Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 25 mars 2015, 13-22.043, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2015:SO00503
CitationSur la période servant de base de calcul à la durée hebdomadaire du travail dans les transports, à rapprocher : Soc., 12 mars 2014, pourvoi n° 12-28.483, Bull. 2014, V, n° 77 (cassation partielle), et l'arrêt cité
Case OutcomeCassation partielle
Date25 mars 2015
Docket Number13-22043
CounselSCP Gatineau et Fattaccini,SCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray
Appeal Number51500503
Subject MatterTRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Heures supplémentaires - Calcul - Base de calcul - Durée hebdomadaire du travail - Exception - Cas - Entreprise de transport routier de marchandises - Personnels roulants - Durée maximale de trois mois - Fondement - Décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Publication au Gazette officielBulletin 2015, V, n° 62

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 17 mai 2004 par la société Roulleau, devenue la société Rouxel béton, en qualité de conducteur grand routier ; qu'il a, le 8 avril 2008, pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen, en ce qu'il vise la demande au titre des heures supplémentaires pour la période postérieure au 5 janvier 2007 :

Vu l'article 4 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-8 ancien du code du travail, la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants peut être calculée sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période postérieure au 5 janvier 2007, l'arrêt, après avoir constaté que la société Rouxel Béton produisait un procès-verbal de réunion du comité d'entreprise du 2 avril 2007 précisant que « la direction maintient son calcul des temps sur trois mois bien que le secrétaire du CE émette un avis contraire », retient que l'employeur a mis en place une modulation du temps de travail sur l'année sans accord express du salarié et sans négociation avec les organisations représentatives du personnel, que ce système ne peut être validé et que seul un décompte hebdomadaire du temps de travail doit être pris en compte ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur était fondé, nonobstant la mise en place d'une modulation illicite, à décompter le temps de travail sur trois mois, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen pris en sa première branche, en ce qu'il vise la demande au titre des repos compensateurs pour la période postérieure au 5 janvier 2007 :

Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif visé par le deuxième moyen et relatif à la demande au titre des repos compensateurs pour la période postérieure au 5 janvier 2007 et à la condamnation de l'employeur à calculer, pour cette période, le droit au repos compensateur sur la base d'un décompte hebdomadaire du temps de travail ;

Sur le deuxième moyen pris en sa deuxième branche, en ce qu'il vise la demande au titre des repos compensateurs pour la période antérieure au 5 janvier 2007 :

Vu l'article 4 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, dans sa version applicable au litige, ensemble l'article L. 212-5-1 ancien du code du travail ;

Attendu que selon le premier de ces textes, le droit à repos compensateurs naît, pour les personnels roulants grands routiers, et dans l'hypothèse d'un décompte hebdomadaire du temps de travail, à compter de la 44e heure hebdomadaire ;

Attendu que l'arrêt, après avoir constaté que le salarié avait la qualité de grand routier, retient que le repos compensateur est égal à 50 % des heures effectuées au-delà de la 39e heure hebdomadaire à partir du contingent annuel réglementaire de 180 heures supplémentaires et condamne l'employeur à effectuer le décompte des sommes éventuellement dues selon ces principes de calcul ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif visé par le troisième moyen, disant que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamnant l'employeur au paiement de sommes à ce titre ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le deuxième moyen pris en sa troisième branche :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Rouxel béton au paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires pour la période antérieure au 5 janvier 2007 et au titre de l'ancienneté, et en ce qu'il déboute M. X... de sa demande au titre du travail dissimulé, l'arrêt rendu le 29 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille quinze.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Rouxel béton.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société ROUXEL BETON à verser à Monsieur X... les sommes de 11 142,85 € à titre d'heures supplémentaires assorties des congés payés afférents, 222,86 € au titre de l'ancienneté outre 22,28 € au titre des congés payés afférents, déduction faite de la somme de 2092,63 € au titre de 148,73 heures supplémentaires majorées à 50%, outre une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile

AUX MOTIFS QUE « Sur le décompte hebdomadaire: Il résulte des documents versés aux débats que: Le décret du 22 décembre 2003 applicable lors de l'embauche du salarié prévoyait une possibilité de décompte de la durée du travail dans la branche d'activité, sur une durée pouvant atteindre un mois, sous réserve soit d'un accord d'entreprise, soit de l'avis du comité d'entreprise, des délégués du personnel, et de l'autorisation de l'inspection du travail.
A défaut de justifier de l'accord de l'inspection du travail, l'employeur ne saurait s'opposer au décompte hebdomadaire du temps de travail jusqu'au décret du 31 mars 2005, lequel a maintenu la possibilité d'un décompte sur une période supérieure à la semaine, pouvant aller jusqu'à trois mois, sous réserve de la consultation des élus du personnel, mais en supprimant l'autorisation obligatoire de l'inspection du travail.
Pour la période postérieure à ce décret, l'employeur soutient avoir soumis la question aux représentants du personnel. Il produit à cet effet un procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 2 mai 2006, laquelle s'est tenue de 9h30 à 10h.
Il est indiqué dans ce compte rendu en son paragraphe 4:
"L'accord sur la modulation du temps de travail a été refusé. Le calcul du temps de travail se fera sur trois mois"
Il ne saurait cependant se déduire de cette phrase lapidaire que les élus du personnel aient été en mesure, surtout dans le peu de temps qui leur était imparti, de débattre de ce problème et de donner un avis éclairé, la phrase sus-mentionnée évoquant davantage une décision unilatérale de l'employeur que le résultat d'une consultation.
En tout état de cause, le décret du 31 mars 2005 a été abrogé par une décision du Conseil d'Etat du 18 octobre 2006, faisant revivre les dispositions antérieures, à savoir limitation du décompte du temps de travail à l'intérieur d'une période maximum d'un mois après avis des représentants du personnel et autorisation de l'inspecteur du travail.
L'employeur soutient que ce revirement est "inacceptable", car créant "une situation d'instabilité juridique" contraire aux principes généraux du droit communautaire en général, et de l'arrêt Bosch du 6 avril 1962 en particulier.

Cet arrêt, versé aux débats, émane de la Cour de Justice des Communautés européennes et statue sur un litige relatif à une interdiction d'importer, sur le fondement des articles 85 à 90 du traité CEE, et sur la nullité de certaines ententes commerciales.
La sécurité juridique invoquée fait partie de l'argumentation de l'une des parties au litige et ne ressort pas de la décision de la cour, telle qu'elle résulte du dispositif de cet arrêt qui ne traite nullement d'une question de droit du travail dans la communauté européenne.
Par ailleurs, l'employeur qui se reconnaît adhérent au syndicat national des entreprises de transport logistique de France, ne saurait valablement prétendre que dès l'annulation du décret sus-visé, il n'a pas été alerté par celui-ci sur la nécessaire remise en question des dispositions éventuellement prises sous l'empire du décret précédent, et notamment sur l'obligation de soumettre sa décision à l'appréciation de...

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