Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 19 juin 2013, 12-83.031, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Louvel
ECLIECLI:FR:CCASS:2013:CR03138
Case OutcomeRejet
Docket Number12-83031
Appeal NumberC1303138
CitationSur la constitution du délit d'abus de confiance par le directeur d'une association recourant aux services des salariés à des fins personnelles, à rapprocher :Crim., 20 octobre 2004, pourvoi n° 03-86.201, Bull. crim. 2004, n° 248 (1) (cassation)
CounselMe Bouthors,SCP Roger et Sevaux
Date19 juin 2013
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin criminel 2013, n° 145

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :


- M. Pascal X...,
- M. Eric Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-12, en date du 14 septembre 2010, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 6 mai 2009, n° 08-84.107), a condamné le premier, pour abus de confiance et corruption de salarié, à dix mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende, le second, pour recel et corruption de salarié, à huit mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 juin 2013 où étaient présents : M. Louvel président, M. Soulard conseiller rapporteur, M. Dulin, Mmes Nocquet, Ract-Madoux, MM. Bayet, Laborde, Soulard, de la Lance conseillers de la chambre, Mme Labrousse conseiller référendaire ;

Avocat général : M. Sassoust ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

Sur le rapport de M. le conseiller SOULARD, les observations de la société civile professionnelle ROGER et SEVAUX et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SASSOUST ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 314-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'abus de confiance et l'a condamné à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 euros ainsi qu'à verser la somme de 131 411 euros à titre de dommages-intérêts à l'association CRRF de Lille-Hellemme ;

"aux motifs qu'il est établi que M. X... a réalisé les moulages nécessaires à la fabrication par M. Y..., des prothèses définitives, durant son temps de travail, et sur son lieu de travail, avec les moyens et le matériel du centre L'Espoir ; que l'utilisation de son temps de travail et des moyens mis à sa disposition par son employeur, pour mener une activité extérieure au profit de M. X... (sic) et rémunérée par ce dernier, constitue un acte de détournement pénalement punissable ; que, dans le rapport d'inspection de l'Agence régionale de l'hospitalisation et de l'assurance maladie du mois de mai 2004, il est relevé que les commandes de matériel qualifiées de "surdimensionnées" étaient effectuées directement par M. X... sans aucune justification vis-à-vis de la direction ; que dans ce rapport, l'inspection de l'ARH a estimé que " M. X... travaillait entre 2,5 et 3 jours pour ses activités privées" et que, sur les cinq dernières années, le coût des fournitures utilisées frauduleusement par M. X... s'élevait à 27 690 euros ;

"et aux motifs que, contrairement à ce qui est soutenu par les prévenus, le pacte frauduleux a été scellé à l'insu et sans l'autorisation de l'association qui était, ainsi que cela résulte du contrat de travail établi en 1985 et de la lettre de licenciement de mai 2004, l'employeur de M. A... ; que l'association était dirigée par un conseil d'administration dont plusieurs membres constituaient le bureau qui avait à sa tête un président, M. Fortin ; que ni l'autorisation accordée en 1990 à M. X... pour exercer à titre exceptionnel une activité à l'extérieur du centre, par le docteur B..., alors directeur salarié du centre, ni l'attestation de la veuve du docteur C..., selon laquelle le docteur C..., qui était directeur du centre l'Espoir de 1993 à 1997, aurait été informé, dès le mois de mars 1994, de l'existence de la société SIA, ni enfin les déclarations souscrites par M. X... au cours de l'enquête préliminaire : « je vous précise qu'en 1997, après le décès de M. C..., quand le docteur D... et Dominique E... ont pris leurs fonctions, (de directeurs salariés), je les ai informés de mes activités et de l'existence de la société SIA. En 2004, je souhaitais informer M. E... et M. D... de mon rapport d'activité mais je n'en ai pas eu le temps » ne sont de nature à démontrer que les prévenus agissaient avec l'autorisation de l'association ; qu'en effet, d'une part, M. X..., dans une déclaration ultérieure, a indiqué qu'il n'avait pas évoqué avec les directeurs salariés du centre l'entente lucrative avec M. Y... ; qu'il a en effet déclaré : "en 1999, il y a eu la procédure dont le CRAM est à l'origine. A ce moment, nous nous étions rencontrés avec Dominique E..., nous avons discuté de mes activités extérieures. Je vous confirme que j'ai dit à Dominique E... et au docteur D... que je travaillais avec Eric Y... mais sans leur parler de la société SIA, je ne leur ait pas non plus parlé des montants facturés par SIA à Y... pour mes activités d'application" ; que, d'autre part, l'autorisation donnée en 1990 était exceptionnelle et aucun avenant au contrat de travail de M. X..., lequel comportait la clause « Vous déclarez solennellement n'être lié à aucun employeur et avoir quitté votre précédent emploi libre de tout engagement et vous réserver exclusivement à votre activité professionnelle au sein de notre établissement » n'a été conclu, par la suite, entre M. X... et l'association, autorisant M. X... à travailler à l'extérieur du centre ; qu'en tout état de cause, et même si, ainsi que le prétend MM. X... et E... avait été informé en 1999 de la constitution par M. X... de la société SIA, l'absence d'opposition et le laxisme de M. E... ne pourraient servir de justification aux pratiques incriminées dès lors qu'il n'est pas démontré que les personnes dirigeantes de l'association, le président et les membres du bureau, avaient connaissance des activités extérieures de M. X..., de leur ampleur et des profits réalisés par le salarié via la société SIA, ni du pacte liant MM. X... et Y... ;

"1) alors que le temps que le salarié doit consacrer à son emploi n'est pas un bien susceptible de faire l'objet d'un détournement constitutif d'un abus de confiance ; qu'en retenant que l'utilisation, par le prévenu, de son temps de travail pour mener une activité extérieure constituait un détournement constitutif du délit d'abus de confiance, la cour d'appel a violé l'article 314-1 du code pénal ;

"2) alors qu'en se bornant à relever que des commandes de matériel d'un volume prétendument surdimensionné étaient passées par le prévenu sans justification vis à vis de son employeur sans constater l'utilisation effective, par le prévenu, d'un matériel à des fins étrangères à celles pour lesquelles il lui aurait été confié, la cour d'appel a violé l'article 314-1 du code pénal ;

"3) alors que ne constitue pas un détournement punissable le fait pour un salarié de consacrer son temps de travail à une activité étrangère à son emploi et d'utiliser, dans le cadre de cette activité, le matériel qui lui a été confié par son employeur lorsque ce dernier a accepté l'exercice de cette activité personnelle ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le prévenu avait été autorisé en 1990 à travailler à l'extérieur du centre, que la veuve du directeur du centre en place entre 1994 et 1997 avait attesté que ce dernier était informé des activités réalisées par M. X... et que le prévenu avait fait valoir au cours de l'enquête que les directeurs suivants, MM. E... et D..., avaient été également informés de ses activités ; qu'en se bornant à constater qu'aucun avenant au contrat de travail n'avait été conclu pour autoriser le prévenu à travailler pour la société Y... et que les directeurs E... et D... n'avaient pas été informés de l'existence de la société SIA, circonstances impropres à exclure l'accord de l'employeur à la réalisation, par le prévenu, d'une activité pour la société Y... pendant ses heures de travail et avec les moyens matériels du centre, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision ;

"4) alors qu'en se bornant à constater que les membres du bureau de l'association n'avaient jamais eu connaissance de l'accord passé entre le prévenu et la société Y... sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les directeurs du centre, qui avaient été informés des activités de M. X..., n'étaient pas titulaires d'une délégation de pouvoirs dans le cadre de laquelle ils exerçaient les prérogatives de l'employeur, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision" ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles L. 152-6 ancien du code du travail, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de corruption passive de salarié et l'a condamné à une peine de dix mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 euros ainsi qu'à verser la somme de 131 411 euros à titre de dommages- intérêts à l'association CRRF de Lille-Hellemme ;

"aux motifs que l'existence, à compter de 1994, d'une entente lucrative entre MM. X... et Y... est établie par la procédure et, au demeurant, non contestée par les prévenus ; que, dès le 18 novembre 2004, dans une attestation destinée à l'association CRRF, M. Y... a reconnu qu'il était impossible de travail à L'Espoir sans accepter de payer M. X... pour ses prestations et il convenait qu'un accord avait bien été conclu entre eux de manière explicite dès son entrée dans L'Espoir ; que le prévenu a confirmé au cours de l'enquête qu'en 1993, M. X... lui avait montré ses fiches de paye à son nom établies par la société Lecante en lui indiquant clairement que s'il voulait continuer à travailler avec le centre L'Espoir, il devait « entrer dans le système mis en place avec Lecante, c'est-à-dire la fourniture du moulage, par lui-même, en...

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