Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 19 juin 2018, 15-85.073 17-85.742, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Soulard (président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:CR01650
Case OutcomeCassation
Docket Number15-85073,17-85742
Date19 juin 2018
CounselSCP Nicolaý,de Lanouvelle et Hannotin,SCP Ricard,Bendel-Vasseur,Ghnassia
Appeal NumberC1801650
CourtChambre Criminelle (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :


-
M. François Y...,


- contre l'arrêt n° 182 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, en date du 20 mai 2015, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'atteinte à l'autorité de la justice, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;
- contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 11 septembre 2017, qui, dans la même procédure, l'a condamné à 3 000 euros d'amende avec sursis et dispensé de l'inscription de cette condamnation au bulletin n° 2 du casier judiciaire et a ordonné une mesure de confiscation ;





La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos , conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS , les observations de la société civile professionnelle RICARD, BENDEL-VASSEUR, GHNASSIA, de la société professionnelle NICOLAŸ-de LANOUVELLE-HANNOTIN avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CROIZIER ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits ;

Attendu qu'il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure qu'après la découverte de l'existence de quatre textes intitulés et mis en ligne, respectivement, pour le premier, "juges escrocs dans le ressort de la cour d'appel d'Orléans", le 4 juillet 2010, sur le blog "... ", le deuxième, "Mme A..., la juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de BLOIS ordonne une vente sur adjudication sans titre exécutoire", le 27 septembre 2010, sur le blog "...", le troisième, "Mme A..., la juge du Tribunal de Grande Instance de Blois accorde un passe droit à la société générale", le 12 octobre 2010, sur le blog "... " et le quatrième "0076 association de malfaiteurs entre juges du ressort de la cour d'appel d'Orléans et juges cour de cassation", le 7 novembre 2010, sur blog "... ", portant sur une procédure judiciaire relative à M. Jean-Claude B..., client de M. Y..., une enquête a été diligentée à compter du 14 octobre 2010 et une information judiciaire ouverte, au cours de laquelle ce dernier a été mis en examen du chef sus énoncé ; que l'avis de fin d'information lui ayant été notifié le 19 mars 2015, il a présenté, le 6 mai suivant, une requête en annulation, notamment d'une expertise, ordonnée par des décisions des 17 décembre 2014 et 12 février 2015, portées à la connaissance de son conseil, respectivement, les 24 décembre 2014 et 13 février 2015, dont le rapport a été déposé le 3 mars 2015 et les conclusions ont été notifiées le 18 mars 2015 ; que, par arrêt en date du 20 mai 2015, la chambre de l'instruction a déclaré pour partie cette requête irrecevable et l'a rejetée pour le surplus ; que M. Y... a été renvoyé du même chef devant le tribunal correctionnel, qui a déclaré irrecevable une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité de l'article 434-25 du code pénal aux articles 8, 9, 10, 15, et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et a retenu l'intéressé dans les liens de la prévention ;

En cet état ;

I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt n° 182 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, en date du 20 mai 2015 :

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation préliminaire, des articles 161-1, 173, 173-1, 174, 206, 591, 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 111-4 du code pénal, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe de respect du contradictoire, les droits de la défense, manque de base légale, défaut et contradiction de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué, déclarant la requête en nullité du rapport d'expertise du 3 mars 2015 recevable en la forme, l'a dite mal fondée et a dit n'y avoir lieu à annulation d'acte de la procédure ;

"aux motifs que la requête en nullité du rapport d'expertise du 3 mars 2015 dont les conclusions ont été notifiées le 18 mars 2015, est recevable en la forme ; que le deuxième moyen tient au défaut allégué de notification à MM. Y... et B... de l'ordonnance par laquelle le juge d'instruction a ordonné l'expertise, de sorte que les parties n'ont pas pu bénéficier du délai de dix jours pour demander au juge d'instruction de modifier la mission d'expertise ; qu'à titre liminaire, il n'est pas inutile de souligner qu'il est pour le moins singulier que le mis en examen tire grief d'une expertise ordonnée ensuite d'une demande d'acte formulée par sa défense dont la mission consistait notamment à y faire droit et à solliciter des éclaircissements sur ses observations (cf. libellé de la mission d'expertise du 17 décembre 2014 en D395 et complément de mission du 12 février 2015 en D401), alors que dans un premier temps le juge d'instruction avait opposé un refus ; qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier de l'information que les copies des ordonnances du 17 décembre 2014 et du 12 févier 2015 ont été notifiées à Maître C... en sa qualité d'avocate de M. B..., d'une part, et de M. Y..., d'autre part, ainsi qu'au procureur de la République, les 24 décembre 2014 et 13 février 2015 ; que l'article 161-1 du code de procédure pénale dans sa version issue de la décision n° 2012-284 du 23 novembre 2012 du Conseil constitutionnel saisi sur QPC, dispose que, sauf urgence, le juge d'instruction adresse copie de la décision ordonnant une expertise, sans délai, au procureur de la République et aux parties qui disposent d'un délai de dix jours pour demander au juge d'instruction selon les modalités prévues par l'avant-dernier alinéa de l'article 81, de modifier ou de compléter les questions posées à l'expert ou d'adjoindre à l'expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix figurant sur une des listes mentionnées à l'article 157 ; que le Conseil constitutionnel a en effet estimé que, dans son ancienne version, l'article 161-1 du code de procédure pénale, qui limitait la notification aux seuls "avocats des parties" était préjudiciable aux parties non assistées d'un avocat qui, en l'absence de notification, ne pouvaient exercer le droit de demander au juge d'instruction de modifier ou de compléter les questions posées à l'expert ou d'adjoindre à l'expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix ; que c'est cette différence de traitement, injustifiée en droit et non compensée en fait, qui a conduit le Conseil constitutionnel, arguant de la liberté de choix reconnue aux parties de se faire assister ou non d'un conseil, à déclarer cette ancienne formulation inconstitutionnelle et à ouvrir le droit réservé jusque-là aux seuls "avocats des parties" à celles d'entre elles qui ont fait le choix de ne pas se faire assister ; que, s'il se déduit de la décision du Conseil constitutionnel que l'article 161-1 du code de procédure pénale dans sa nouvelle version a vocation à mettre un terme à une différence de traitement fondée sur l'exercice d'une faculté pourtant reconnue par la loi de ne pas se faire assister pour sa défense, pour autant, il n'ajoute pas aux droits antérieurement conférés aux parties représentées par un avocat, de sorte que la notification de la copie de la décision du juge d'instruction ordonnant une expertise à l'avocat des parties, lorsqu'elles sont assistées, est conforme au droit ; que le moyen mal fondé tiré de la notification des ordonnances des 24 décembre 2014 et 13 février 2015 à Maître C..., avocat de M. Y... à l'exclusion de ce dernier, sera donc rejeté » ;

"alors que le juge d'instruction a l'obligation de notifier aux parties elles-mêmes, et non seulement à leurs avocats, l'ordonnance qui désigne un expert judiciaire ; qu'il en résulte que les opérations d'expertise ne peuvent débuter qu'à l'expiration d'un délai de dix jours suivant la notification à toutes les parties de l'ordonnance de désignation de l'expert ; qu'au cas présent, pour rejeter la requête en nullité du rapport d'expertise du 3 mars 2015 présentée par le demandeur, l'arrêt attaqué a considéré que la notification des ordonnances de désignation de l'expert au seul avocat des parties était conforme au droit ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a par ailleurs constaté que les ordonnances de désignation de l'expert en date du 17 décembre 2014 et du 12 février 2015 n'avaient pas été notifiées au demandeur, et qui aurait dû en déduire que, le délai de dix jours n'ayant pas commencé à courir, l'expertise déposée était nulle, a violé les textes et principes susvisés" ;



Attendu que, pour rejeter le moyen pris de l'irrégularité de l'expertise du 3 mars 2015, tiré de ce que les décisions des 17 décembre 2014 et 12 février 2015 qui l'ont ordonnée, n'ont pas été portées à la connaissance de M. Y..., mais seulement de son avocat, l'arrêt, après avoir constaté que les copies des ordonnances d'expertise ont été notifiées à l'avocat de M. Y..., énonce que l'article 161-1 du code de procédure pénale, dans sa version issue de la décision n° 2012-284 du 23 novembre 2012 du Conseil constitutionnel,prévoit que la copie de la décision ordonnant une expertise est adressée, sans délai, au procureur de la République et aux parties qui disposent d'un délai de dix jours pour demander au juge d'instruction, selon les modalités prévues par l'avant-dernier alinéa de l'article 81 du code de procédure pénale précité, de modifier ou de compléter les questions posées à l'expert ou d'adjoindre à l'expert ou aux experts déjà désignés un expert de leur choix figurant sur une des listes mentionnées à l'article 157 de ce code ; que les juges ajoutent que le Conseil constitutionnel a en effet estimé que, dans son ancienne version, l'article 161-1 du code de procédure pénale, qui limitait la notification aux seuls avocats des parties, était...

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