CAA de BORDEAUX, 1ère chambre - formation à 3, 13/07/2017, 15BX00938, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme GIRAULT
Date13 juillet 2017
Judgement Number15BX00938
Record NumberCETATEXT000035213230
CounselCABINET ALEO AVOCATS ; SCP BOUYSSOU & ASSOCIES ; CABINET ALEO AVOCATS ; CABINET D'AVOCATS LARROUY-CASTERA ; SCP AMEILHAUD A.A - ARIES-BERRENGER-BURTIN PASCAL-SENMARTIN ; TERNEYRE ; CONCORDE AVOCATS
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

Par des recours enregistrés les 13, 19, 21, 23 et 30 mars 2012 et le 5 avril 2012 , sous les numéros 1352 T, 1368 T, 1370 T, 1373 T, 1384 T, 1389 T, 1398 T et 1399 T, les sociétés SADEF, Distribution Casino France, Elliott et Miss et Sovendex, le syndicat départemental des associations et syndicats des commerçants et artisans des Hautes-Pyrénées, la société SDC, l'association En toute franchise-département des Hautes-Pyrénées et l'association des exploitants du centre commercial de l'Univers de Tarbes-Laloubère ont demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision en date du 28 février 2012 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial des Hautes-Pyrénées a accordé à la SAS " Grand Tarbes Investissement " l'autorisation préalable requise en vue de créer un ensemble commercial d'une surface totale de 42 626 m² sur les communes de Soues et Séméac.

Par décision n°s 1352 T, 1368 T, 1370 T, 1373 T, 1384 T, 1389 T, 1398 T et 1399 T en date du 13 juin 2012, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté ces recours.

Par une décision n° 361577, 362648, 362779, 362959, 362980 du 18 décembre 2013, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi par les sociétés Sadef, Sovendex et autre, Elliott et Miss, Distribution Casino France, et l'association des exploitants du centre commercial de l'Univers de Tarbes-Laloubère et autre, a annulé la décision du 13 juin 2012 de la commission nationale d'aménagement commercial.

Après réexamen, par une nouvelle décision du 17 décembre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté les recours et autorisé le projet.


Procédure devant la cour :

I) Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 13 mars 2015, 10 mai et 24 juin 2016 sous le numéro 15BX00938, la SAS Sadef, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision n° 1352 T du 17 décembre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la SAS Grand Tarbes Investissement l'autorisation requise en vue de la création d'un ensemble commercial d'une surface totale de vente de 42 626 m² à Soues (Hautes-Pyrénées), comportant un hypermarché à l'enseigne Auchan d'une surface de vente de 10 000 m², une galerie marchande d'une surface totale de vente de 6 116 m², un " retail park " composé de 15 moyennes surfaces spécialisées d'une surface totale de vente de 15 054 m², un magasin spécialisé dans le bricolage d'une surface de vente de 11 000 m² et un centre automobile d'une surface de vente de 456 m² ;

2°) de mettre à la charge de la SAS Grand Tarbes Investissement la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial méconnaît l'article R. 752-49 du code de commerce dans la mesure où il n'apparaît pas que ses membres auraient eu suffisamment de temps pour prendre connaissance de l'ensemble des documents énoncés au deuxième alinéa de cet article : par ailleurs, il n'est pas établi que le quorum aurait été respecté ;
- la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial méconnaît les articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce dans la mesure où le projet emporte des effets négatifs en matière d'aménagement du territoire ; si le schéma de cohérence territoriale (SCOT) Tarbes-Ossun-Lourdes a pointé un déficit de l'offre commerciale dans la partie Est de l'agglomération tarbaise, l'importance du projet et le caractère disproportionné de la zone de chalandise démontrent qu'il ne peut être regardé comme répondant aux besoins locaux ; un projet de plus de 40 000 m² de surface de vente ne peut se concevoir qu'à l'échelon d'une agglomération de 300 000 à 400 000 habitants et non à la périphérie d'une commune comprenant 45 000 habitants ; compte tenu de la zone de chalandise qui s'étend sur trois départements, il ne s'agit pas de rééquilibrer l'offre commerciale à l'Est de l'agglomération tarbaise mais de créer un pôle commercial à dimension régionale ; l'attractivité du projet, combinant un hypermarché, un magasin spécialisé dans le bricolage et une galerie marchande, conduira à délaisser les commerces de proximité dans les centres-villes de Tarbes et des communes avoisinantes et à les fragiliser ; le projet se justifie d'autant moins qu'il existe déjà sur les communes de Tarbes et d'Orleix des ensembles commerciaux significatifs dotés d'hypermarchés de nature à répondre aux besoins des consommateurs locaux ; de même, plusieurs enseignes nationales de bricolage sont déjà présentes sur Tarbes ; l'évasion commerciale vers Pau ou Toulouse n'est pas constituée alors qu'il ressort de l'étude de l'observatoire du commerce et de la consommation des Hautes-Pyrénées que le taux global d'évasion est de 8 % et qu'il a atteint un seuil incompressible en matière alimentaire et non alimentaire ; au demeurant, il convient de rappeler que la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé un précédent projet de la société Grand Tarbes Investissement comme contraire à un aménagement harmonieux du territoire alors même que sa surface de vente était inférieure de 20% au projet contesté ; le Conseil d'Etat, saisi de cette décision, n'a pas statué sur le bien-fondé de ce motif, selon le principe de l'économie de moyens ;
- la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial méconnaît les articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce dans la mesure où le projet emporte des conséquences négatives sur les flux de transport ; il ressort du dossier de demande que le projet entraînera une augmentation des flux routiers évaluée à 8 822 véhicules par jour et de 15 156 véhicules par jour le samedi ; une telle augmentation contredit les préoccupations exprimées par la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 qui préconise en son chapitre III une gestion économe des transports afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre ; en particulier, le projet ne répond pas aux préoccupations des articles 10 et 13 de cette loi ; par ailleurs, les aménagements prévus sur l'avenue Bouchayé sont insuffisants ; la dangerosité du passage à niveau qu'emprunteront les voitures aurait dû conduire le porteur du projet à l'éviter ; la solution de construction d'un ouvrage de franchissement a été abandonnée pour un schéma technique plus économique et moins sécurisé ; par ailleurs, les rapports OCTE et ADEMA sur l'impact du centre commercial sur le trafic routier concluent à des flux de circulation le samedi identiques voire inférieurs à ceux de la semaine, en contradiction avec le dossier de demande ; compte tenu de ces incohérences, leurs conclusions ne sauraient être retenues pour convaincre d'une absence d'influence négative du projet sur les flux de transport ; le maintien du passage à niveau est envisagé alors même que l'augmentation du flux de circulation au droit de ce passage serait de 145 % en semaine et de 426 % en heure de pointe le samedi ;
- le projet ne répond pas aux préoccupations environnementales ; près de 22 hectares d'espaces naturels vont être artificialisés ; la circonstance que le surplus sera engazonné et planté importe peu dans la mesure où l'empreinte d'un projet dans un espace non bâti se mesure en considération de l'emprise imperméabilisée qu'il va générer et non au regard de son accompagnement paysager ; aucune aire de stationnement sur les 2 896 prévues ne seront non imperméabilisées, ce qui générera des écoulements d'hydrocarbures ou autres effluents vers le milieu naturel ; par ailleurs, son linéaire de façade et sa forme imposante emportent un " effet-masse " du bâtiment.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 mars, 9 juin et 12 juillet 2016, la SAS Grand Tarbes Investissement, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société requérante d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :
- aucun élément n'est produit par la société requérante pour démontrer la méconnaissance de l'article R. 752-49 du code de commerce ; au demeurant, la lecture du procès-verbal de la réunion de la Commission nationale d'aménagement commercial démontre que la condition de quorum est satisfaite ;
- selon la jurisprudence, le positionnement d'un projet en périphérie ne constitue pas en soi un obstacle à l'objectif d'animation de la vie urbaine et rurale ; le critère des effets sur l'animation urbaine et rurale ne s'apprécie pas à l'échelle du seul centre-ville de Tarbes mais à l'échelle de l'agglomération tarbaise et, plus largement encore, de la zone de chalandise ; par ailleurs, l'aménagement d'un territoire ne se limite pas à favoriser le centre-ville mais tient compte également des territoires urbains et ruraux qui l'entourent ; la zone de chalandise, qui ne se réduit pas à la commune de Tarbes, tient compte de la nature et de la taille du projet et comprend une population de 263 579 habitants ; le projet participe d'un rééquilibrage de l'offre commerciale à l'Est de l'agglomération, lequel est prévu depuis 1996 par le schéma directeur de l'agglomération tarbaise, auquel s'est substitué le SCOT Tarbes-Ossun-Adour ; le projet répond également au phénomène d'évasion commerciale des habitants de la zone de chalandise vers Pau et Toulouse et également à l'accroissement de la population de l'agglomération tarbaise ; au-delà de la dimension commerciale, le projet répond aux orientations du SCOT, en complétant les tissus urbains existants alors qu'il s'inscrit dans un espace partiellement en friche, en préservant des espaces de respirations dans la mesure où il propose 42 % d'espaces non bâtis dédiés aux espaces verts et aux bassins paysagés, et en intégrant dans les nouvelles voies des modes doux ; le projet apporte une offre...

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