Décision judiciaire de Conseil Constitutionnel, 19 mars 1999 (cas Loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie)

Date de Résolution19 mars 1999
Estado de la SentenciaJournal officiel du 21 mars 1999, p. 4234
Numéro de DécisionCSCL9903473S
JuridictionConstitutional Council (France)
Nature Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 16 février 1999, par le Premier ministre, conformément aux dispositions des articles 46 et 61, alinéa 1, de la Constitution, du texte de la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie,

Le Conseil constitutionnel,

Vu la Constitution, et notamment les articles 76 et 77 résultant de la loi constitutionnelle n° 98-610 du 20 juillet 1998 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;

Vu l'accord sur la Nouvelle-Calédonie, signé à Nouméa le 5 mai 1998 ;

Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 modifiée relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ;

Vu l'avis du Congrès du territoire de la Nouvelle-Calédonie en date du 12 novembre 1998 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

  1. Considérant que, le 5 mai 1998, a été signé à Nouméa, entre le Gouvernement de la République française et les représentants des principales formations politiques de Nouvelle-Calédonie, un "accord sur la Nouvelle-Calédonie" qui, outre un "Préambule", comprend un "Document d'orientation" relatif, en son point 1, à "l'identité kanak", en son point 2, aux "institutions", en son point 3, aux "compétences", en son point 4, au "développement économique et social" et, en son point 5, à "l'évolution de l'organisation politique de la Nouvelle-Calédonie" ; que, comme le prévoyait le point 6 de ce même document, relatif à "l'application de l'accord", une loi constitutionnelle a été adoptée par le Parlement réuni en Congrès le 6 juillet 1998, laquelle a rétabli un titre XIII de la Constitution désormais intitulé : "Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie" et comprenant deux articles 76 et 77 ainsi rédigés :

    Art. 76.- "Les populations de la Nouvelle-Calédonie sont appelées à se prononcer avant le 31 décembre 1998 sur les dispositions de l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 et publié le 27 mai 1998 au Journal officiel de la République française.

    Sont admises à participer au scrutin les personnes remplissant les conditions fixées à l'article 2 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988.

    Les mesures nécessaires à l'organisation du scrutin sont prises par décret en Conseil d'État délibéré en conseil des ministres."

    Art. 77.- "Après approbation de l'accord lors de la consultation prévue à l'article 76, la loi organique, prise après avis de l'assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie, détermine, pour assurer l'évolution de la Nouvelle-Calédonie dans le respect des orientations définies par cet accord et selon les modalités nécessaires à sa mise en oeuvre :

    - les compétences de l'État qui seront transférées, de façon définitive, aux institutions de la Nouvelle-Calédonie, l'échelonnement et les modalités de ces transferts, ainsi que la répartition des charges résultant de ceux-ci ;

    - les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie et notamment les conditions dans lesquelles certaines catégories d'actes de l'assemblée délibérante pourront être soumises avant publication au contrôle du Conseil constitutionnel ;

    - les règles relatives à la citoyenneté, au régime électoral, à l'emploi et au statut civil coutumier ;

    - les conditions et les délais dans lesquels les populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront amenées à se prononcer sur l'accession à la pleine souveraineté.

    Les autres mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord mentionné à l'article 76 sont définies par la loi." ;

  2. Considérant qu'en application de l'article 77 précité, le Parlement a adopté, le 16 février 1999, la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie soumise au Conseil constitutionnel ;

    - SUR LES NORMES DE RÉFÉRENCE ET L'ÉTENDUE DU CONTRÔLE EXERCÉ PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL SUR LA LOI ORGANIQUE PRÉVUE À L'ARTICLE 77 DE LA CONSTITUTION :

  3. Considérant, en premier lieu, que rien ne s'oppose, sous réserve des prescriptions des articles 7, 16 et 89 de la Constitution, à ce que le pouvoir constituant introduise dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui, dans les cas qu'elles visent, dérogent à des règles ou principes de valeur constitutionnelle, ces dérogations pouvant n'être qu'implicites ; que tel est le cas en l'espèce ; qu'il résulte en effet des dispositions du premier alinéa de l'article 77 de la Constitution que le contrôle du Conseil constitutionnel sur la loi organique doit s'exercer non seulement au regard de la Constitution, mais également au regard des orientations définies par l'accord de Nouméa, lequel déroge à un certain nombre de règles ou principes de valeur constitutionnelle ; que, toutefois, de telles dérogations ne sauraient intervenir que dans la mesure strictement nécessaire à la mise en oeuvre de l'accord ;

  4. Considérant, en deuxième lieu, qu'en raison de ce changement des circonstances de droit, il y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de procéder à l'examen de l'ensemble des dispositions de la loi organique, alors même que certaines d'entre elles ont une rédaction ou un contenu identique à ceux de dispositions antérieurement déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ou figurant dans la loi n°88-1028 du 9 novembre 1988 portant dispositions statutaires et préparatoires à l'autodétermination de la Nouvelle-Calédonie en 1998, adoptée par le peuple français à la suite d'un référendum ;

    - SUR LA PROCÉDURE SUIVIE :

  5. Considérant que la consultation prévue à l'article 76 de la Constitution est intervenue le 8 novembre 1998 ; que les populations consultées ont approuvé l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 ; que le projet dont est issue la loi soumise au Conseil constitutionnel a été transmis au congrès du territoire de la Nouvelle-Calédonie qui a émis un avis le 12 novembre 1998 ; que ce projet a été délibéré en Conseil des ministres et enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 1998 ; qu'il a été soumis à la délibération et au vote de l'Assemblée nationale dans les conditions prévues à l'article 46 de la Constitution ; que son examen par le Parlement a respecté les autres prescriptions constitutionnelles relatives à la procédure législative ; qu'ainsi, la loi organique soumise au Conseil constitutionnel a été adoptée dans les conditions prévues par la Constitution ;

    - SUR LES ARTICLES 1 A 6 :

  6. Considérant que la loi examinée comprend six articles avant son titre Ier ;

  7. Considérant que l'article 1er fixe les limites des trois provinces de la Nouvelle-Calédonie et les conditions dans lesquelles ces limites peuvent être modifiées ; qu'il dresse également la liste des aires coutumières ; que l'article 2, en son premier alinéa, désigne ainsi les institutions de la Nouvelle-Calédonie : le congrès, le gouvernement, le sénat coutumier, le conseil économique et social et les conseils coutumiers ; que le deuxième alinéa du même article fait du haut commissaire de la République le dépositaire des pouvoirs de la République et le représentant du Gouvernement ; qu'aux termes du troisième alinéa : " La Nouvelle-Calédonie est représentée au Parlement et au Conseil économique et social de la République dans les conditions fixées par les lois organiques " ; que l'article 3 dispose que les provinces et les communes de la Nouvelle-Calédonie sont des collectivités territoriales de la République et qu'elles s'administrent librement par des assemblées élues au suffrage universel direct, dans les conditions prévues au titre IV en ce qui concerne les provinces ; que l'article 4 définit la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie ; que l'article 5 prévoit que la Nouvelle-Calédonie détermine librement les "signes identitaires permettant de marquer sa personnalité aux côtés de l'emblème national et des signes de la République" et "peut décider de modifier son nom" ; qu'enfin l'article 6 dispose que, en Nouvelle-Calédonie, le droit de propriété s'exerce, en matière foncière, sous la forme de la propriété privée, de la propriété publique et des terres coutumières ;

  8. Considérant, en premier lieu, que, si le premier alinéa de l'article 2 ne mentionne pas les assemblées de province parmi les institutions de la Nouvelle-Calédonie, alors que le point 2 de l'accord de Nouméa fait figurer ces assemblées parmi...

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