Cour de cassation, Assemblée plénière, 4 octobre 2019, 10-19.053, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Arens (première présidente)
ECLIECLI:FR:CCASS:2019:AP00648
Case OutcomeCassation sans renvoi
Subject MatterETAT CIVIL - Acte de l'état civil - Acte dressé à l'étranger - Transcription - Refus - Cas - Naissance d'un enfant à l'étranger dans le cadre d'une convention de gestation pour autrui - Transcription en ce qui concerne le père biologique - Convention européenne des droits de l'homme - Article 8 - Compatibilité (non) CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 8 - Respect de la vie privée et familiale - Domaine d'application - Etendue - Détermination - Portée
CitationN1 >A rapprocher :Ass. plén., 5 octobre 2018, pourvoi n° 10-19.053, Bull. 2018, I, (sursis à statuer), et les arrêts cités.N2 >A rapprocher :Ass. plén., 5 octobre 2018, pourvoi n° 10-19.053, Bull. 2018, I, (sursis à statuer), et les arrêts cités
Appeal NumberP1900648
Docket Number10-19053
Date04 octobre 2019
CounselSCP Spinosi et Sureau,SCP Lévis
CourtAssemblée Plénière (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

COUR DE CASSATION LG


ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE


Audience publique du 4 octobre 2019
Cassation sans renvoi
Mme ARENS, première présidente

Arrêt n° 648 P+B+R+I
Pourvoi n° S 10-19.053






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. N... D...,

2°/ Mme V... T..., épouse D...,

domiciliés tous deux [...], et agissant en qualité de représentants légaux de leurs deux filles mineures, E... et J...,

contre l'arrêt rendu le 18 mars 2010 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige les opposant au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [...], défendeur à la cassation.

Par arrêt du 6 avril 2011, la première chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. et Mme D... à l'encontre de cet arrêt.

M. et Mme D... ont saisi la Cour européenne des droits de l'homme qui, par arrêt du 26 juin 2014, a dit qu'il y avait eu violation de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'agissant du droit des enfants au respect de leur vie privée.

Par arrêt en date du 16 février 2018, la Cour de réexamen des décisions civiles, saisie par M. et Mme D..., a fait droit à la demande de réexamen et dit que la procédure se poursuivra devant l'assemblée plénière de la Cour de cassation.

Les demandeurs au pourvoi invoquent, devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt.

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé à la Cour de cassation par la SCP Potier de la Varde-Buk Lament.

La SCP Spinosi et Sureau s'est constituée aux lieu et place de la SCP Potier de la Varde-Buk Lament.

Par un arrêt avant dire droit du 5 octobre 2018, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a transmis à la Cour européenne des droits de l'homme une demande d'avis consultatif.

L'assemblée plénière a sursis à statuer jusqu'à l'avis de la Cour européenne des droits de l'homme.

La Cour européenne des droits de l'homme a rendu son avis consultatif le 10 avril 2019.

Un mémoire en reprise d'instance a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Spinosi et Sureau, avocat de Mmes E... et J... D..., devenues majeures en cours d'instance.

Une constitution en intervention volontaire en défense a été déposée par la SCP Marc Lévis, avocat de l'association Arcilesbica.

Des observations complémentaires ont été déposées au greffe de la Cour de cassation par la SCP Spinosi et Sureau.

Des observations ont été déposées au greffe de la Cour de cassation par la SCP Marc Lévis.

Le rapport écrit de Mme Martinel, conseiller, et l'avis écrit de M. Molins, procureur général, ont été mis à la disposition des parties.

Deux avis 1015 du code de procédure civile ont été mis à disposition des parties et des observations ont été déposées au greffe de la Cour de cassation par la SCP Spinosi et Sureau, avocat des consorts D..., et la SCP Marc Lévis, avocat de l'association Arcilesbica.

Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 20 septembre 2019, où étaient présents : Mme Arens, première présidente, Mme Mouillard, MM. Pireyre, Soulard, Cathala, présidents, M. Echappé, Mme Teiller, conseillers faisant fonction de présidents, Mme Martinel, conseiller rapporteur, MM. Prétot, Pers, Huglo, Rémery, Pronier, Avel, Parlos, Mmes Vaissette, Van Ruymbeke, MM. Bech, Mornet, conseillers, M. Molins, procureur général, Mme Caratini, directeur principal des services de greffe.

Sur le rapport de Mme Martinel, conseiller, assistée de Mme Noël, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, de la SCP Marc Lévis, l'avis de M. Molins, procureur général, auquel la SCP Marc Lévis a répliqué, et après en avoir délibéré conformément à la loi.

I. FAITS ET PROCÉDURE

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2010), aux termes de leurs actes de naissance américains, dressés dans le comté de San Diego (Californie) conformément à un jugement de la Cour supérieure de l'Etat de Californie du 14 juillet 2000, E... et J... D... sont nées le [...] à La Mesa (Californie) de M. N... D... et Mme V... D..., son épouse, tous deux de nationalité française.

Le 25 novembre 2002, le ministère public a fait transcrire ces actes de naissance par le consulat général de France à Los Angeles (Californie).

Par acte du 16 mai 2003, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Créteil a assigné M. et Mme D... en annulation de cette transcription.

Par un jugement du 13 décembre 2005, confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 octobre 2007, le procureur de la République a été déclaré irrecevable en son action.

Cet arrêt a été cassé par un arrêt de la Cour de cassation du 17 décembre 2008 (1re Civ., 17 décembre 2008, pourvoi n° 07-20.468).

Par un arrêt du 18 mars 2010, la cour d'appel de Paris, statuant sur renvoi après cassation, a annulé la transcription, sur les registres du service central d'état civil de Nantes, des actes de naissance établis dans le comté de San Diego (Californie) et désignant M. N... D... et Mme V... D... en qualité de père et mère des enfants E... F... P... D... et J... M... R... D....

Par un arrêt du 6 avril 2011 (1re Civ., 6 avril 2011, pourvoi n° 10-19.053), la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. et Mme D... à l'encontre de cet arrêt.

Ces derniers ont saisi la Cour européenne des droits de l'homme, qui, par un arrêt du 26 juin 2014, a dit qu'il y a eu violation de l'article 8 de la Convention s'agissant du droit de E... et J... D... au respect de leur vie privée et que l'Etat français devait verser une somme aux deux requérantes au titre du préjudice moral subi et des frais et dépens.

Sur le fondement des articles L. 452-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire institués par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, M. et Mme D..., agissant en qualité de représentants légaux de leurs deux filles mineures, ont demandé le réexamen de ce pourvoi.

Par une décision du 16 février 2018, la Cour de réexamen des décisions civiles a fait droit à la demande et dit que l'affaire se poursuivra devant l'assemblée plénière de la Cour de cassation.

Par un arrêt avant dire droit du 5 octobre 2018, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a transmis à la Cour européenne des droits de l'homme une demande d'avis consultatif sur les questions suivantes :

1°) - En refusant de transcrire sur les registres de l'état civil l'acte de naissance d'un enfant né à l'étranger à l'issue d'une gestation pour autrui, en ce qu'il désigne comme étant sa "mère légale" la "mère d'intention", alors que la transcription de l'acte a été admise en tant qu'il désigne le "père d'intention", père biologique de l'enfant, un Etat-partie excède-t-il la marge d'appréciation dont il dispose au regard de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ? A cet égard, y a-t-il lieu de distinguer selon que l'enfant est conçu ou non avec les gamètes de la "mère d'intention" ?

2°) - Dans...

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