Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 24 juin 2020, 18-10.464, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2020:CO00261
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Boré,Salve de Bruneton et Mégret,de Lanouvelle et Hannotin,SCP Nicolaÿ
Appeal Number42000261
Date24 juin 2020
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
Docket Number18-10464
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 juin 2020




Cassation partielle


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 261 F-P+B

Pourvoi n° W 18-10.464




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 24 JUIN 2020

La société Feeder, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° W 18-10.464 contre l'arrêt n° RG : 15/20271 rendu le 3 octobre 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre A), dans le litige l'opposant au directeur général des douanes et droits indirects, domicilié [...], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Feeder, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du directeur général des douanes et droits indirects, après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Feeder, spécialisée dans le commerce d'écrans informatiques, a importé des écrans à cristaux liquides pour les besoins de son activité ; qu‘à la suite d'un contrôle a posteriori, l'administration des douanes et droits indirects a contesté la position tarifaire sous laquelle ces écrans avaient été déclarés, en estimant que ceux-ci relevaient de la position 85.28, et lui a notifié en 2005, 2007 et 2009 quatre procès-verbaux d'infractions pour fausses déclarations d'espèces ; que par un arrêt du 19 février 2009, la Cour de justice des Communautés européennes, saisie d'une question préjudicielle sur la position tarifaire 84.71, a dit que les moniteurs susceptibles de reproduire des signaux provenant non seulement d'une machine automatique de traitement de l'information, mais également d'autres sources, ne pouvaient être exclus de cette position (CJUE, 19 février 2009, Kamino International Logistics, C-376/07) ; que par une lettre du 21 octobre 2010, la société Feeder a demandé le remboursement des droits acquittés au bureau de Marignane au titre de la période de janvier 2006 à juillet 2010 ; qu'en l'absence de réponse du directeur régional des douanes, la société Feeder l'a assigné en restitution de ces droits ; que durant l'instance, l'administration des douanes lui a remboursé les droits acquittés depuis le 21 octobre 2007 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Feeder fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite sa demande de restitution des droits acquittés avant le 21 octobre 2007 alors, selon le moyen :

1°/ que les dispositions de l'article 354 du code des douanes, interprétées à la lumière du principe d'égalité des armes, impliquent que la notification d'un procès-verbal de douane interrompt la prescription tant en faveur de l'administration que des contribuables ; qu'au cas présent, la cour d'appel a écarté cette portée symétrique et égalitaire de la notification au motif abstrait que l'asymétrie de portée du procès-verbal au regard de la prescription pourrait être justifiée « par la nécessité d'un bon exercice des fonctions publiques » ; qu'en statuant ainsi, cependant que la « nécessité » visée n'est en rien justifiée, la cour d'appel, qui a consacré une rupture flagrante dans l'égalité des armes, a violé l'article 354 du code des douanes, ensemble le principe d'égalité des armes et l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

2°/ que les dispositions de l'article 352 ter du code des douanes, qui visent sans distinction l'ensemble des droits et taxes « recouvrés par les agents de la direction générale des douanes et des droits indirects » (DGDDI), ont vocation à s'appliquer aussi bien aux droits et taxes perçus en application de textes nationaux qu'à ceux perçus en application de textes communautaires ; qu'au cas présent, pour écarter le moyen tiré de ce que l'action en répétition formée par la société Feeder pouvait s'inscrire dans le cadre de l'article 352 ter du code des douanes, la cour d'appel a retenu que ce texte ne viserait que la situation où le texte fondant la perception serait un texte national, cependant que « les droits en cause résultent de l'application de textes communautaires », qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas correctement perçu le champ d'application du texte visé, a violé l'article 352 ter du code des douanes, ensemble le principe communautaire d'équivalence ;

3°/ que les dispositions de l'article 352 ter du code des douanes ont vocation à s'appliquer non seulement dans le cas où l'invalidité d'un texte a été révélée par une décision juridictionnelle, mais aussi dans celui où l'illégalité de la pratique des autorités douanières nationales résulte de l'interprétation d'un texte communautaire donnée par une décision préjudicielle de la Cour de justice de l'Union européenne ; qu'au cas présent, pour écarter l'application de ce texte en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu'elle était en présence d'une situation d'interprétation d'une norme douanière par la Cour de justice de l'Union européenne, cependant que le texte en cause s'appliquerait uniquement aux cas d'invalidation ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'eu égard à l'office du juge de l'Union européenne, les deux situations (interprétation et invalidation) devaient être considérées comme équivalentes, la cour d'appel a violé l'article 352 ter du code des douanes, ensemble l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

4°/ qu'à défaut d'être enfermée dans un délai de prescription et de reprise (ou de répétition) fixé par la loi, l'action en répétition de l'indu fondée sur une interprétation inédite d'une norme douanière consacrée par la Cour de justice de l'Union européenne obéit au droit commun ; qu'au cas présent, la cour d'appel a considéré (à tort) que l'action en répétition de la société Feeder ne relevait pas du champ d'application de l'article 352 ter du code des douanes ; qu'il s'en déduisait qu'elle relevait du droit commun de la répétition de l'indu ; qu'en écartant cette déduction logique au motif qu'il conviendrait alors d'appliquer la prescription triennale propre à l'action en réclamation douanière, la cour d'appel, qui a confondu réclamation et répétition, pour faire jouer un effet de purge automatique à l'expiration du délai de trois ans suivant le paiement et exclure ainsi tout effet utile à l'inauguration d'une jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne contraire à une pratique nationale, a violé les règles et principes relatifs à la répétition de l'indu, ensemble le principe...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT