicales ont formé un recours contre la décision de la DIRECCTE devant le tribunal d'instance ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la fédération Sud Rail fait grief au jugement de fixer le nombre d'établissements distincts pour la mise en place des comités sociaux et économiques au sein des trois EPIC composant le Groupe public ferroviaire comme suit : pour l'EPIC SNCF, un établissement, pour l'EPIC SNCF mobilités, vingt-six établissements et pour l'EPIC SNCF réseau, six établissements, et de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article L. 2313-5 du code du travail que la décision de l'autorité administrative prise sur recours formé contre la décision unilatérale de l'employeur relative au nombre et au périmètre des établissements distincts peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; que le législateur doit être regardé comme ayant ainsi défini un bloc de compétence au profit du juge judiciaire ; qu'il appartient au juge judiciaire, dans le cadre de ce recours, de contrôler tant la régularité que le bien-fondé de la décision administrative en litige, et de sanctionner, notamment, une méconnaissance par son auteur des principes du contradictoire et d'impartialité ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance de Saint-Denis a jugé qu'il ne pouvait annuler la décision de la DIRECCTE du 30 mai 2018 ou même en apprécier la légalité, compte tenu de la séparation des autorités judiciaires et administratives, et a en conséquence estimé qu'il n'avait pas à se prononcer sur les moyens tirés de la méconnaissance des principes du contradictoire et d'impartialité par la DIRECCTE invoqués devant lui ; qu'en statuant ainsi, le tribunal d'instance a violé l'article L. 2313-5 du code du travail, ensemble le principe de séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 sur l'organisation judiciaire et le décret du 16 Fructidor An III, et partant entaché sa décision d'un excès de pouvoir négatif ;

2°/ qu'il résulte de l'article L. 2313-5 du code du travail que la décision de l'autorité administrative prise sur recours formé contre la décision unilatérale de l'employeur relative au nombre et au périmètre des établissements distincts peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; que le législateur doit être regardé comme ayant ainsi défini un bloc de compétence au profit du juge judiciaire ; qu'il appartient au juge judiciaire, dans le cadre de ce recours, de contrôler tant la régularité que le bien-fondé de la décision administrative en litige, et de sanctionner, notamment, une méconnaissance par son auteur des principes du contradictoire et d'impartialité ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance de Saint-Denis a jugé qu'il ne pouvait annuler la décision de la DIRECCTE du 30 mai 2018 ou même en apprécier la légalité, compte tenu de la séparation des autorités judiciaires et administratives, et a en conséquence estimé qu'il n'avait pas à se prononcer sur les moyens tirés de la méconnaissance des principes du contradictoire et d'impartialité par la DIRECCTE invoqués devant lui, ce dont il s'évince qu'il a privé de tout recours effectif les parties pour faire sanctionner la méconnaissance de ces principes essentiels ; qu'en statuant ainsi, le premier juge a violé l'article L. 2313-5 du code du travail, l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ensemble les articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ qu'il résulte de l'article L. 2313-5 du code du travail que la décision de l'autorité administrative prise sur recours formé contre la décision unilatérale de l'employeur relative au nombre et au périmètre des établissements distincts peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; que le législateur doit être regardé comme ayant ainsi défini un bloc de compétence au profit du juge judiciaire ; qu'il appartient au juge judiciaire, dans le cadre de ce recours, de contrôler tant la régularité que le bien-fondé de la décision administrative en litige, et de sanctionner, notamment, une méconnaissance par son auteur du principe du contradictoire ; qu'en l'espèce, en omettant de répondre au moyen tiré par l'exposante de la violation du principe du contradictoire par la DIRECCTE, le tribunal d'instance de Saint-Denis a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en méconnaissance de l'article 455 du code procédure civile ;

4°/ qu'il résulte de l'article L. 2313-5 du code du travail que la décision de l'autorité administrative prise sur recours formé contre la décision unilatérale de l'employeur relative au nombre et au périmètre des établissements distincts peut faire l'objet d'un recours devant le juge judiciaire, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; que le législateur doit être regardé comme ayant ainsi défini un bloc de compétence au profit du juge judiciaire; qu'il appartient au juge judiciaire, dans le cadre de ce recours, de contrôler tant la régularité que le bien-fondé de la décision administrative en litige, et de sanctionner, notamment, une méconnaissance par son auteur du principes d'impartialité ; qu'en l'espèce, en omettant de répondre au moyen tiré par l'exposante de la violation du principe d'impartialité par la DIRECCTE, le tribunal d'instance de Saint-Denis a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en méconnaissance de l'article 455 du code procédure civile.

Mais attendu qu'en application de l'article L. 2313-5 du code du travail, relèvent de la compétence du tribunal d'instance, en dernier ressort, à l'exclusion de tout autre recours, les contestations élevées contre la décision de l'autorité administrative fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts ; qu'il appartient en conséquence au tribunal d'instance d'examiner l'ensemble des contestations, qu'elles portent sur la légalité externe ou sur la légalité interne de la décision de la DIRECCTE, et, s'il les dit mal fondées, de confirmer la décision, s'il les accueille partiellement ou totalement, de statuer à nouveau, par une décision se substituant à celle de l'autorité administrative, sur les questions demeurant en litige ;

Et attendu que si le tribunal d'instance a, par un motif justement critiqué par le moyen, décliné sa compétence pour statuer sur les griefs relatifs à la régularité formelle de la décision administrative, il a statué sur le fond, en fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein des trois EPIC ; qu'il s'ensuit que le moyen, qui reproche au jugement de ne pas s'être prononcé sur des griefs visant à l'annulation de la décision administrative, est inopérant ;

Sur le second moyen :

Attendu que la fédération Sud Rail fait le même grief au jugement, alors, selon le moyen :

1°/ que selon l'article L. 2313-4 du code du travail, l'existence d'un établissement distinct au sein duquel doit être créé un comité social et économique d'établissement s'apprécie au regard de « l'autonomie de gestion du responsable de l'établissement, notamment en matière de gestion du personnel » ; que cette autonomie de gestion doit seulement être suffisante, dans plusieurs de ses aspects (gestion du personnel et gestion de l'activité économique), compte tenu de l'objectif poursuivi, qui est de permettre au responsable d'établissement de présider utilement ce comité, c'est-à-dire l'informer, le consulter et engager un dialogue utile avec ses membres, sans impliquer une indépendance totale de l'établissement par rapport à la structure centrale d'entreprise ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations du tribunal que la Fédération Sud-Rail a produit un référentiel « Ressources Humaines « Garanties disciplinaires et sanctions », dont il résulte que le directeur d'établissement a le pouvoir de prononcer des sanctions ; qu'en estimant cependant que l'autonomie de gestion du personnel n'était pas caractérisée, au motif inopérant que dans certains cas le directeur d'établissement pouvait seulement proposer la sanction, dans le cadre d'une procédure organisée par le chargé des relations sociales, le directeur de Gares & Connexions devant donner son avis, tandis que cela n'excluait pas un degré suffisant d'autonomie du directeur d'établissement dans la gestion du personnel, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2313-4 du code du travail ;

2°/ que selon l'article L. 2313-4 du code du...

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