Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 29 mars 2017, 15-27.811, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2017:CO00480
Case OutcomeCassation partielle
Date29 mars 2017
Docket Number15-27811
CounselSCP Hémery et Thomas-Raquin,SCP Ortscheidt
Appeal Number41700480
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que MM. X..., pharmaciens d'officine, ont créé la société Pyxis Pharma (la société Pyxis), structure de regroupement à l'achat (SRA), afin de négocier, auprès des fournisseurs, les conditions d'achat de produits pour le compte de ses adhérents, ainsi que la société Sagitta Pharma (la société Sagitta), centrale d'achat pharmaceutique (CAP), intervenant en qualité de prestataire logistique ; que ces sociétés ont souhaité nouer une relation commerciale avec la société de Coopération pharmaceutique française (la société Cooper), établissement pharmaceutique spécialisé dans la fourniture aux pharmaciens de médicaments et accessoires, sur la base des conditions générales de vente applicables aux officines ; que la société Cooper ayant considéré que ces dernières ne leur étaient pas applicables, cette démarche n'a pas abouti ; qu'ayant ultérieurement constaté que les sociétés Pyxis et Sagitta faisaient acheter des produits Cooper par les officines de MM. X..., les SELAS Pharmacie Saint Epain, Pharmacie Y...-X..., et Pharmacie X Z...(les pharmacies), pour ensuite rétrocéder ces produits, en vue de les vendre aux adhérents de la société Pyxis via son site internet, la société Cooper a assigné les sociétés Pyxis et Sagitta, MM. X... et les pharmacies en concurrence déloyale devant le tribunal de grande instance de Paris, sur le fondement des articles L. 5125-1 et L. 5125-2 du code de la santé publique, L. 121-1 du code de la consommation et 1382 du code civil ; que la société Pyxis s'est prévalue, en défense au fond et au soutien d'une demande reconventionnelle, de pratiques restrictives de concurrence imputables à la société Cooper, prises de la méconnaissance des articles L. 441-6 et L. 442-6, I, 9° du code de commerce, ayant justifié selon elles les rétrocessions litigieuses, et a soulevé, en conséquence, une exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce de Paris sur le fondement de l'article D. 442-3 du code de commerce ; que le tribunal de grande instance de Paris, puis la cour d'appel de Paris, ont accueilli les demandes de la société Cooper ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés Pyxis, Sagitta, Pharmacie Saint Epain et Pharmacie Y...-X...font grief à l'arrêt de rejeter leur exception d'incompétence alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 721-5 du code de commerce, selon lequel « les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître des actions en justice dans lesquelles l'une des parties est une société constituée conformément à la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 », trouve à s'appliquer lorsqu'une des parties exerce une profession libérale en pratiquant une activité civile sous la forme d'une société commerciale ; que ce texte est en conséquence inapplicable aux officines de pharmacies qui, soumises au statut des professions libérales, exercent néanmoins une activité commerciale ; qu'en retenant que le tribunal de grande instance de Paris compétent en application de l'article L. 721-5 du code de commerce, dès lors que les sociétés Pharmacies Saint Epain et Y...-X...étaient dans la cause, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ainsi que l'article D. 442-3 du code de commerce ;

2°/ que lorsque l'objet du litige, fondé sur l'article L. 442-6 du code de commerce, concerne des rapports contractuels entre personnes morales ou physiques commerçantes, la juridiction commerciale est compétente, en application de l'article D. 442-3 du code de commerce, peu important qu'une autre partie, qui n'a pas la qualité de fournisseur et qui n'est pas directement concernée par les pratiques visées à l'article L. 442-6, soit attraite à la procédure ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Paris compétent, cependant que l'objet du litige fondé sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce concernait les seuls rapports contractuels entre la société Cooper, fournisseur, et la société Pyxis Pharma, structure de regroupement à l'achat, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt rappelle que la référence, par la société Pyxis, au droit des pratiques restrictives de concurrence justifie que le litige soit examiné par une juridiction spécialement désignée par l'article D. 442-3 du code de commerce ; qu'il relève qu'en application de l'article L. 442-6- III du code de commerce, les pratiques visées par cet article peuvent ressortir à la compétence de la juridiction civile ou commerciale, tandis que, par dérogation au 2° de l'article L. 721-3 du code de commerce, l'article L. 721-5 du même code prévoit que les tribunaux civils sont seuls compétents pour connaître des actions en justice dans lesquelles l'une des parties est une société constituée conformément à la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ; qu'il constate que, par son acte du 17 décembre 2012, la société Cooper a, notamment, assigné les SELAS Pharmacie Saint Epain, Pharmacie Y...-X...et Pharmacie X Z...et deux personnes physiques non commerçantes ; que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a justement déduit, en considération de l'objet de l'entier litige et du statut de certains des défendeurs, que le tribunal de grande instance de Paris avait le pouvoir de statuer sur l'ensemble des prétentions ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les sociétés Pyxis, Sagitta, Pharmacie Saint Epain et Pharmacie Y...-X...font grief à l'arrêt de dire qu'elles se sont livrées à des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Cooper et, en conséquence, de les condamner in solidum au paiement de dommages-intérêts, de faire interdiction aux sociétés Pyxis et Sagitta de commercialiser les produits Cooper sous astreinte et d'ordonner des mesures de publication alors, selon le moyen :

1°/ qu'en retenant que la société Cooper ne s'était rendue coupable d'aucun comportement discriminatoire à l'égard de la société Pyxis Pharma dès lors qu'elle était libre, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce, applicable en droit commun de la distribution, de lui appliquer les conditions générales différentes de celles appliquées à la vente en direct aux officines, sans tenir compte, ainsi qu'il lui était demandé, de la spécificité des règles de la distribution de médicaments entre opérateurs pharmaceutiques et, en particulier, des règles spéciales applicables aux structures de regroupement à l'achat instituées par l'article D. 5125-24-16 du code de la santé publique, et sans vérifier si ce refus de vendre des médicaments à une structure de regroupement à l'achat dans les conditions de vente de médicaments en direct, pour garder la maîtrise de son réseau de distribution, ne constituait pas une pratique discriminatoire, restrictive de concurrence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 441-6, L. 442-6 du code de commerce et D. 5125-24-16 du code de la santé publique ;

2°/ qu'en écartant l'existence de tout comportement discriminatoire de la société Cooper à l'égard de la société Pyxis Pharma au motif inopérant que « les sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma ne sont pas des officines », cependant que les structures de regroupement à l'achat et des centrales d'achat pharmaceutique ont précisément été créées par les pouvoirs publics pour permettre aux petites et moyennes officines de pouvoir négocier et gérer les achats en commun, par l'intermédiaire d'un commissionnaire à l'achat, tout en conservant chacune la qualité d'acheteur, ce qui implique que les structures de regroupement à l'achat bénéficient dans la négociation des mêmes conditions de la vente en direct que les grandes officines, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 442-6 du code de commerce et de l'article D. 5125-24-16 du code de la santé publique ;

3°/ que les sociétés Pyxis Pharma, Sagitta Pharma, Pharmacie Saint Epain, Pharmacie Y...-X..., Pharmacie X Z...et MM. Thomas et Jérôme X..., produisaient le contrat de commission conclu entre la société Pyxis Pharma et ses officines adhérentes, qui stipule expressément que « 1. 1 Le présent contrat a pour objet de préciser les modalités selon lesquelles le commissionnaire négociera les opérations d'achat des produits auprès des laboratoires fournisseurs (ci-après « Les Laboratoires Fournisseurs ») d'ordre et pour le compte de l'officine commettante. Le présent contrat vient ainsi préciser les droits et obligations respectifs des parties à cet égard », que « 1. 2 l'objet du présent contrat de commission est expressément limité à l'achat des produits énumérés par l'article D. 5125-24-1 du code de la santé publique, à savoir les médicaments non-remboursables, les médicaments non-expérimentaux et les produits figurant sur la liste des marchandises dont les pharmaciens peuvent faire le commerce dans leur officine » et que « 1. 4 il est convenu qu'à aucun moment la SRA commissionnaire n'acquiert la propriété des produits qu'elle est chargée de négocier pour le compte de l'officine commettante, l'opération de vente/ achat étant directement et exclusivement effectuée entre le laboratoire fournisseur et l'officine commettante » (p. 2 et 3 du contrat de commission) ; qu'il s'infère de ces stipulations claires et précises que la société Pyxis Pharma intervenait exclusivement en qualité de commissionnaire à l'achat ; qu'en relevant néanmoins que les sociétés Pyxis Pharma et Sagitta Pharma n'établissaient pas la qualité sous laquelle intervenaient la SAR et la CAP, au motif inopérant que l'expression « d'ordre et pour le compte des officines » pouvant s'appliquer tant au commissionnaire — étant observé qu'en tout état de cause, le...

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