Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 3 avril 2019, 18-11.247, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2019:CO00348
Case OutcomeRejet et cassation partielle
CounselSARL Cabinet Briard,SCP Baraduc,Duhamel et Rameix
Appeal Number41900348
Date03 avril 2019
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Docket Number18-11247
Subject MatterENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Patrimoine - Revendication - Action en revendication - Absence de revendication dans le délai légal - Sanction - Inopposabilité du droit de propriété à la procédure collective - Absence de transfert du bien non revendiqué dans le patrimoine du débiteur
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CM

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 3 avril 2019


Cassation partielle


Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 348 FS-P+B+R

Pourvoi n° X 18-11.247


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. T... B..., domicilié [...], en qualité de liquidateur judiciaire de la société BMC, contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2017 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 1), dans le litige l'opposant à la société Philippe travaux publics, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation ;

La société Philippe travaux publics a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 mars 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Guérin, Mme Vallansan, M. Remeniéras, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, conseillers, Mme Schmidt, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mmes Kass-Danno, Lion, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. B..., de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Philippe travaux publics, l'avis de Mme Henry, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. B..., en sa qualité de liquidateur de la société BMC, que sur le pourvoi incident relevé par la société Philippe travaux publics ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 12 décembre 2012, la société Philippe travaux publics (la société Philippe) a donné à bail une pelle hydraulique à la société BMC, pour une durée de trente-deux mois ; que par un jugement du 25 février 2014 publié au BODACC le 25 mars 2014, un tribunal a mis en redressement judiciaire la société BMC et désigné M. B... mandataire judiciaire ; que le 10 avril 2014, la société BMC a informé son assureur que la pelle hydraulique avait subi un sinistre, à la suite de son immersion dans un étang ; que par un jugement du 7 octobre 2014, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la société BMC et a nommé M. B... liquidateur ; que le 21 novembre 2014, la société Philippe a fait procéder à l'enlèvement de la pelle hydraulique dans l'étang et en a repris possession sans avoir exercé au préalable une action en revendication ; qu'ayant vainement mis en demeure la société Philippe de restituer la pelle au commissaire-priseur en vue de son adjudication, le liquidateur l'a assignée aux mêmes fins ;

Sur le second moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 624-9 du code de commerce ;

Attendu que la sanction de l'absence de revendication par le propriétaire d'un bien dans le délai prévu par l'article L. 624-9 du code de commerce ne consiste pas à transférer ce bien non revendiqué dans le patrimoine du débiteur mais à rendre le droit de propriété sur ce bien inopposable à la procédure collective, ce qui a pour effet d'affecter le bien au gage commun des créanciers, permettant ainsi, en tant que de besoin, sa réalisation au profit de leur collectivité ou son utilisation en vue du redressement de l'entreprise, afin d'assurer la poursuite de l'activité, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif ; que s'il en résulte une restriction aux conditions d'exercice du droit de propriété de celui qui s'est abstenu de revendiquer son bien, cette atteinte est prévue par la loi et se justifie par un motif d'intérêt général, dès lors que l'encadrement de la revendication a pour but de déterminer rapidement et avec certitude les actifs susceptibles d'être appréhendés par la procédure collective afin qu'il soit statué, dans un délai raisonnable, sur l'issue de celle-ci dans l'intérêt de tous ; que ne constitue pas, en conséquence, une charge excessive pour le propriétaire l'obligation de se plier à la discipline collective générale inhérente à toute procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaires, en faisant connaître sa position quant au sort de son bien, dans les conditions prévues par la loi et en jouissant des garanties procédurales qu'elle lui assure quant à la possibilité d'agir en revendication dans un délai de forclusion de courte durée mais qui ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir ;

Attendu que pour dire que l'application des dispositions de l'article L. 624-9 du code de commerce au contrat de location litigieux constitue une ingérence disproportionnée dans le droit de propriété de la société Philippe, écarter l'application de ces dispositions au litige et rejeter la demande de restitution de la pelle hydraulique présentée par le liquidateur, l'arrêt retient qu'au cas d'espèce, l'inopposabilité du droit de propriété aux organes de la procédure collective porte une atteinte au droit de propriété du bailleur puisque celui-ci se retrouve définitivement privé du droit de jouir et de disposer de sa chose par la réalisation des actifs au stade de la liquidation, qu'il est établi qu'en avril 2014, la grue louée s'est retrouvée immergée dans un étang, ce qui a dégradé le moteur, et que le mandataire judiciaire ne justifie d'aucune démarche faite pour extraire le bien loué de l'étang et pour le réparer ; qu'il retient encore que les objectifs de permettre la sauvegarde de l'entreprise et le maintien de l'activité et de l'emploi ne sauraient justifier l'atteinte au droit de propriété du bailleur, que le seul objectif de permettre l'apurement du passif ne...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT