Cour d'appel de Paris, 30 juin 2006, 04/06308

Docket Number04/06308
Date30 juin 2006
CourtCourt of Appeal (Paris)

COUR D'APPEL DE PARIS
15ème Chambre - Section B

ARRET DU 30 JUIN 2006

Numéro d'inscription au répertoire général : 04/06308

Décision déférée à la Cour : jugement du 12 Janvier 2004 du Tribunal de commerce de PARIS - RG no 2002 / 93985

APPELANTES

Société MORGAN STANLEY & CO INTERNATIONAL LIMITED
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 25 Cabot Square Canary Warf London E14 4QA ROYAUME UNI
représentée par la SCP REGNIER - SEVESTRE-REGNIER - REGNIER-AUBERT LAMARCHE-BEQUET, avoués à la Cour
assistée de Me Jean-Michel DARROIS, Me Philippe VILLEY, et Me Matthieu DE BOISSESON , avocats au barreau de PARIS, plaidants pour le cabinet DARROIS-VILLEY- MAILLOT- BROCHIER, toque : R 170

Société MORGAN STANLEY D.W. INC
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège Corporation Trust Center, 1209 Orange Street, Wilmington Delaware 19801, New York ETATS UNIS
représentée par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avoués à la Cour
assistée de Me Bruno QUENTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : T300, plaidant pour le cabinet GIDE LOYRETTE NOUEL ¿ T 03

INTIMEE

S.A. LVMH MOET HENNESSY LOUIS VUITTON (LVMH)
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège 22 avenue Montaigne 75008 PARIS
représentée par Me François TEYTAUD, avoué à la Cour
assistée de Me Georges TERRIER, avocat au barreau de PARIS, toque : T04, plaidant pour le cabinet JEANTET ASSOCIÉS

PARTIE JOINTE : LE MINISTERE PUBLIC

ayant assisté aux débats et représenté par Monsieur Jean-Claude LAUTRU, avocat général au Parquet Général près la Cour d'appel

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 31 Mars 2006, en audience publique, devant la Cour, composée de :
Monsieur Patrick HENRY-BONNIOT, président
Madame Claire DAVID, conseiller
Madame Evelyne DELBES, conseiller

Greffier, lors des débats : Mlle Céline SANCHEZ

ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par M. Patrick HENRY-BONNIOT, Président
- signé par M. Patrick HENRY-BONNIOT, président
et par Mlle Céline SANCHEZ, greffier présent lors du prononcé.

Plan de la motivation de l'arrêt

Procédure 5
La compétence de la juridiction française 5
La loi applicable 6

Les principes de la responsabilité invoquée de la banque 8
La responsabilité quasi délictuelle 8
Les principes liés à l'analyse financière 8
La faute par le dénigrement 9

Les faits considérés par LVMH comme fautifs : circonstances et portée intrinsèque 10
La diffusion de mentions fausses sur les relations entre les parties 10
* un membre de la société Morgan Stanley est salarié ou administrateur de LVMH 10
* Morgan Stanley est membre du syndicat de placement de titres de LVMH 10
* Morgan Stanley va recevoir ou a reçu des rémunérations ou commissions de LVMH pour des services 11
* entretien paru le 16 mars 2002 dans le "Financial Times" relatif au ratio d'endettement de LVMH 11
L'atteinte au crédit et à la valeur de LVMH à travers la question de sa notation 12
Les atteintes à la marque Louis Vuitton 15
* la maturité de cette marque 15
* la dénonciation de l'exposition au Yen, au dollar et le problème des droits de douane américains 18
La mise en cause de la crédibilité et de la réactivité des dirigeants de LVMH 20
La décote de 10% et la destruction de valeur 22

La mise en perspective des faits reprochés à la société Morgan Stanley 24
L'ombre portée du conflit d'intérêts 24
* La révélation de faux conflits d'intérêts entre Morgan Stanley et LVMH 24
* La dissimulation de conflits d'intérêts entre Morgan Stanley et Gucci
24
La campagne de dénigrement 26
La dissymétrie de traitement entre Gucci et LVMH 29
* La bipolarité du secteur du luxe 31
* Les contentieux antérieurs 32
* Les propos du dénigrement 32
* La juxtaposition d'opinions négatives 33

Les préjudices subis et leur lien de causalité avec les fautes 34
les préjudices matériels 35
le préjudice moral 35

Les autres demandes 36


Par exploit du 30 octobre 2002, la société LVMH Moët Hennessy Louis Vuitton (LVMH) a fait assigner la société anglaise Morgan Stanley & Co International (MS-UK) et la société américaine Morgan Stanley Dean Witter (MS-US) devant le tribunal de commerce de Paris en réparation du préjudice causé pour avoir diffusé durant les années 2000, 2001 et 2002 des informations, appréciations et recommandations gravement "biaisées". La période d'examen des griefs inclut, désormais, les années 1999 et 2003.

Par jugement du 12 janvier 2004, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris :

- a constaté que les faits relevés étaient constitutifs d'une faute lourde commise par les sociétés Morgan Stanley au détriment de la société LVMH

- a constaté que cette faute lourde avait causé un préjudice considérable tant moral que matériel à la société LVMH dans son image, justifiant réparation

- a condamné in solidum les deux sociétés Morgan Stanley à payer à la société LVMH la somme de 30 millions d'euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral

- a sursis à statuer sur l'indemnisation des préjudices matériels subis par la société LVMH qui comprendront d'une part le préjudice causé par la décote de 10% préconisée par Morgan Stanley, d'autre part le préjudice résultant des divers coûts engagés par la société LVMH pour la défense de son image, directement ou par l'intermédiaire de ses filiales, et pour remédier aux conséquences dommageables des agissements de la banque

- avant dire droit sur l'indemnisation de ces préjudices a désigné un expert.
L'expertise est en cours sous le contrôle de la juridiction de première instance. Un appel d'une décision d'extension de la mission définie a été interjeté. Cette instance, non jointe, est en cours.

- en outre la somme de 80.000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile a été mise à la charge des sociétés Morgan Stanley ainsi que les dépens.

La déclaration d'appel des deux sociétés Morgan Stanley a été remise au greffe de la Cour les 12 et 20 février 2004.

En raison de cette procédure judiciaire, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a ouvert une enquête le 26 février 2004 sur l'information financière et le marché du titre LVMH à compter du 26 février 2001. Par ordonnance du 15 septembre 2005 le magistrat de la mise en état a demandé à l'AMF de déposer des conclusions en application de l'article L621-20 du Code monétaire et financier. Le rapport de l'AMF, en date du 3 mai 2005, a été adressé à la Cour le 28 septembre 2005.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, déposées le 23 janvier 2006 la société Morgan Stanley (UK) demande :

- de débouter la société LVMH de ses demandes
- de la condamner à lui rembourser les sommes de trente millions d'euros et de 80.000 euros, payées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement, avec intérêts au taux légal à compter du jour de chaque versement et capitalisation pour les intérêts dus au moins pour une année entière
- de rejeter les demandes complémentaires de la société LVMH
- subsidiairement, si une responsabilité de Morgan Stanley (UK) était retenue, d'infirmer la décision ordonnant une expertise
- de condamner la société LVMH à réparer le préjudice causé par la procédure abusivement introduite
* en ordonnant la publication de l'arrêt à intervenir, à ses frais, dans trois quotidiens de la presse économique et financière et dans trois quotidiens de la presse grand public, tous de diffusion internationale
* et en la condamnant à lui payer la somme de dix millions d'euros à titre de dommages intérêts
- de condamner la société LVMH à lui payer la somme de sept millions d'euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, déposées le 23 janvier 2006 la société Morgan Stanley (US) demande :

- d'infirmer le jugement
- de la mettre hors de cause
Subsidiairement,
- de rejeter les demandes complémentaires de la société LVMH
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise
Dans tous les cas,
- de condamner la société LVMH à lui payer un euro à titre de dommages intérêts pour procédure abusive
- de condamner la société LVMH à lui payer la somme de deux cent mille euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du nouveau Code de procédure civile, déposées le 13 février 2006 la société LVMH demande :

de confirmer le jugement déféré, en conséquence :
- de condamner in solidum les deux sociétés Morgan Stanley à lui payer la somme de 30 millions d'euros en réparation de son préjudice moral
- d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois quotidiens de la presse financière de diffusion internationale et dans trois quotidiens grand public de diffusion internationale ainsi que dans la plus prochaine édition du rapport hebdomadaire sur le secteur du luxe émanant du service d'analyse financière des deux sociétés Morgan Stanley, à leurs frais,
- l'expertise sur le préjudice matériel étant en cours, de lui donner acte de ce qu'elle soumettra, après dépôt du rapport, ses prétentions relatives à ce préjudice matériel à la juridiction de première instance,
ajoutant au jugement, de faire droit à la demande complémentaire et en conséquence :
- de condamner in solidum les deux sociétés Morgan Stanley à lui payer la somme de 18 475 206 ¿ à titre de réparation du préjudice causé par la préconisation d'une décote de 10 %
- de condamner in solidum les deux sociétés à lui payer la somme de 106,9 millions d'euros en réparation du préjudice causé par l'entrave à l'émission d'obligations échangeables,
en tout état de cause :
- de débouter les deux sociétés appelantes de leur demandes reconventionnelles,
- de les condamner à lui verser la somme de 100 000 ¿ sur le...

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