Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 4 mai 2016, 15-80.215, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Guérin
ECLIECLI:FR:CCASS:2016:CR01655
Case OutcomeCassation partielle
CounselSCP Boré et Salve de Bruneton,SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer
Docket Number15-80215
Date04 mai 2016
Appeal NumberC1601655
Subject MatterBLANCHIMENT - Eléments constitutifs - Elément matériel - Importation de fonds provenant d'un délit douanier
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin criminel 2016, n° 136

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Jean-Jacques Y...,
- M. Alain Z...,
- La société de courtage et de transit,
- L'administration des douanes partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 9 décembre 2014, qui, pour exportation sans déclaration de marchandises prohibées et blanchiment douanier les a condamnés solidairement à deux amendes douanières ;


La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 9 mars 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Chaubon, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de Mme le conseiller CHAUBON, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON, de la société civile professionnelle MEIER-BOURDEAU et LÉCUYER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires, commun aux demandeurs, le mémoire en défense, et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et de pièces de procédure que des contrôles effectués par les services douaniers sur des exportations de marchandises à destination de l'Algérie, ont révélé l'existence de déclarations falsifiées enregistrées par la Société de Courtage et de Transit (SCTI), commissionnaire en douanes agréée ; que les enquêteurs ont obtenu, par ordonnance du juge des libertés et de la détention, une autorisation de visite des locaux de ladite société ; qu'à l'occasion de cette visite, ont été découverts, d'une part, des documents douaniers d'exportation revêtus d'une empreinte falsifiée du cachet douanier du bureau de la douane du port de Marseille, le cachet original ayant été reproduit par photocopie, qui avaient été transmis à des exportateurs français pour leur permettre de posséder la preuve de l'exportation en dehors de la Communauté européenne et, d'autre part, des factures de ventes de marchandises réalisées hors taxes établies par la société SCTI à l'ordre de plusieurs de ses clients algériens ainsi que des transferts de fonds, sur ses comptes, en règlement desdites factures, d'un montant total de plus de 6 000 000 euros ; qu'après notification, le 10 décembre 2012, d'un procès-verbal d'infraction, MM. Y... et Z... et la société SCTI, ont été cités par l'administration des douanes devant le tribunal correctionnel des chefs d'exportation sans déclaration de marchandises prohibées et de blanchiment douanier ; que le tribunal correctionnel les a renvoyés des fins de la poursuite ; que l'administration des douanes a interjeté appel du jugement ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 64, 65 du code des douanes, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe du respect des droits de la défense ;

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté les exceptions de nullité de la poursuite du chef de blanchiment douanier ;

" aux motifs propres que les prévenus soulèvent la nullité des poursuites du chef de blanchiment douanier fondées sur l'exploitation de pièces découvertes lors d'une visite domiciliaire autorisée par ordonnance du 19 février 2010 par le juge des libertés et de la détention qui ne visait pas le délit de blanchiment douanier ; que le tribunal, à juste titre, a écarté cette exception de nullité, la saisie initiale des pièces était régulière et la découverte ultérieure d'autres délits que ceux visés dans l'ordonnance autorisant la visite domiciliaire n'était pas le fruit d'un détournement de procédure mais le seul résultat de l'exploitation de pièces régulièrement saisies ; que, de même, sera rejetée la nullité tirée d'un détournement, par les enquêteurs de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), de l'exercice de leur droit de communication régi par l'article 65 du code des douanes ; qu'en effet, en obtenant la communication de relevés de comptes bancaires et de déclarations d'exportation dans le cadre d'une enquête relative à des faits de blanchiment douanier, dont l'un des éléments constitutifs consiste en des transferts de fonds, les enquêteurs n'ont en rien abusé de leurs pouvoirs ; qu'en entendant MM. A..., C..., Z... et Y... sur des mouvements de fonds entre la France et l'Algérie et sur les pièces susvisées, les enquêteurs n'ont pas davantage commis un détournement de pouvoir ;

" et aux motifs éventuellement adoptés qu'il résulte de l'article 64 du code des douanes que les agents des douanes habilités peuvent procéder, à l'occasion de la visite, à la saisie des marchandises et des documents, quel qu'en soit le support, se rapportant aux délits douaniers visés aux articles 414 à 429 et 459 du même code ; qu'aucun texte n'interdit à la DNRED, suite à la saisie régulière de documents et à leur exploitation, de poursuivre l'enquête sur des infractions douanières autres que celles visées dans l'ordonnance d'autorisation de visite domiciliaire du juge des libertés et de la détention ; qu'elle exerce une action publique encadrée par des textes précis qui n'impliquent pas d'avis au parquet ni l'obligation de solliciter l'ouverture d'une information ; que l'article 65 du code des douanes vise en j) « les personnes physiques ou morales directement ou indirectement intéressées à des opérations régulières ou irrégulières relevant de la compétence du service des douanes » ; que les établissements bancaires entrent dans cette catégorie ;

" alors qu'en vertu du principe du respect des droits de la défense, qui trouve à s'appliquer dès lors que l'administration se propose de prendre à l'encontre d'une personne un acte qui lui fait grief, les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l'administration entend fonder sa décision ; que les prévenus invoquaient dans leurs conclusions d'appel l'irrégularité des poursuites du chef de blanchiment douanier en raison de l'inobservation des droits de la défense, dès lors que l'infraction de blanchiment leur avait été notifiée, sans demande d'avis préalable d'observations, par un procès-verbal du 10 décembre 2012 comportant trente-quatre pages avec des tableaux illisibles et touffus, que leurs auditions avaient essentiellement porté sur la question des empreintes falsifiées de cachet douanier et qu'ils n'avaient découvert les éléments retenus contre eux du chef de blanchiment que le jour de la notification de ce procès-verbal d'infraction après une enquête de trois ans ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter l'exception de nullité, que l'administration des douanes pouvait, sans commettre de détournement, poursuivre l'infraction de blanchiment douanier non visée par l'ordonnance autorisant la visite domiciliaire dès lors qu'elle résultait de l'exploitation de pièces régulièrement saisies, sans répondre au chef péremptoire des conclusions des prévenus tiré de la violation des droits de la...

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