Cour d'appel de Paris, 25 mars 2008, 07/04789

Date25 mars 2008
Docket Number07/04789
Appeal Number15
CourtCourt of Appeal (Paris)
Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

1ère Chambre - Section H

ARRÊT DU 25 MARS 2008

(no 15, 23 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 2007/04789

Décision déférée à la Cour : renvoi après cassation par la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de Cassation en date du 27 septembre 2005, d'un arrêt de la Cour d'Appel de Paris, 1ère chambre - section H, en date du 22 juin 2004, ayant statué sur les recours formés contre la décision n 97-D-39 du CONSEIL DE LA CONCURRENCE du 17 juin 1997 ;


DEMANDERESSES AUX RECOURS :

- La société CEMEX BETONS SUD-EST, SAS
(venant aux droits de la société BRIGNOLAISE DE BÉTON ET D'AGGLOMÉRÉS)
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est : 2, rue du Verseau, Zonic Silic, 94150 RUNGIS

- La société CEMEX FRANCE GESTION, SAS
(venant aux droits de la société RMC FRANCE qui venait elle-même au droits de la société BETON DE FRANCE),
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est : 2, rue du Verseau , Silic 423, 94583 RUNGIS CEDEX

représentées par Maître François TEYTAUD, avoué près la cour d'appel de PARIS
assistées de Maître Loraine DONNEDIEU de VABRES-TRANIE
JEANTET ASSOCIES
87, avenue Kléber
75784 PARIS CEDEX 16


- La société UNIBETON, SAS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
dont le siège social est : LES TECHNODES 78930 GUERVILLE

représentée par la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, avoués associés près la cour d'appel de PARIS
assistée de Maître Claude LAZARUS, avocat au barreau de PARIS
CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP
9, place Vendôme
CS 50018
75038 PARIS CEDEX 01







EN PRÉSENCE DE :

- Mme LE MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'EMPLOI
59 boulevard Vincent Auriol
75703 PARIS

représentée par Mme Leila BENALIA, munie d'un pouvoir


- M. LE PRESIDENT DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE
11 rue de l'Echelle
75001 PARIS


COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

- M. Didier PIMOULLE, Président
- Mme Agnès MOUILLARD, Conseillère
- M. Gilles CROISSANT, Conseiller

qui en ont délibéré


GREFFIER, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU


MINISTÈRE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par M. Hugues WOIRHAYE, Avocat Général, qui a fait connaître son avis.


ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Didier PIMOULLE, président et par M. Benoît TRUET-CALLU, greffier.

* * * * * *

Le béton prêt à l'emploi est fabriqué dans des centrales fixes ou mobiles à partir de ciment, de granulats, de sable et, éventuellement, d'autres adjuvants.

Le plus coûteux de ces matériaux étant le ciment, les principaux producteurs de ciment sont présents dans le secteur de la production du béton prêt à l'emploi, qui constitue pour eux un débouché essentiel, et ce, tant au plan national que dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (ci-après PACA), concernée par la présente affaire. Ainsi, au moment des faits, opéraient la société Lafarge Ciments, au travers de sa filiale Lafarge Béton Granulats, la société Calcia, au travers de sa filiale Unibéton (anciennement Unimix), et la société Vicat au travers de sa filiale Béton Travaux, ainsi qu'un autre producteur d'importance nationale, la société Béton de France, filiale de la société Ready Mix Concrete (RMC) basée au Royaume Uni.

Les granulats représentant, en valeur, le second constituant du béton prêt à l'emploi, des producteurs de granulats sont également actifs dans l'industrie du béton, ainsi, dans la zone géographique concernée, le groupe Garrassin, qui avait pris des participations dans le capital de sociétés productrices de béton prêt à l'emploi exploitées par des filiales de groupe d'importance nationale, et la société Redland, filiale du groupe du même nom basé au Royaume Uni, fortement implanté dans le secteur des granulats, qui intervenait dans la région PACA par l'intermédiaire de sa filiale Redland Granulats Sud.

Ces groupes se trouvent par ailleurs concurrencés par des entreprises locales à capitaux familiaux, à l'instar de la Société nouvelle des bétons techniques (ci-après la SNBT) qui exploitait une centrale à béton à La Ciotat et une autre à Ollioules, et de la société Bonifay, négociant en matériaux, dans la région de Toulouse.

En outre, l'activité du béton prêt à l'emploi se caractérise par sa forte dépendance aux variations de l'activité du BTP.

Le 5 juillet 1993, M. D..., actionnaire pour moitié de la SNBT et ancien directeur commercial pour la PACA de la société Unimix, s'est présenté à la brigade interrégionale d'enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ci-après la DGCCRF), à Marseille, pour y dénoncer une entente entre producteurs de béton prêt à l'emploi sur cette région et se plaindre de pratiques mises en oeuvre par ces producteurs en vue d'évincer la SNBT, récemment entrée sur le marché à Ollioules.

Après avoir fait procéder à une enquête, au cours de laquelle des visites et des saisies ont été effectuées avec l'autorisation du président du tribunal de grande instance de Marseille, le ministre chargé de l'économie a, par lettre du 5 juillet 1994, saisi le Conseil de la concurrence de pratiques mises en oeuvre dans le secteur du béton prêt à l'emploi dans la région PACA et demandé le prononcé de mesures conservatoires.

Par décision no 94-MC-10, en date du 14 septembre 1994, le Conseil de la concurrence a enjoint, à titre de mesures conservatoires, à quatre sociétés parmi lesquelles la société Béton de France, de cesser de vendre directement ou indirectement, dans un rayon de 25 km de la ville de Toulon, du béton prêt à l'emploi à un prix unitaire inférieur au coût moyen variable de production tel qu'il résultait de leur comptabilité analytique établie mensuellement pour leurs centrales respectives.

Le 17 juin 1997, le Conseil de la concurrence, statuant au fond, a rendu une décision no 97-D-39 par laquelle il sanctionnait, pour diverses ententes prohibées, 13 entreprises parmi lesquelles la SA Unibéton (40 MF), la SA Béton de France, aux droits de laquelle est venue la SAS RMC France puis dernièrement la SAS Cemex France Gestion (30 MF), la SARL Brignolaise de béton et d'agglomérés, aux droits de laquelle est venue la SAS Cemex bétons Sud-Est (300 000 F), et ordonnait la publication d'une partie de la décision dans les quotidiens "La Tribune" et "Les Echos", aux frais des entreprises sanctionnées.

Par un arrêt du 20 octobre 1998, rectifié le 24 novembre 1998, la cour d'appel de céans, a rejeté les recours formés contre cette décision par dix des entreprises sanctionnées, parmi lesquelles les trois précitées.

Sur les pourvois de ces trois entreprises notamment, la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a, le 9 octobre 2001, cassé cet arrêt en toutes ses dispositions, pour violation de l'articles 6, paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 464-1 du code de commerce, en ce que la cour avait refusé de retenir le manquement au principe d'impartialité résultant du fait que la décision du Conseil avait été rendue par une formation comportant des membres qui avaient statué sur la demande de mesures conservatoires. L'affaire a été renvoyée devant la même cour, autrement composée.

Saisie par ces trois mêmes entreprises notamment, cette cour, par arrêt du 22 juin 2004, a annulé la décision no 97-D-39 du Conseil de la concurrence et renvoyé l'affaire devant le Conseil de la concurrence pour qu'il soit à nouveau statué.

Cet arrêt a été également cassé, le 27 septembre 2005, par la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, pour violation des articles L. 464-8 du code de commerce, 561 et 562 du nouveau code de procédure civile, au motif que, saisie de recours en annulation ou en réformation d'une décision du Conseil de la concurrence, la cour d'appel était tenue de statuer en fait et en droit sur les demandes des parties tendant à l'annulation de l'enquête et de l'instruction ayant conduit à la décision qu'elle annulait, et, le cas échéant, sur les griefs notifiés, peu important que le ministre de l'Economie, n'ayant pas formé un recours à l'encontre de la décision, ne fût pas partie à l'instance. L'affaire a été renvoyée devant la même cour autrement composée.

LA COUR :

Vu la déclaration de saisine, en date du 23 mars 2007, déposée par la société Cemex Bétons Sud-Est (ci-après la société Cemex), tendant à l'annulation et/ou subsidiairement la réformation de la décision no 97-D-39 du Conseil de la concurrence ;

Vu la déclaration de saisine, en date du 23 mars 2007, déposée par la société RMC France, devenue par la suite la société Cemex France Gestion (ci-après la société RMC) tendant à l'annulation et/ou subsidiairement la réformation de la décision no 97-D-39 du Conseil de la concurrence ;

Vu la déclaration de saisine, en date du 19 juillet 2007, déposée par la société Unibéton tendant à l'annulation, subsidiairement à la réformation de la décision no 97-D-39 du Conseil de la concurrence ;

Vu le mémoire déposé le 23 mars 2007 par la société Cemex à l'appui de sa saisine, soutenu par son mémoire en réplique du 19 décembre 2007, par lequel cette société demande à la cour :
- à titre principal, d'annuler la décision déférée en ce que le Conseil de la concurrence a manqué objectivement au principe d'impartialité édicté par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que certains de...

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