Décision judiciaire de Conseil Constitutionnel, 24 août 1993 (cas Loi relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France)

Date de Résolution24 août 1993
Estado de la SentenciaJournal officiel du 18 août 1993, p. 11722
Numéro de DécisionCSCX9310124S
JuridictionConstitutional Council (France)
Nature Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 15 juillet 1993, par MM Claude Estier, Robert Laucournet, William Chervy, Paul Raoult, Jean-Pierre Masseret, Jean-Louis Carrère, Marcel Bony, Mmes Françoise Seligmann, Marie-Madeleine Dieulangard, Josette Durrieu, MM Jacques Bellanger, Jacques Bialski, Aubert Garcia, Roland Bernard, Guy Penne, Michel Dreyfus-Schmidt, Gérard Miquel, Fernand Tardy, Robert Castaing, Gérard Delfau, Pierre Biarnes, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM André Vezinhet, Louis Philibert, Michel Sergent, Germain Authié, Jean Besson, Jean-Pierre Demerliat, Paul Loridant, Mme Monique Ben Guiga, MM Guy Allouche, Léon Fatous, Claude Fuzier, Claude Cornac, Gérard Roujas, François Louisy, Marc B uf, Francis Cavalier-Benazet, Jacques Carat, Jean Peyrafitte, René-Pierre Signé, Marcel Charmant, Claude Pradille, André Rouvière, Louis Perrein, Marcel Vidal, Franck Sérusclat, Jean-Luc Mélenchon, Charles Metzinger, René Régnault, François Autain, Michel Moreigne, Michel Charasse, Gérard Gaud, Pierre Mauroy, Roland Courteau, Claude Saunier, Bernard Dussaut, Albert Pen et Rodolphe Désiré, sénateurs, et le même jour par MM Martin Malvy, Jean-Marc Ayrault, Jean-Pierre Balligand, Claude Bartolone, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Michel Berson, Jean-Claude Bois, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Jean-Pierre Braine, Laurent Cathala, Jean-Pierre Chevènement, Henri d'Attilio, Mme Martine David, MM Bernard Davoine, Bernard Derosier, Michel Destot, Julien Dray, Pierre Ducout, Dominique Dupilet, Jean-Paul Durieux, Laurent Fabius, Jacques Floch, Pierre Garmendia, Jean Glavany, Jacques Guyard, Jean-Louis Idiart, Frédéric Jalton, Serge Janquin, Charles Josselin, Jean-Pierre Kucheida, André Labarrère, Jack Lang, Jean-Yves Le Déault, Louis Le Pensec, Alain Le Vern, Marius Masse, Didier Mathus, Jacques Mellick, Louis Mexandeau, Jean-Pierre Michel, Didier Migaud, Mme Véronique Neiertz, MM Paul Quilès, Alain Rodet, Mme Ségolène Royal, MM Georges Sarre, Henri Sicre, Camille Darsières, Jean-Pierre Defontaine, Gilbert Annette, Kamilo Gata, Roger-Gérard Schwartzenberg, Didier Boulaud, Bernard Charles, Aloyse Warhouver, Gérard Saumade, Régis Fauchoit, Emile Zuccarelli, Bernard Tapie, Gilbert Baumet, François Asensi, Rémy Auchedé, Gilbert Biessy, Alain Bocquet, Patrick Braouezec, Jean-Pierre Brard, Jacques Brunhes, René Carpentier, Daniel Colliard, Jean-Claude Gayssot, André Gérin, Michel Grandpierre, Maxime Gremetz, Mme Janine Jambu, MM Georges Hage, Guy Hermier, Mme Muguette Jacquaint, MM Jean-Claude Lefort, Georges Marchais, Paul Mercieca, Louis Pierna, Jean Tardito et Ernest Moutoussamy, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France ;

Le Conseil constitutionnel,

Vu la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Vu le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, ensemble la loi n° 54-290 du 17 mars 1954 autorisant sa ratification ;

Vu le protocole relatif au statut des réfugiés, signé à New York le 31 janvier 1967, ensemble la loi n° 70-1076 du 25 novembre 1970 autorisant l'adhésion de la France à ce protocole ;

Vu la Convention signée à Dublin le 15 juin 1990 relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée auprès d'un Etat membre des Communautés européennes ;

Vu la Convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code civil, ensemble la loi n° 93-333 du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;

Vu le code de procédure pénale, et notamment son article 78-2 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée portant création d'un office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Vu la loi n° 73-548 du 27 juin 1973 modifiée relative à l'hébergement collectif ;

Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;

Vu les décisions n° 91-294 DC du 25 juillet 1991 et n° 92-307 DC du 25 février 1992 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

  1. Considérant que les sénateurs, auteurs de la première saisine, défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France ; qu'à l'appui de leur saisine ils font valoir que sont contraires à la Constitution les dispositions des articles 1er, 3, 8-IV, 14-II, 15, 16, 17, 23, 25 et 27 de la loi qu'ils soumettent à l'examen du Conseil constitutionnel ; que les députés, auteurs de la seconde saisine, font valoir pour leur part que sont contraires à la Constitution les articles 3, 5, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 21, 23, 24, 25, 27, 29, 30, 31, 33, 34, 35, 36, 38, 40, 41, 43, 44, 45 et 46 de cette même loi ;

    - SUR LES NORMES DE CONSTITUTIONNALITE APPLICABLES AU CONTROLE DE LA LOI DEFEREE :

  2. Considérant qu'aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d'accès et de séjour sur le territoire national ; que les conditions de leur entrée et de leur séjour peuvent être restreintes par des mesures de police administrative conférant à l'autorité publique des pouvoirs étendus et reposant sur des règles spécifiques ; que le législateur peut ainsi mettre en oeuvre les objectifs d'intérêt général qu'il s'assigne ; que dans ce cadre juridique, les étrangers se trouvent placés dans une situation différente de celle des nationaux ; que l'appréciation de la constitutionnalité des dispositions que le législateur estime devoir prendre ne saurait être tirée de la comparaison entre les dispositions de lois successives ou de la conformité de la loi avec les stipulations de conventions internationales mais résulte de la confrontation de celle-ci avec les seules exigences de caractère constitutionnel ;

  3. Considérant toutefois que si le législateur peut prendre à l'égard des étrangers des dispositions spécifiques, il lui appartient de respecter les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République ; que s'ils doivent être conciliés avec la sauvegarde de l'ordre public qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle, figurent parmi ces droits et libertés, la liberté individuelle et la sûreté, notamment la liberté d'aller et venir, la liberté du mariage, le droit de mener une vie familiale normale ; qu'en outre les étrangers jouissent des droits à la protection sociale, dès lors qu'ils résident de manière stable et régulière sur le territoire français ; qu'ils doivent bénéficier de l'exercice de recours assurant la garantie de ces droits et libertés ;

  4. Considérant en outre que les étrangers peuvent se prévaloir d'un droit qui est propre à certains d'entre eux, reconnu par le quatrième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 auquel le peuple français a proclamé solennellement son attachement, selon lequel tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République ;

    - SUR LES CONDITIONS GENERALES D'ENTREE ET DE SEJOUR DES ETRANGERS EN FRANCE :

    . EN CE QUI CONCERNE L'ARTICLE 1ER :

  5. Considérant que cet article dispose que la décision de refus d'entrée opposée à un étranger peut être exécutée d'office par l'administration ;

  6. Considérant que les sénateurs auteurs de la première saisine font valoir que cette disposition prive les étrangers concernés des garanties offertes par la procédure pénale notamment en matière de droits de la défense ;

    7 Considérant que le législateur peut, s'agissant des mesures applicables à l'entrée des étrangers, décider que les modalités de mise en oeuvre des objectifs qu'il s'assigne notamment en matière d'ordre public reposeront soit sur des règles de police spécifiques aux étrangers, soit sur un régime de sanctions pénales, soit même sur une combinaison de ces deux régimes ; que les décisions prises dans le cadre d'un régime de police administrative sont susceptibles d'être exécutées d'office ; que dès lors le grief invoqué doit être écarté ;

    - EN CE QUI CONCERNE L'ARTICLE 3 :

  7. Considérant que cet article insère dans l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, des règles concernant le certificat d'hébergement exigible d'un étranger pour une visite privée ; que selon cette disposition le maire à qui il incombe d'apposer son visa sur ce certificat le refuse s'il ressort manifestement, soit de la teneur de ce dernier, soit de la vérification effectuée au domicile de son signataire, que l'étranger ne peut être hébergé dans des conditions normales ou que les mentions portées sur le certificat sont inexactes ; que les agents de l'office des migrations internationales à qui il revient de procéder sur la demande du maire à des vérifications sur place ne peuvent pénétrer chez l'hébergeant qu'après s'être assurés du consentement de celui-ci donné par écrit mais qu'en cas de refus de ce dernier, les conditions normales d'un hébergement sont réputées ne pas être remplies ;

  8. Considérant que les sénateurs soutiennent que ces dispositions méconnaissent les principes sur lesquels repose la liberté individuelle et notamment l'inviolabilité du domicile faute de préciser les conditions, les modalités et la portée des vérifications effectuées et de soumettre leur déroulement...

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