Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 27 mars 2019, 17-26.646, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2019:CO00270
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Fabiani,Luc-Thaler et Pinatel,de Lanouvelle et Hannotin,SCP Nicolaý
Appeal Number41900270
Date27 mars 2019
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Docket Number17-26646
Subject MatterAPPEL CIVIL - Délai - Jugement d'avant dire droit - Délai d'appel - Point de départ - Détermination
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LM

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mars 2019


Cassation partielle


Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 270 F-P+B

Pourvoi n° Q 17-26.646




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois additionnel et principal formés par la société Détroyat associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], contre les arrêts rendus les 24 mai 2016 et 10 août 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. C... U... R... F..., domicilié [...],

2°/ à la société Analyses traitements parisiens (ATP), société par actions simplifiée, dont le siège est [...], défendeurs à la cassation ;

M. U... R... F... et la société Analyses traitements parisiens (ATP) ont formé un pourvoi incident contre l'arrêt du 10 août 2017 ;

La demanderesse au pourvoi principal et au pourvoi additionnel invoque, à l'appui de ses recours, cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 5 février 2019, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Détroyat associés, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. U... R... F... et de la société Analyses traitements parisiens (ATP), et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Statuant tant sur les pourvois principal, dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 août 2017, et additionnel, dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mai 2016, formés par la société Détroyat associés (la société Détroyat), que sur le pourvoi incident relevé par M. R... F... (M. R...) et la société ATP, et dirigé contre l'arrêt du 10 août 2017 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, qu'entre 2005 et 2007, la société ATP, détenue par M. R..., a cédé à la société Adel, détenue par MM. W... et V..., les parts qu'elle détenait dans le capital de la société anonyme Détroyat ; que le 15 octobre 2007, jour de la cession du solde des actions de la société Détroyat, M. R... a démissionné de ses fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général de cette société ; que, reprochant à M. R... des fautes de gestion, la société Détroyat l'a assigné, ainsi que la société ATP, en responsabilité ; que par jugement du 28 juin 2012, le tribunal de grande instance a rejeté les fins de non-recevoir tirées de la prescription d'une partie des demandes, a dit les demandes de la société Détroyat recevables et a ordonné avant dire droit une mesure d'expertise ; que par jugement du 19 février 2015, ce tribunal a condamné M. R... à payer à la société Détroyat diverses sommes à titre de dommages-intérêts ; que le 3 mars 2015, la société Détroyat a fait signifier à M. R... et à la société ATP le premier jugement ; que M. R..., par déclaration unique du 6 août 2015, et la société ATP, par déclaration unique du 7 août 2015, ont relevé appel des deux jugements ; que, par le premier arrêt, la cour d'appel a déclaré recevables les appels formés à l'encontre du jugement du 28 juin 2012 ; que, par le second, elle a notamment condamné M. R... à payer à la société Détroyat des dommages-intérêts en réparation de différents préjudices ;

Sur le moyen unique du pourvoi additionnel, dont l'examen est préalable :

Attendu que la société Détroyat fait grief à l'arrêt du 24 mai 2016 de déclarer recevables les appels relevés par M. R... et par la société ATP du jugement du 28 juin 2012 alors, selon le moyen, qu'aucune voie de recours ne peut être exercée contre un jugement avant dire droit avant le prononcé du jugement au fond ; que l'appel formé contre un jugement avant dire droit suit le droit commun des voies de recours dès lors qu'il est valablement signifié à l'adversaire après le prononcé du jugement au fond, indépendamment du délai d'appel de ce dernier ; qu'au cas présent, la société Détroyat a signifié à M. R... et à la société ATP le jugement avant dire droit rendu le 28 juin 2012 par un acte d'huissier en date du 3 mars 2015, et cela postérieurement au prononcé du jugement sur le fond du 19 février 2015, de sorte que le délai d'appel d'un mois contre le jugement avant dire droit courait à compter de sa signification ; qu'en considérant cependant que nonobstant la signification du jugement avant dire droit, le délai d'appel contre cette décision n'avait pas commencé à courir, la cour d'appel a violé les articles 528, 538 et 545 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, selon l'article 545 du code de procédure civile, les jugements avant dire droit ne peuvent être frappés d'appel indépendamment des jugements sur le fond ; qu'il en résulte que le délai pour interjeter appel des premiers ne court qu'à compter du point de départ du délai pour former appel contre les seconds ; qu'ayant relevé que le jugement sur le fond n'avait pas été notifié, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le délai d'appel de cette décision n'avait pas commencé à courir, de sorte que l'appel du jugement du 28 juin 2012, qui ne pouvait être relevé indépendamment du jugement sur le fond et qui l'avait été en l'espèce par une même déclaration visant les deux décisions, était recevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur les premier, deuxième et quatrième moyens du pourvoi principal et les trois moyens du pourvoi incident :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que pour condamner M. R... à payer à la société Détroyat la somme de 80 000 euros, outre les intérêts, au titre de la location d'oeuvres d'art par cette société, l'arrêt du 10 août 2017 retient que le montant de l'indemnisation tient compte des déductions des factures sur le résultat fiscal dont a pu bénéficier la société ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions fiscales frappant les revenus sont sans incidence sur les obligations des personnes responsables du dommage et le calcul de l'indemnisation des victimes, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi additionnel et le pourvoi incident ;

Mais sur le pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. R... F... à payer à la société Détroyat associés, outre les intérêts, la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts pour la location des oeuvres d'art, l'arrêt rendu le 10 août 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Détroyat associés aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette ses demandes et la condamne à payer à M. R... F... et à la société ATP la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits au pourvoi principal et au pourvoi additionnel par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Détroyat associés

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement du 28 juin 2012 en ce qu'il a dit recevables les demandes d'indemnisation au titre du bail de 1998, de l'absence de redimensionnement des locaux avant le bail du 9 mars 2005 et des frais non justifiés enregistrés en comptabilité antérieurement au 7 mars 2005, et d'avoir, statuant à nouveau de ces chefs, déclaré irrecevables comme étant prescrites les demandes d'indemnisation au titre du bail de 1998, de l'absence de redimensionnement des locaux avant le bail du 9 mars 2005 et des frais non justifiés enregistrés en comptabilité antérieurement au 7 mars 2005 ;

Aux motifs que « sur la recevabilité, la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de Détroyat à l'encontre d'ATP, qui avait été rejetée par le tribunal, n'est pas reprise en cause d'appel ; que les appelants opposent aux seules demandes de dommages et intérêts relatives aux notes de frais, au transfert du parking et à la conclusion des baux, une fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale de l'article L 225-254 du code du commerce, aux termes duquel « L'action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général tant sociale, qu'individuelle se prescrit par trois ans à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé à compter de sa révélation [....] », faisant valoir que le point de départ de la prescription est, en l'absence de dissimulation établie, celle de la date du fait dommageable, c'est à dire la date de la faute alléguée ; que tandis que Détroyat soutient que les faits incriminés ayant été dissimulés pendant la période de gestion de M. R..., le dommage ne s'est révélé qu'à partir de sa démission, le 15 octobre 2007, cette date constituant le point de départ du délai de prescription, qui a été...

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