CAA de PARIS, 9ème chambre, 06/04/2017, 15PA01468, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. JARDIN
Judgement Number15PA01468
Record NumberCETATEXT000034403292
Date06 avril 2017
CounselCABINET NATAF & PLANCHAT
CourtCour administrative d'appel de Paris (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) L'Immobilière de l'Oise a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.

Par un jugement n° 1420489/1-1 du 25 mars 2015 le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 10 avril 2015, le 10 septembre 2015, le 21 octobre 2015, le 14 janvier 2016, le 20 avril 2016 et le 24 novembre 2016, la SCI L'Immobilière de l'Oise, représentée par Me C...puis par le cabinet Nataf et Planchat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1420489/1-1 du 25 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle consistant à savoir si l'article 50 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne interdit le cumul entre une sanction administrative mise à la charge d'une société et une sanction pénale visant son dirigeant dès lors que la sanction administrative revêt un caractère pénal et que la sanction administrative et la sanction pénale reposent sur les mêmes faits alors même qu'il n'y a pas d'identité juridique des parties en cause ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sous couvert de la procédure judiciaire d'enquête fiscale pour fraude fiscale ouverte en application des dispositions de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales à l'encontre de M. et MmeF..., la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) a en réalité effectué une vérification de comptabilité occulte de la SCI L'Immobilière de l'Oise, au sens des dispositions des articles L. 13 et R. 13-1 du livre des procédures fiscales ; le droit de communication auprès de l'autorité judiciaire prévu aux articles L. 81 et L. 82 C du livre des procédures fiscales a été détourné pour donner a postériori une apparence régulière au contrôle déjà effectué en méconnaissance des garanties du contribuable par la BNRDF ; l'article 28-2-VI du code de procédure pénale interdit à tout agent des services fiscaux habilité judiciairement de participer à une procédure de contrôle ; dans ces conditions, les garanties tenant à l'envoi de l'avis de vérification prévu à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales et à l'organisation d'un débat oral et contradictoire ont été méconnues en ce qui concerne l'année 2009 pour laquelle la procédure de contrôle sur pièces lui a été irrégulièrement appliquée et en ce qui concerne les années 2010 et 2011 dès lors que les opérations de contrôle ont irrégulièrement débuté de façon occulte avant l'envoi de l'avis de vérification ;

- il résulte de la réponse ministérielle n° 41 468 du ministre du budget au député Claude Pringalle au JO Débats Ass. Nat du 20 avril 1981 p. 1746 que l'administration commet un détournement de procédure lorsqu'elle utilise l'exercice du droit de communication pour accéder à l'intégralité de la comptabilité d'une société et procéder par ce biais à un examen critique de cette comptabilité au regard de ses déclarations fiscales ;

- les rappels de taxe n'ont pas été régulièrement motivés au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- le principe à valeur constitutionnelle des droits de la défense a été méconnu dès lors qu'à réception des propositions de rectification des 20 décembre 2012 et 24 avril 2013, la requérante ne disposait pas des documents utiles pour contester les rehaussements, en raison de leur saisie dans le cadre de la procédure pénale ;


- le fait que les dispositions prévues par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ont été respectées est sans incidence sur la violation du principe d'égalité des armes, dès lors que la garantie prévue par l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ne correspond pas à l'intégralité des obligations résultant du principe de l'égalité des armes prévu dans les mêmes termes à l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui exigent un droit d'accès au dossier complet détenu par l'administration fiscale suite à l'exercice de son droit de communication ; il en résulte que l'administration était tenue à peine d'irrégularité de transmettre à la société requérante le procès-verbal d'audition de M. A...même si cette communication n'était pas exigée sur le fondement de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; il est demandé qu'afin de vérifier si d'autres procès-verbaux provenant du dossier pénal étaient en possession du service, l'administration produise la liste des pièces de la procédure pénale dont elle a obtenu communication ;

- une violation des droits de la défense intervenue au stade de la procédure administrative n'est pas régularisable à un stade ultérieur de la procédure ;
- le vérificateur a consulté le 13 février 2013 pendant la vérification de comptabilité la comptabilité de la requérante saisie par la juge judiciaire sans soumettre l'examen des pièces consultées à un débat oral et contradictoire ;

- les rappels de taxe sont fondés sur des documents d'origine illicite ; il résulte de la jurisprudence du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel qu'en vertu de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des articles L. 81 et L. 82 C du livre des procédures fiscales l'administration n'est pas en droit de fonder l'imposition sur des pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge ; en l'espèce, le Premier Président de la Cour d'appel de Paris a jugé par une ordonnance du 8 février 2011 n° 10-14507 devenue définitive que les fichiers informatiques saisis constituaient des données volées à la banque HSBC Private Bank Suisse SA, de sorte que l'origine de ces pièces est illicite ; en vertu du principe d'indépendance des procédures, l'administration ne peut utilement se prévaloir de la validation par la Cour de cassation de la procédure judiciaire pour fraude fiscale menée à l'encontre de son gérant M.F... ; la plainte pour fraude fiscale visant M. F...était irrégulièrement fondée sur des fichiers informatiques transmis par le procureur de Nice en violation des conditions du droit de communication prévu à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales dès lors qu'aucune instance civile ou commerciale ou information criminelle ou correctionnelle au sens de ce texte n'était ouverte en France ou en Suisse mais seulement une procédure d'enquête préliminaire ; la transmission de ces fichiers informatiques par le procureur de Nice sur le fondement de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales à l'administration fiscale en vue de leur exploitation fiscale constitue une violation de la réserve du gouvernement suisse sur l'article 2 de la convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale signée à Strasbourg le 20 avril 1959 instituant une condition de spécialité dans l'utilisation des pièces communiquées dans le cadre de l'entraide judiciaire et de l'article 26 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités en vertu duquel tout traité doit être exécuté de bonne foi ; ces règles et réserve s'appliquent aux autorités fiscales lorsqu'elles utilisent des informations qui leur ont été communiquées dans le cadre de la convention européenne d'entraide judiciaire internationale du 20 avril 1959 ; il résulte de tout ce qui précède que l'administration fiscale ne pouvait régulièrement fonder les rappels litigieux sur les pièces de la procédure pénale irrégulièrement ouverte à l'encontre de M.F... ;

- en ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition, l'administration se limite à de simples affirmations sans apporter la preuve à sa charge du caractère fictif des factures litigieuses et des prestations correspondantes dès lors qu'il est de principe que la réalité des livraisons ou prestations résultant d'une facture dont l'auteur est inscrit au registre du commerce est présumée ; en outre les déclarations de M. D...B..., gérant de la société Novo Concept, recueillies par procès-verbal, établissent la...

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